Quand il s'agira demain de recaser les 109 000 ménages habitant les bidonvilles, combien refuseront de payer le crédit contracté sous prétexte que le logement qui leur a été octroyé est un dû.
Cest lhistoire de Abderrahim, un gars que ses voisins peuvent qualifier de sympa, sans histoire. Abderrahim est vendeur ambulant. Il est marié, père de trois enfants. Il y a deux ans, le bidonville au sein duquel il habitait a été rasé et la famille a bénéficié dun logement économique. Abderrahim est content, il a déboursé 20 000 DH à titre davance et habite aujourdhui un appartement, un vrai, avec salle de bains, eau chaude, intimité et même un petit salon-séjour. Il reste le crédit à payer à la banque. Pas trop lourdes les traites mensuelles, mais crédit quand même. Alors, Abderrahim fait comme Saïd, le coordonnier, son voisin de tôle, du temps de la misère : après les premiers mois, il a arrêté de payer. Après tout, ce nest pas sa faute si lEtat a rasé le bidonville, on lui doit bien une compensation. Et puis même si le caïd et le banquier viennent de temps en temps rouspéter, il est rassuré. Il nest pas le seul à être en défaut de paiement et, se dit-il, lEtat nosera pas saisir tous ces logements, lui qui est bien heureux dêtre venu à bout du bidonville. Alors Abderrahim est sympa et il ne fait rien de mal. Il se fond dans la masse, en fait sa carapace, le bouclier de son refus de payer.
Aujourdhui ils sont quelques milliers dAbderrahim, mais combien y en aura-t-il demain ? Combien de défaillants potentiels sur les 109 000 ménages habitant aujourdhui les bidonvilles et quil faudra recaser ? En acceptant de fermer les yeux, au motif déviter les tensions sociales et en communiquant mal sur lopération de relogement, considérée comme une évacuation en échange dun toit, les autorités ont contribué, à leur corps défendant, à créer un sentiment dimpunité et un problème inextricable. Que peut faire une banque quand il sagit de poursuivre en justice 1 000 habitants dun quartier ? Elle va tout simplement faire jouer la garantie de lEtat pour lencours existant, puis arrêter les dégâts, en ne finançant plus ce type dopération. Il faut couper le mal à la racine, agir vite, rééchelonner, saisir sil le faut, donner lexemple, mais surtout se garder dattendre, de voir grossir les rangs de mauvais payeurs. En couplant un mécanisme de financement adossé à une garantie étatique à une opération de lutte contre lhabitat insalubre, lEtat a trouvé un moyen efficace de résoudre une problématique de logement. Il ne faudrait pas que limpunité ambiante grippe le système, faute de quoi cest toute lopération Villes sans bidonvilles qui se fracassera contre les tôles surchauffées dun mécontentement social.
Fadel Agoumi. La Vie éco
www.lavieeco.com
Cest lhistoire de Abderrahim, un gars que ses voisins peuvent qualifier de sympa, sans histoire. Abderrahim est vendeur ambulant. Il est marié, père de trois enfants. Il y a deux ans, le bidonville au sein duquel il habitait a été rasé et la famille a bénéficié dun logement économique. Abderrahim est content, il a déboursé 20 000 DH à titre davance et habite aujourdhui un appartement, un vrai, avec salle de bains, eau chaude, intimité et même un petit salon-séjour. Il reste le crédit à payer à la banque. Pas trop lourdes les traites mensuelles, mais crédit quand même. Alors, Abderrahim fait comme Saïd, le coordonnier, son voisin de tôle, du temps de la misère : après les premiers mois, il a arrêté de payer. Après tout, ce nest pas sa faute si lEtat a rasé le bidonville, on lui doit bien une compensation. Et puis même si le caïd et le banquier viennent de temps en temps rouspéter, il est rassuré. Il nest pas le seul à être en défaut de paiement et, se dit-il, lEtat nosera pas saisir tous ces logements, lui qui est bien heureux dêtre venu à bout du bidonville. Alors Abderrahim est sympa et il ne fait rien de mal. Il se fond dans la masse, en fait sa carapace, le bouclier de son refus de payer.
Aujourdhui ils sont quelques milliers dAbderrahim, mais combien y en aura-t-il demain ? Combien de défaillants potentiels sur les 109 000 ménages habitant aujourdhui les bidonvilles et quil faudra recaser ? En acceptant de fermer les yeux, au motif déviter les tensions sociales et en communiquant mal sur lopération de relogement, considérée comme une évacuation en échange dun toit, les autorités ont contribué, à leur corps défendant, à créer un sentiment dimpunité et un problème inextricable. Que peut faire une banque quand il sagit de poursuivre en justice 1 000 habitants dun quartier ? Elle va tout simplement faire jouer la garantie de lEtat pour lencours existant, puis arrêter les dégâts, en ne finançant plus ce type dopération. Il faut couper le mal à la racine, agir vite, rééchelonner, saisir sil le faut, donner lexemple, mais surtout se garder dattendre, de voir grossir les rangs de mauvais payeurs. En couplant un mécanisme de financement adossé à une garantie étatique à une opération de lutte contre lhabitat insalubre, lEtat a trouvé un moyen efficace de résoudre une problématique de logement. Il ne faudrait pas que limpunité ambiante grippe le système, faute de quoi cest toute lopération Villes sans bidonvilles qui se fracassera contre les tôles surchauffées dun mécontentement social.
Fadel Agoumi. La Vie éco
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