Offshore Leaks: investigations internationales

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Au delà du degré de corruption du système financier, bancaire et politique international, de l'inconsistance de la réglementation issue des différents sommets depuis le G20 de Londres et de l'hypocrisie générale des administrations concernées que manifeste l'enquête de l'ICIJ (http://www.icij.org/), éléments dont l'exclusivité est toute relative étant donnée la profusion de rapports officiels et articles sur ces questions, c'est surtout le contexte budgétaire et social dans lequel survient la publication de ces données qui est nouveau. Gageons que le seuil de tolérance des peuples, citoyens et électeurs n'est plus exactement au même niveau que lors de la chute de Lehman Brothers en 2008 et que le renflouement inconditionnel des banques via les fonds publics a laissé des traces...

Quoiqu'il en soit voici le contenu de l'enquête traduit en français:

"Une mémoire tampon de 2,5 millions de fichiers a trahi les secrets de plus de 120.000 sociétés et trust offshore (à l’étranger), révélant au grand jour des arrangements cachés de politiciens, d’escrocs et de très grosses fortunes à travers le monde. Ces fichiers obtenus par l’International Consortium of Investigative Journalists (ICIJ). Les enregistrements mettent à nu les noms derrière les entreprises clandestines et les trusts privées dans les îles Vierges britanniques, les îles Cook et d'autres refuges offshore.

Parmi ceux-ci, des dentistes et médecins américains, des bourgeois grecs ainsi que des familles et associés de despotes de longues dates, des escrocs de Wall Street, des milliardaires d’Europe de l’Est, des dirigeants d’entreprises russes, des marchands d’armes internationaux, une société écran dirigée par un homme de paille que l’Union européenne a étiqueté comme l’un des rouages de l’élaboration du programme de développement nucléaire de l’Iran.

Les fuites fournissent faits et chiffres - des transactions en espèces, des dates d’incorporation (assimilation?), des liens entre entreprises et particuliers - qui illustrent à quel point le secret financier offshore s’est largement propagé dans le monde entier. Qui permet aux riches et aux longs bras d’éluder les impôts et d’alimenter la corruption et les maux économiques dans de nombreux pays, riches et pauvres. Les documents détaillent les avoirs offshore d’entreprises et de particuliers dans plus de 170 pays et territoires.
 
Ce trésor de données représente la plus grande réserve d’informations confidentielles sur le système offshore jamais obtenue par un organe de presse. La taille totale des fichiers, mesurée en gigaoctets, est plus de 160 fois plus importante que la fuite du département d’État des États-Unis interceptée par Wikileaks en 2010.

Pour analyser ces documents, les 86 journalistes de 46 pays ont utilisé des outils high-tech de traitement de données et investigué en profondeur pour passer au crible emails, livres de comptes et autres fichiers couvrant près de trente années.

Gangsters et oligarques

La vaste flux d'argent offshore - légal et illégal, personnes physiques et morales - peut perturber des économies et monter des nations les unes contres les autres. La persistance de la crise financière européenne a été alimentée par une catastrophe fiscale grecque et exacerbée par la fraude fiscale offshore et par une grave crise bancaire dans le minuscule paradis fiscal de Chypre, où les actifs des banques locales ont été gonflés par des vagues de liquidités en provenance de Russie. La Stolen Asset Recovery Initiative, un programme de la Banque mondiale et de l’Organisation des Nations Unies, a estimé que les flux transfrontaliers des recettes mondiales des crimes financiers totalisaient un montant annuel estimé entre 1.000 et 1.600 milliards de dollars.

Les clients offshore identifiés dans les documents :

- Des particuliers et des sociétés liés à l’affaire Magnitski en Russie, un scandale de fraude fiscale qui a égratigné les relations américano-russes. Il en avait résulté l'interdiction pour les Américains d’adopter des orphelins russes.

- Un magnat de l'entreprise qui a gagné des milliards de dollars en contrats en plein boom de la construction du Président azerbaïdjanais Ilham Aliyev, alors même qu’il officiait en tant que directeur des sociétés offshore détenues par des filles du président.

- Des milliardaires indonésiens ayant des liens avec l'ancien dictateur Suharto, qui a enrichi un cercle d’élites au cours de ses décennies au pouvoir.

Les documents fournissent également de possibles nouveaux indices sur des crimes et pistes financières non-résolus ou abandonnés.

Après avoir appris que l’ICIJ avait identifié la fille aînée de l'ancien dictateur Ferdinand Marcos, Maria Imelda Marcos Manotoc, en tant que bénéficiaire d'un trust des Îles Vierges Britanniques, les responsables philippins n’ont pas caché leur impatience de savoir si les actifs du trust faisaient partie des 5 milliards de dollars (estimation) que son père a amassés par la corruption. Manotoc, un gouverneur de province aux Philippines a refusé de répondre à une série de questions sur ledit trust.

D’autres noms de haut niveau ont été identifiés dans les données offshore. Ils comprennent l'épouse du Premier vice-Premier ministre russe, Igor Chouvalov, et deux cadres supérieurs chez Gazprom, le plus gros extracteur de gaz naturel au monde, propriété du Gouvernement russe. Les fichiers récupérés montrent que la femme de Chouvalov et les responsables de Gazprom ont tous les trois des participations dans des sociétés sur les Îles Vierges britanniques.
 
L’essor de l’offshore

L'anonymat du monde offshore rend les flux d’argent difficiles à tracer. Une étude réalisée par James S. Henry, ancien économiste en chef au sein de McKinsey & Company, estime que les personnes riches ont entre 21.000 et 32.000 milliards de dollars en patrimoine financier privé niché dans les paradis offshore - à peu près l’équivalent des économies américaine et japonaise additionnées.

Même si l'économie mondiale a trébuché, le monde offshore a continué de croître, a déclaré Henry, qui est un membre du conseil du Tax Justice Network, un groupe international de recherche et d’influence critique à l’égards des paradis fiscaux. Ses recherches montrent, par exemple, que les actifs gérés par les 50 plus grandes “banques privées” du monde - qui utilisent souvent des paradis fiscaux pour servir leurs clients à “valeur nette élevée" - sont passés de 5.400 milliards de dollars en 2005 à plus de 12.000 milliards de dollars en 2010.

Les défenseurs de l’offshore répliquent que la plupart des clients offshore sont engagés dans des opérations légales. Les centres offshore, disent-ils, permettent aux entreprises et aux particuliers de diversifier leurs investissements, forger des alliances commerciales à travers les frontières nationales et faire des affaires dans les zones favorables à l'entrepreneuriat qui ne s’embarrassent pas des règles et des lourdes formalités administratives du monde onshore.

Une grande partie du rapport de l’ICIJ a mis l'accent sur les travaux de deux sociétés offshore, l’une, Portcullis TrustNet, basée à Singapour et l’autre, Commonwealth Trust Limited (CTL), sur les Îles vierges britaniques. Celles-ci auraient aidé des dizaines de milliers de personnes à créer des sociétés et trusts offshore ainsi que des comptes en banque difficiles à tracer. Les organismes de régulation des Îles Vierges britanniques ont révélé que CTL a violé à plusieurs reprises les lois anti-blanchiment entre 2003 et 2008 en omettant de vérifier et d’enregistrer les identités et l’antécédents de ses clients. «Cette entreprise a connu des problèmes de blanchiment d’argent systémique au sein de son organisation», a déclaré l’année dernière un responsable de la Commission des Services financiers des Îles vierges britanniques.

Les documents montrent, par exemple, que CTL a mis sur pied 31 entreprises en 2006 et 2007 pour un individu identifié par la suite par le tribunal britannique comme un homme de paille pour Mukhtar Ablyazov, un magnat de la banque kazakhe accusé d'avoir volé 5 milliards de dollars de l'une des plus anciennes banques de Russie. Ablyazov dément avoir commis le moindre acte répréhensible.

L’examen des documents de TrustNet a également permis d’identifier 30 clients américains accusés de fraude, de blanchiment d'argent, ou de tout autre faute financière grave dans des procès ou des affaires criminelles. Ils comprennent les ex-titans de Wall Street Paul Bilzerian, un “raider” d’entreprise reconnu coupable de fraude fiscale et de violation de valeurs mobilières en 1989, et Raj Rajaratnam, un gestionnaire de fonds de couverture milliardaire envoyé en prison en 2011 à l’issue de l’un des plus grands scandales de délits d'initiés de l'histoire américaine. TrustNet a refusé de répondre à une série de questions à ce sujet.
 
“Guichet unique”

Les clients offshore sont servis par une industrie d’intermédiaires grassement rétribués. Des comptables, des avocats et des banques qui leur procurent un abri et leur montent des structures financières et des actifs aléatoires en leur nom.

Des documents obtenus par l’ICIJ montrent comment deux premières banques suisses, UBS et Clariden, ont travaillé avec TrustNet à fournir à leurs clients des sociétés secrètes et blindées dans les Îles Vierges britanniques et d'autres centres offshore. Clariden, détenue par le Credit Suisse, aurait requis de tels niveaux de confidentialité pour certains clients qu'un responsable chez TrustNet a décrit la demande de la banque comme le «Saint Graal» des entités offshore - une entreprise tellement anonyme que la police et les régulateurs tomberaient sur un “mur blanc” s’ils essayaient de découvrir les identités des propriétaires (actionnaires).

Un porte-parole d'UBS a déclaré que la banque applique «les plus hautes normes internationales» pour lutter contre le blanchiment d'argent et que TrustNet "est l'un des 800 fournisseurs de services à l'échelle mondiale avec qui les clients UBS choisissent de travailler pour subvenir à leurs besoins de richesses et de planification de la relève. Ces fournisseurs de services sont également utilisés par les clients d’autres banques."

TrustNet se décrit comme un «guichet unique» - son personnel comprend des avocats, des comptables et autres experts qui peuvent façonner des “packages” secrets pour s'adapter aux besoins et aux valeurs nettes de ses clients. Ces forfaits peuvent être simples et pas chers, comme une société à affrétée dans les îles Vierges britanniques. Ou ils peuvent prendre la forme de structures complexes qui tissent de multiples couches de trusts, des sociétés, des fondations, des produits d'assurance et ces fameux administrateurs et actionnaires “nominés”.

Quand ils créent des entreprises pour leurs clients, les entreprises de services offshore nomment souvent de faux administrateurs et actionnaires - des procurations qui font office de “stands-in” lorsque les véritables propriétaires d’entreprises ne veulent pas que leur identité soit connue. Grâce à la prolifération d’administrateurs et d’actionnaires de paille, les traqueurs de blanchiment d'argent et autres crimes financiers se retrouvent souvent dans des impasses quand ils essayent de découvrir qui se trouve réellement derrière les sociétés offshore.

Une analyse menée de concert par l’ICIJ, la BBC et le Guardian a identifié un groupe de 28 administrateurs de paille qui ont servi en tant que représentants sur le papier de plus de 21.000 entreprises entre elles. Ces administrateurs représentant 4.000 entreprises chacun.

Parmi les hommes de paille identifiés dans les documents obtenus par l’ICIJ figure un agent britannique qui a servi en tant qu’administrateur pour une société basée aux Îles vierges britanniques, Tamalaris Consolidated Limited. Organisation que l'Union européenne a étiqueté comme une société écran de la Compagnie de Navigation de la République islamique d'Iran. L'UE, l'ONU et les Etats-Unis ont accusé l'IRISL d'aider l'Iran à l’élaboration de son programme nucléaire.
 
"Le Monde et le Huffington Post révèlent ce vendredi comment la BNP Paribas et le Crédit agricole ont aidé leurs clients à placer leur argent dans des paradis fiscaux.

Après les détenteurs de comptes offshores, c'est au tour des banques. Grâce aux documents transmis par l’ICIJ, un consortium international de journalistes d’investigation, Le Monde et le Huffington Post révèlent aujourd’hui comment la BNP Paribas et le Crédit Agricole ont aidé, entre la fin des années 90 et durant les années 2000, certains de leurs clients à placer de l’argent dans des paradis fiscaux. Offrant à voir les rouages infiniment complexes de l’évasion fiscale.

D'après Le Monde, les deux banques françaises "ont supervisé la création de très nombreuses sociétés offshore pour des clients recherchant la confidentialité et une fiscalité plus faible, dans les îles Vierges britanniques, dans les îles Samoa ou à Singapour, à la fin des années 1990 et tout au long des années 2000".

En résumé : afin d’aider leurs clients désireux de payer moins d’impôts, les banques font appel à leur filiales étrangères. Celles-ci créent alors des sociétés offshores pour le compte des clients concernés. Très opaques, ces dernières leur garantissent une confidentialité quasi impénétrable en recourant à des prête-noms. Ce sont ces noms, pour le moins fictifs, que l’on retrouve dans les documents officiels des sociétés offshore. "Ils figurent sur plusieurs milliers de sociétés à la fois", rapporte la vidéo.

Un montage financier sur commande

Le Huffington Post a quant à lui mis la main sur un document interne de BNP Paribas Wealth Management destiné aux conseillers clientèle. Datant de 2009, le document constitue "une sorte de guide de la création de la société offshore à partir des filiales suisses". D'après le Huffpost, le document présente la marche à suivre pour répondre à un investisseur voulant détenir une société tout en restant anonyme.

"Il lui est conseillé, accrochez-vous, de créer une société offshore dans les îles Vierges britanniques (BVI), qui investirait ensuite dans une compagnie maltaise, elle-même à la tête de 30% d'une holding de droit néerlandais, qui investirait à son tour dans un autre holding chypriote", énumère le Huffington Post. A la fin, la holding chypriote détiendrait l'ensemble de la société de l’investisseur d’origine…

D’après Le Monde, qui a pu consulter les fichiers recueillis et analysés par l’ICIJ, la BNP Paribas a encadré 56 montages de sociétés offshore à partir de ses filiales asiatiques (Singapour, Hongkong, Taïwan) à Jersey, aux îles Vierges britanniques. Quant au Credit Agricole, sa filiale suisse a facilité jusqu’à la fin des années 2000 la création de 36 sociétés offshore via ses implantations à Hongkong et Singapour."
 
Les banques se défendent

En réponse à l'information du Monde, la BNP Paribas a précisé au Nouvel Observateur qu'elle "exerce son activité dans le strict respect des lois et règlements en vigueur en France, en Europe et dans le monde." Elle précise que "les documents et exemples sur la base desquels Le Monde a établi son enquête sont anciens.

Pour s'adapter à des "attentes de la société [qui] ont évolué ces dernières années", la banque assure qu'elle a "revu et durci ses procédures, et s'impose aujourd'hui des obligations qui vont bien au delà des exigences légales, par exemple en refusant d'ouvrir des comptes a des structures immatriculées dans certains pays lorsque leur propriétaire est européen."

Pour sa part, le Crédit Agricole a lui aussi assuré respecter "strictement les lois et les réglementations" des pays où il est implanté. "Le Crédit Agricole s'est engagé depuis le deuxième trimestre 2010 dans un retrait systématique et ordonné de l'ensemble des Etats non coopératifs, bien au-delà des exigences des autorités fiscales françaises", a ajouté la banque dans un communiqué. Elle a également fait valoir que "(ses) activités de banque privée dans ce qui est communément appelé les paradis fiscaux sont fermées ou en cours d'extinction"."

AFP
 
"France: l’enquête autour de l’affaire Cahuzac s’élargit

Selon le journal Le Monde, les juges chargés d’examiner le cas de l’ex-ministre du Budget vont pouvoir enquêter sur d’autres évadés fiscaux français potentiels. Le parquet de Paris vient de leur accorder un réquisitoire supplétif. Une décision prise à la suite de l'audition d'un ancien cadre d'un établissement financier suisse, Reyl et Cie.

C’est l’audition d’un témoin-clé qui a fait pencher la balance. Selon le quotidien Le Monde, il s’agit de Pierre Condamin-Gerbier, un Français, ancien cadre de Reyl et Cie, un établissement financier suisse qui avait géré notamment les avoirs de Jérôme Cahuzac.

Interrogé le 18 avril, Pierre Condamin-Gerbier aurait affirmé devant les juges du pôle financier parisien Renaud Van Ruymbeke et Roger Le Loire que Reyl et Cie comptait plusieurs autres clients français.

Violation du secret bancaire : un délit pénal en Suisse

Pour l’heure rien ne prouve que les titulaires de ces comptes aient cherché à frauder le fisc français. Les magistrats considèrent néanmoins posséder assez d’éléments pour mener des recherches plus approfondies.

Les noms des clients français ne sont pas encore connus. Pierre Condamin-Gerbier a refusé de les livrer et réclame des garanties judiciaires, conscient que la violation du secret bancaire est un délit pénal en Suisse.

D’après Le Monde il aurait parlé de décideurs français – hommes d’affaires et hommes politiques – dont la fortune était abritée en toute discrétion par Reyl et Cie. Jérôme Cahuzac, lui, déclare qu’il avait environ 600 000 euros sur son compte non déclaré."

RFI
 
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