Arbitrage Crédit Lyonnais : relaxe pour Bernard Tapie et Stéphane Richard
Bernard Tapie et le PDG d'Orange, Stéphane Richard, ont bénéficié mardi d'une relaxe générale dans l'affaire de l'arbitrage contesté en faveur de l'homme d'affaires dans son contentieux avec le Crédit Lyonnais.
Le tribunal correctionnel de Paris a relaxé mardi Bernard Tapie, le PDG d'Orange Stéphane Richard et quatre autres prévenus, jugés au printemps dans l'affaire de l'arbitrage controversé qui avait octroyé 403 millions d'euros à l'homme d'affaires en 2008.
L'un des avocats de M. Tapie, Hervé Temime, a immédiatement salué "un jugement d'une netteté exceptionnelle", rendu "avec une indépendance rare", alors qu'une peine de cinq ans de prison ferme avait été requise le 1er avril contre l'ancien ministre, jugé pour "escroquerie" et "détournement de fonds publics".
Bernard Tapie "très ému"
Le patron du groupe de médias La Provence, 76 ans, absent au délibéré en raison d'une récidive de son double cancer, est "très très ému", selon Me Temime. "Mon cancer vient d'en prendre un sale coup dans la gueule", s'est réjoui mardi Bernard Tapie dans La Provence, à l'annonce de la relaxe générale prononcée à Paris dans l'affaire de l'arbitrage controversé qui lui avait octroyé 403 millions d'euros en 2008. "C'est bien la preuve qu'il faut toujours, toujours, se battre jusqu'au bout", a ajouté l'homme d'affaires, cité par le quotidien dont il est l'actionnaire majoritaire.
Pour le tribunal, "aucun élément du dossier ne permet d'affirmer" que la sentence d'arbitrage, définitivement annulée au civil, "ait été surprise par la fraude ou par des manoeuvres frauduleuses qui auraient été commises par M. Tapie". "Les éléments constitutifs du délit d'escroquerie ne sont pas caractérisés", a déclaré la présidente Christine Mée, qui n'a pas plus retenu l'infraction de "détournement de fonds publics" ou de "complicité" de ce délit.
Les juges ont donc prononcé la relaxe de l'ancien ministre Bernard Tapie, qui a toujours nié avoir "volé le contribuable". Ils ont également relaxé l'actuel PDG d'Orange Stéphane Richard, qui était poursuivi pour "complicité" en tant qu'ancien directeur de cabinet de l'ex-ministre de l'Economie Christine Lagarde. "C'est un immense soulagement de voir mon innocence totalement reconnue par ce tribunal", a réagi M. Richard, qui aurait vu son avenir à la tête d'Orange compromis en cas de condamnation.
Pour le parquet, qui n'a pas encore annoncé s'il allait faire appel ou pas, Bernard Tapie avait "truqué" l'arbitrage qui lui a accordé en juillet 2008 la somme inédite de 45 millions d'euros au seul titre du préjudice moral, en réparation d'une "faute" du Crédit Lyonnais lors de la revente de l'équipementier sportif Adidas. Cette sentence rendue par un tribunal arbitral privé a été définitivement annulée en 2015 au civil pour "fraude" et Bernard Tapie -en faillite personnelle depuis décembre 1994- a été condamné à restituer les millions perçus, dont le montant et les délais de remboursement sont encore débattus.
Mme Lagarde, la future présidente de la Banque centrale européenne (BCE), avait été condamnée fin 2016 pour "négligence" pour ne pas avoir exercé de recours contre cet arbitrage quand elle était à Bercy. La Cour de justice de la République l'avait toutefois dispensée de peine. Le tribunal correctionnel ne doit pas être "la chambre d'enregistrement" de ces décisions, avait plaidé Me Hervé Temime, brocardant un dossier "vide de preuves".
"Fraude civile définitive"
Pour l'accusation, Bernard Tapie était le "co-organisateur" d'une "escroquerie" commise au préjudice de l'Etat, en activant d'abord ses soutiens à l'Elysée pour que le pouvoir sarkozyste choisisse la voie arbitrale au lieu de la justice ordinaire.
Des peines de trois ans de prison dont 18 mois ferme, 100.000 euros d'amende et une interdiction de la fonction publique pendant cinq ans avaient été demandées contre Stéphane Richard et Jean-François Rocchi, ex-dirigeant du Consortium de réalisation (CDR), chargé de gérer le passif du Crédit Lyonnais. L'accusation reprochait à M. Richard d'avoir favorisé les intérêts de la partie Tapie dans l'arbitrage, ce qui n'est "pas rapporté" selon le tribunal.
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Parties civiles, l'Etat et le CDR ont été déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts. L'avocat du CDR, Benoît Chabert, a rappelé que "la fraude civile est définitive" et que "Bernard Tapie sur le plan civil doit payer" les sommes perçues.
Pour le tribunal, "aucun élément du dossier ne permet d'affirmer" que cette sentence "ait été surprise par la fraude".
decouverte.challenges.fr
mam