Kaiserin
VIB
Elu à 73% des voix selon les premières estimations, l’ancien humoriste incarne un changement profond, mais son arrivée au pouvoir est assortie de multiples incertitudes.
Cinq ans après avoir mené la révolution dans la rue, les Ukrainiens ont à nouveau renversé la table, dimanche 21 avril, sans violence ni fracas, en portant au pouvoir un néophyte complet, Volodymyr Zelensky. Cet humoriste et producteur à succès dénué de la moindre expérience politique, réalise le hold-up électoral parfait, en récoltant, selon les premiers sondages de sortie des urnes, un score raz-de-marée de 73 % des voix, loin devant le sortant Petro Porochenko.Jamais président ukrainien n’avait obtenu un soutien aussi massif, et ce n’est là que l’un des records engrangés par M. Zelensky, qui devient à 41 ans le plus jeune président qu’ait connu le pays.
« Reality show » politique
Ce que l’histoire retiendra, surtout, c’est que les Ukrainiens ont préféré, en élisant un parfait inconnu, réaliser un saut dans le vide plutôt que de poursuivre leur route avec une classe politique décrédibilisée par des années de prévarication. Inconnu, Volodymyr Zelensky ne l’est pas tout à fait : ce natif d’une famille juive de Kryvyi Rih, dans le centre russophone et industrieux de l’Ukraine, est même le compagnon de nombre de foyers ukrainiens depuis ses premiers pas d’humoriste sur scène et à la télévision, il y a vingt ans. Inconnu, Volodymyr Zelensky l’est surtout par son absence, jusqu’à sa déclaration de candidature fin 2018, du moindre engagement politique.
Il est assez facile de comprendre contre quoi les Ukrainiens ont voté : corruption, guerre, pauvreté, ces maux associés à l’ère Porochenko. Ce pour quoi ils ont voté est moins net, et le flou entretenu par le candidat durant sa campagne, menée quasi exclusivement sur les réseaux sociaux et via des formules chocs mais très générales, n’a pas contribué à lever le voile.
Populisme « sympa »
Le flou qu’il a entretenu sur nombre de dossiers permet aussi à chacun de s’identifier à un élément de son programme en oubliant les autres. Preuve en est, les accusations faisant de lui une marionnette de l’oligarque Ihor Komolomoïski, l’un des plus redoutables joueurs de la scène ukrainienne, lui ont glissé dessus. Zelensky a aussi décomplexé les Ukrainiens en reprenant à son compte leur ras-le-bol de la guerre qui dure depuis cinq ans dans le Donbass… mais sans leur proposer de solution.
Ce populisme est d’un type nouveau : un populisme « sympa », pro-européen, qui ne cherche pas le clivage mais le rassemblement. C’est d’ailleurs dans ce domaine que Volodymyr Zelensky s’est montré le plus précis, en disant sa volonté de cesser l’« ukrainisation » linguistique et culturelle menée par M. Porochenko et à laquelle n’adhère pas une partie de la population, de « réintégrer » les populations du Donbass, par exemple en versant leurs pensions aux retraités des territoires de l’Est sous le contrôle des séparatistes prorusses… « Il est le seul parmi les candidats à ne pas avoir fait campagne sur la peur », résume le politologue Vladimir Fessenko.
Dimanche soir, le président élu a paru endosser, lentement, le costume présidentiel. Dans son quartier général à la décoration gentiment régressive, il a accueilli les résultats en plaisantant avec les journalistes sur sa femme, qui aurait « pu partir il y a longtemps ». Puis il a remercié « ceux qui l’ont soutenu et ceux qui n’ont pas voté pour lui » et promis de ne « pas laisser tomber » les Ukrainiens, avant d’insister sur la portée historique de son élection : « Je ne suis pas encore président, je peux m’adresser comme citoyen à tous les pays de l’ex-URSS et je peux leur dire : tout est possible ! »
Cinq ans après avoir mené la révolution dans la rue, les Ukrainiens ont à nouveau renversé la table, dimanche 21 avril, sans violence ni fracas, en portant au pouvoir un néophyte complet, Volodymyr Zelensky. Cet humoriste et producteur à succès dénué de la moindre expérience politique, réalise le hold-up électoral parfait, en récoltant, selon les premiers sondages de sortie des urnes, un score raz-de-marée de 73 % des voix, loin devant le sortant Petro Porochenko.Jamais président ukrainien n’avait obtenu un soutien aussi massif, et ce n’est là que l’un des records engrangés par M. Zelensky, qui devient à 41 ans le plus jeune président qu’ait connu le pays.
« Reality show » politique
Ce que l’histoire retiendra, surtout, c’est que les Ukrainiens ont préféré, en élisant un parfait inconnu, réaliser un saut dans le vide plutôt que de poursuivre leur route avec une classe politique décrédibilisée par des années de prévarication. Inconnu, Volodymyr Zelensky ne l’est pas tout à fait : ce natif d’une famille juive de Kryvyi Rih, dans le centre russophone et industrieux de l’Ukraine, est même le compagnon de nombre de foyers ukrainiens depuis ses premiers pas d’humoriste sur scène et à la télévision, il y a vingt ans. Inconnu, Volodymyr Zelensky l’est surtout par son absence, jusqu’à sa déclaration de candidature fin 2018, du moindre engagement politique.
Il est assez facile de comprendre contre quoi les Ukrainiens ont voté : corruption, guerre, pauvreté, ces maux associés à l’ère Porochenko. Ce pour quoi ils ont voté est moins net, et le flou entretenu par le candidat durant sa campagne, menée quasi exclusivement sur les réseaux sociaux et via des formules chocs mais très générales, n’a pas contribué à lever le voile.
En écrivant et en incarnant le rôle principal dans la série à succès Serviteur du peuple, dans laquelle un professeur d’histoire, Vasyl Horoborodko, est propulsé président pour nettoyer le pays de la corruption, M. Zelensky a simplement donné à des millions d’Ukrainiens le sentiment que la politique pouvait être autre chose que ceux qu’ils connaissent. « Nous voyons la naissance d’un projet politique réellement unique, écrivait avant le vote le politologue Balazs Jarabik du centre Carnegie. Un reality show dans lequel chacun peut participer. »« Nous voyons la naissance d’un projet politique réellement unique. Un “reality show” dans lequel chacun peut participer »
Populisme « sympa »
Le flou qu’il a entretenu sur nombre de dossiers permet aussi à chacun de s’identifier à un élément de son programme en oubliant les autres. Preuve en est, les accusations faisant de lui une marionnette de l’oligarque Ihor Komolomoïski, l’un des plus redoutables joueurs de la scène ukrainienne, lui ont glissé dessus. Zelensky a aussi décomplexé les Ukrainiens en reprenant à son compte leur ras-le-bol de la guerre qui dure depuis cinq ans dans le Donbass… mais sans leur proposer de solution.
Ce populisme est d’un type nouveau : un populisme « sympa », pro-européen, qui ne cherche pas le clivage mais le rassemblement. C’est d’ailleurs dans ce domaine que Volodymyr Zelensky s’est montré le plus précis, en disant sa volonté de cesser l’« ukrainisation » linguistique et culturelle menée par M. Porochenko et à laquelle n’adhère pas une partie de la population, de « réintégrer » les populations du Donbass, par exemple en versant leurs pensions aux retraités des territoires de l’Est sous le contrôle des séparatistes prorusses… « Il est le seul parmi les candidats à ne pas avoir fait campagne sur la peur », résume le politologue Vladimir Fessenko.
Dimanche soir, le président élu a paru endosser, lentement, le costume présidentiel. Dans son quartier général à la décoration gentiment régressive, il a accueilli les résultats en plaisantant avec les journalistes sur sa femme, qui aurait « pu partir il y a longtemps ». Puis il a remercié « ceux qui l’ont soutenu et ceux qui n’ont pas voté pour lui » et promis de ne « pas laisser tomber » les Ukrainiens, avant d’insister sur la portée historique de son élection : « Je ne suis pas encore président, je peux m’adresser comme citoyen à tous les pays de l’ex-URSS et je peux leur dire : tout est possible ! »