3fak
, je me permet de remettre l'article ici car parfois au bout d'un temps les liens ne fonctionne plus.
Oum Al-Saghir, une oasis du temps passé
Au village isolé d'Oum Al-Saghir, à l’ouest de l’Egypte, les habitants souffrent de l'absence totale de moyens modernes de subsistance. Visite de cette oasis, au rythme d'une époque très ancienne.
« Et voilà ! Plus de réseau, les portables ne fonctionnent plus. Maintenant, on est isolé. On ne peut plus contacter personne », dit-on dans le 4x4. A 25 km de la destination, à un café très modeste à Bir Al-Noss, les réseaux de téléphone portable ne fonctionnent plus. Tout le monde a compris qu’il ne reste que quelques kilomètres à parcourir avant d’arriver à l’oasis Al-Gara ou Oum Al-Saghir (nom de la tribu qui y réside), située à l’ouest de l’Egypte, à environ 350 km au sud de Marsa Matrouh et à plus de 870 km du Caire.
Un sentiment d’angoisse apparaît avec cette impression que personne ne sera là en cas de besoin ou de danger. Un isolement total durant quelques heures, le temps de parcourir le village de long en large. Comment ces 567 personnes qui habitent à Oum Al-Saghir mènent-elles cette vie en retrait du reste du monde ?
Voulant régler le problème de communication en 2008, le gouvernorat de Matrouh a fourni une seule ligne de téléphone avec un seul numéro : le 06 7520 0050, installé à l’intérieur d’un centre culturel très modeste. Tous ceux qui veulent passer un coup de fil s’y rendaient pour 75 piastres la minute que ce soit pour le fixe ou le cellulaire. Et ce n’est pas le seul problème : une femme ne peut sortir seule de chez elle. La tribu Al-Gara est très conservatrice. Il est rare de voir des femmes marcher dans les rues et, si par hasard on en croise une, on n’a pas le droit de l’aborder. Et elle ne doit parler à personne, encore moins à un étranger.
La femme d’Al-Gara doit être accompagnée dans tous ses déplacements par un homme, même s’il est plus jeune qu’elle. Durant notre visite à cette oasis qui a duré quelques heures, une seule femme a été perçue dans la rue, enveloppée de la tête au pied d’une «mélaya », couleur bleu grisâtre et d’un morceau de tissu noir lui cachant tout le visage.
Les villageois de ce petit village d’Egypte d’une superficie de 65 km2 mènent une vie très primitive. Pas d’électricité, pas d’ordinateurs. Ils n’ont jamais entendu parler de réseaux sociaux : Facebook ou Twitter. La plupart d’entre eux, surtout les plus âgés ou ceux qui ont dépassé la quarantaine, méconnaissent tout ce qui se passe hors de leur petit monde. Privés de technologies modernes, ils n’ont pu suivre les nouvelles des deux révolutions : 25 janvier 2011 et la destitution de Moubarak ; 30 juin 2013 et la chute de Morsi. Et aucun habitant n’a participé aux élections.
Am Chéhata, producteur d’olives et de dattes, principale culture dans cette oasis, a entendu parler des manifestations et des sit-in. A chaque fois qu’il visite ses beaux-parents à Siwa, il en profite pour regarder la télé. « Je ne veux pas être au courant.
Je veux vivre en paix avec ma petite famille au village, sans stress ni peur. On a besoin d’une certaine stabilité », précise-t-il.
Les villageois sont satisfaits de la vie qu’ils mènent dans ce village. C’est l’endroit où ils sont nés et où ils ont passé la plus grande partie de leur vie. Pour eux, Al-Gara est leur paradis.
En vérité, tout le long de la route Matrouh/Al-Gara, depuis Bir Al-Noss en passant par le village Abou-Chrouf, il existe 6 points de contrôle militaire qui vérifient minutieusement les camions et les véhicules particuliers.
L’oasis Al-Gara est un village isolé. Avant de s’y rendre, il faut obtenir une permission du Service des renseignements généraux. Pour cela, il faut présenter sa carte d’identité, son permis de conduire et les documents du véhicule aux forces de l’ordre de Siwa. Cela prend 2 jours pour obtenir cette autorisation. « Il faut avoir cette autorisation car c’est une région située dans le désert Occidental de l’Egypte, dans le gouvernorat de Marsa Matrouh et à la frontière avec la Libye. Au cours de la révolution du 25 janvier et les 3 années qui ont suivi cette révolution, les forces de l’ordre ont confisqué de grandes quantités d’armes acheminées à travers les frontières égypto-libyennes et dont fait partie l’oasis Al-Gara », affirme Mohamad Bakr, président de l’unité locale du village.
Un symbole de l’unité africaine
L’oasis Al-Gara est un symbole exemplaire de l’unité africaine. Elle est nichée dans une dépression au milieu du désert, à environ 18 m au-dessous du niveau de la mer.
Une
beauté naturelle rare, une propreté incomparable, la douceur du climat sain et sec a fait de l’oasis Al-Gara un site digne d’être protégé. Le village n’est qu’une immense tache verte entourée de dunes de sable. Des milliers de palmiers et d’oliviers cachent les maisons construites en torchis. Al-Gara n’est que nuances et contrastes. Dans les cours et sur les toits des maisons aux portes colorées, les dattes mises à sécher déploient leur palette. Beige et brun, violet et jaune, rouge et presque noir, juxtaposés en pointillés, elles sont exposées au soleil pour sécher. Plus loin, il y a encore du vert, des bidons d’huile d’olives empilés devant leurs petites maisons ainsi que des cageots de bois débordant d’oranges.
En quittant la Côte-Nord de l’Egypte et en s’enfonçant dans la route goudronnée dans le désert aride, on n’imagine pas découvrir cette beauté. Puis l’on se retrouve subitement devant une étonnante forteresse qui surplombe une colline. Autour, des maisons faites de « karshif », un mélange de terre et de sel. Le matin, on ouvre les yeux sur une immense palmeraie. Une verdure qui cache le désert. On pourrait se croire dans les régions berbères du sud du Maroc ou de l’Algérie.
Les premiers habitants du village d’Oum Al-Saghir sont venus de l’ouest de l’Afrique du Nord il y a 12 000 ans. Ils appartenaient à la tribu Oum Al-Saghir. Ils sont originaires d’Algérie, du Maroc, de Libye et de Mauritanie. Cette tribu a fui ces pays en raison de la sécheresse, des maladies, de la guerre et des catastrophes. Depuis les temps reculés, les berbères entretenaient des relations amicales et de mariage avec les Egyptiens. Leur premier chantier fut à l’époque la construction de la forteresse de Shali Ghadi, au centre de l’oasis, pour se protéger des attaques des nomades. «Mais avec le temps, le nombre d’habitants a commencé à augmenter. En 1975, les habitants ont dû descendre de la montagne Shali Ghadi pour construire leur propre village, autour de la montagne », se souvient le vieux cheikh Aboul-Qassem, âgé de 90 ans. Portant son costume traditionnel, une djellaba et un turban blanc, le cheikh Aboul-Qassem n’arrive pas à s’exprimer en arabe.
Comme 90 % des habitants du village, il parle le tamazight, langue berbère, utilisée par la tribu et les habitants qui sont venus de différents pays.