Poème: le temps de femmes


Le temps de femmes

Sur la table, dans un vase ancien, quatorze roses rouges
Hier, anniversaire, prière, j’ai envie que ma vie bouge
Je me demande comment écrire un poème romanesque sans amour
Sujet consommé, aimer et être aimer, est le problème de toujours
Et l’on se déchire sur les pages, à tout âge, en poursuivant une illusion
Convoitée, une femme rejetée, un homme qui ne sait parler avec effusion
N’attirent guère l’attention, tristes sont les séparations, adieux et aux revoirs
Le bonheur, le chercher, le trouver, le conserver, évidemment c’est un art
Ils sont beaux les refrains des nouvelles chansons à la mode, libanaises
La musique, fantastique, polémique, flash-back période casablancaise
Je voudrais peindre les pétales couleur sang qui s’étale par mes aortes
Mon cœur bat en chœur, les couleurs de ma palette sont de toute sortes
Un bouquet, deux nœuds et une ficelle, cadeau pour moi inestimable
Je le grave dans ma mémoire, ce soir, dans le noir, j’inventerai une fable
Sur les dames du troisième millénaire qui accepteront de prendre la relève
Cela suffit, il faut que les guerres s’achèvent, il nous faut une trêve
Une folie, une hérésie, une utopie que les gens renient et me reprochent
Le temps de femmes est enfin arrivé, je le vois, il est là qui s’approche
Ne le savez-vous pas, pourtant, antan, en arabe, je l’ai écrit en versets
Le monde au masculin, trois guerres mondiales et une couche d’ozone percée
Continuer à écouter les politiciens, non, je leur préfère une mère philosophe
Qui me berce de sa tendresse, me soutient de sa force, place une apostrophe
Sur le mur, une peinture amazigh, un soleil que j’imagine, de la gaieté
Chaque saison, les maisons se ressemblent, sans peur, dans les cœurs la fierté
Le harem des hommes, qui construisent, point ne brisent, qui clament fidélité
Piétinée au long des années où ils sont nés et ont gouverné, prend place
Responsabilité partagée équitablement, plus de machisme, plus de chasse
De foyers détruits, d’égoïsme, d’individualisme et surtout d’indifférence
Les armes sont à jamais enterrées, est tolérée, la diversité et la différence
Sur la table, dans un vase ancien, quatorze roses rouges
Mon amie, je te dis merci d’être ici, dans nos vies qui bougent
Le temps de femmes est venu bouleverser les habitudes et je lui fais confiance
Je l’ai tant cherché dans les siècles lointains, les amours éteints, c’est une chance
Tu te rends compte, nous bâtissons pierre à pierre l’existence éternelle
La terre, le malheur, les douleurs, même aigues, sont passagers, celles
Qui réussissent les épreuves du jour à jour patiemment, gagnent l’univers
Pourquoi pas, toi et moi, hors du temps, sur des somptueux divans verts

Hadbaa Elfatemi, Recueil "Temps de femmes", 1ère édition 2007
 
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