Accès bloqué à YouTube en Chine
Le "problème" a été annoncé par Google mardi : depuis le début de la semaine, l'accès à son site de partage de vidéos YouTube est bloqué en Chine. Motif de ce blocage : inconnu. Impossible donc pour l'heure de savoir s'il s'agit d'une question d'ordre technique, ou d'une décision des autorités chinoises. Un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a d'ailleurs assuré ne pas avoir d'information sur un blocage de YouTube en Chine. Et du côté de Google, on affirme "travailler aussi vite que possible pour rétablir l'accès de nos usagers en Chine".
Difficile d'ignorer toutefois que ce problème intervient alors que des prises de vue montrant des troupes chinoises apparemment en train de battre des manifestants tibétains lors des émeutes de l'an dernier à Lhassa et dans ses environs ont fait leur apparition sur YouTube ces derniers jours. L'origine de ces vidéos mises en ligne par un groupe de Tibétains en exil, ainsi que la date et le lieu de leur enregistrement n'ont pas été confirmés de source indépendante. La vidéo montre des centaines de soldats chinois en uniformes courant dans un monastère tibétain, certains battant un homme avec des bâtons. Une autre scène montre des soldats en uniformes frappant à coups de pieds et battant plusieurs hommes et femmes au sol, certains avec les mains liées derrière le dos. Le commentaire de la vidéo affirme qu'il s'agit de scènes de violence filmées lors de la répression des émeutes dans la capitale tibétaine le 14 mars 2008.
Des vidéos qui ont fait réagir Pékin
Des responsables du gouvernement de Pékin ont réagi et ont notamment mis en cause publiquement l'authenticité de la vidéo qui montrerait la police battant à mort un manifestant tibétain. L'Agence Xinhua (Chine Nouvelle) a cité une source gouvernementale non identifiée indiquant que des partisans du dalaï-lama "fabriquaient des mensonges" en falsifiant une vidéo pour "tromper la communauté internationale". Il y a un an déjà, l'accès à YouTube avait été bloqué après la diffusion d'une vidéo sur des manifestations sanglantes à Lhassa, la capitale du Tibet. Et les autorités chinoises ont déployé depuis le début du mois de mars d'importants moyens sécuritaires de peur que l'anniversaire de ces manifestations, ainsi que celui du soulèvement manqué contre Pékin qui avait conduit au départ en exil du dalaï-lama en 1959, ne provoquent de nouvelles émeutes.
Reporters sans frontières a dénoncé pour sa part le blocage de YouTube, le qualifiant "d'acte rétrograde de censure". L'organisation de défense de la liberté de la presse explique dans un communiqué que "l'illusion d'ouverture donnée en août dernier pendant les JO de Pékin, lorsque quelques sites avaient été débloqués sous la pression des journalistes étrangers, s'est dissipée depuis longtemps". Le blocage de YouTube ne doit pas faire "oublier que des milliers de sites internet chinois et étrangers sont régulièrement bloqués par un pays qui a mis en place un système très sophistiqué de contrôle et de surveillance du Net et qui est la plus grande prison du monde pour les cyberdissidents", ajoute Reporters Sans Frontière, qui a dénombré 49 cyberdissidents incarcérés en Chine.
Marc van der Chijs, un homme d'affaires néerlandais cofondateur d'un site de partage de vidéos basé à Shanghaï, Tudou.com, a toutefois avancé une autre hypothèse pour expliquer le blocage de YouTube. "Je soupçonne que la véritable raison est que YouTube vient juste de lancer une version chinoise, qui rendrait le site beaucoup plus facile d'accès pour les utilisateurs chinois", a-t-il écrit dans un message posté mardi sur son site, laissant entendre que cela avait pu irriter Pékin. "Ce n'est pas vraiment intelligent de faire cela au milieu de la session parlementaire annuelle (en Chine) et je suis surpris que personne dans les bureaux chinois de la maison mère Google n'ait tiré la sonnette d'alarme avant ce lancement".