Bilan dune semaine au coeur de lIT au Maroc (2/2) : les pesanteurs
Par Reynald Flechaux 28/04/2009
Je suis de retour à Paris après une semaine de reportage sur le développement de lIT au Maroc, un pays qui a fait de cette industrie - notamment de son volet export (avec loffshore pour les donneurs dordre francophones) - un des piliers de sa stratégie de croissance. Je mapprête à publier un certain nombre darticles sur le sujet, mais voici déjà quelques réflexions, à chaud. Premier volet de ce billet en deux parties avec le côté pile, ce qui mest apparu comme des forces du pays pour se positionner sur la carte mondiale de lIT.
- La difficulté à appréhender le marché
Plusieurs Français installés sur place mont fait part dune même difficulté : ce nest pas parce le Maroc affiche une proximité culturelle avec la France quil est facile dy faire des affaires. Comme lexplique par exemple Isabelle Reydet-Rousselet, de CMC2, une société de conseil et de communication installée à Casablanca, il est parfois difficile pour un Français arrivé au Maroc dappréhender le marché local. Il faut rester prudent face aux discours de façade. On peut avoir limpression que le marché est là, sans pour autant que rien ne se signe à la fin, explique-t-elle. Dailleurs, tant Steria, via une co-entreprise avec le groupe marocain FinanceCom, que GFI, via un management bien implanté dans la vie locale, ont demblée cherché à sappuyer sur des relais locaux.
- RH : la grande incertitude
Un institut spécialisé dans les certifications Cisco et Microsoft à Casablanca.
Le Maroc dispose dune grande force : la jeunesse de sa population. Et, selon de nombreux témoignages, souffre dune faiblesse : un système éducatif qui laisse à désirer. Les dirigeants de call center regrettent notamment un système qui privilégie larabe jusquau lycée avant de basculer au français, créant des profils ni tout à fait arabophones, ni tout à fait francophones. Ces entreprises doivent souvent accompagner les salariés quelles recrutent en les formant quelques mois pour les rendre opérationnels. La remarque vaut aussi pour les services informatiques, qui eux aussi mettent en place des modules de formation additionnels. Certes, avec laide de lEtat marocain.
Autre difficulté : la pénurie sur certains profils, notamment sur les ingénieurs en informatique. Selon les officiels marocains - notamment le ministre de lIndustrie et des Nouvelles Technologies -, cette pénurie appartiendrait aujourdhui au passé et serait due à une erreur de prévision : loffshoring dans le pays a surtout décollé grâce à linformatique, alors que le pays pensait que le demande concernerait avant tout lexternalisation de processus métier (BPO).
Pour réparer cette erreur daiguillage, le gouvernement a lancé ForShore 3000, programme visant à requalifier 3 000 personnes via un cycle de formation de 6 à 9 mois. Reste quentretemps, les salaires ont flambé, du fait de larrivée des SSII étrangères, raconte Amine Zniber, directeur du campus de Casablanca de Supinfo. Selon plusieurs témoignages, un technicien débutant touche quelque 400 euros par mois, mais un ingénieur monte à 1 000, voire 1 200 euros. Enfin, le Maroc souffre dun manque de compétences expérimentées, notamment dans la gestion de projet. Manifestement, les appels du pied du gouvernement pour faire rentrer les MRE (Marocains résidant à létranger) ne suffisent pas, même si ces derniers jouent incontestablement un rôle dans la structuration de lindustrie.
- Des formations peu lisibles
La multiplication des formations, des instituts, des écoles (Une école privée à Casablanca). ) imprime inévitablement la rétine de tout occidental se déplaçant des les centres économiques du royaume. Reste une question : que se cache-t-il derrière toutes ces formations ? Comme me le faisait remarquer Amine Zniber, il nexiste pas daccréditation des titres remis par les écoles supérieures, contrairement à ce qui existe au niveau des écoles professionnelles (niveau Bac+2)[. Attention donc aux dérives business que peut laisser sinstaller ce système, même si, selon Amine Zniber, une commission travaillerait sur ce sujet, ce qui devrait déboucher sur des accréditations dès lannée prochaine.
source : LeMagIT
Par Reynald Flechaux 28/04/2009
Je suis de retour à Paris après une semaine de reportage sur le développement de lIT au Maroc, un pays qui a fait de cette industrie - notamment de son volet export (avec loffshore pour les donneurs dordre francophones) - un des piliers de sa stratégie de croissance. Je mapprête à publier un certain nombre darticles sur le sujet, mais voici déjà quelques réflexions, à chaud. Premier volet de ce billet en deux parties avec le côté pile, ce qui mest apparu comme des forces du pays pour se positionner sur la carte mondiale de lIT.
- La difficulté à appréhender le marché
Plusieurs Français installés sur place mont fait part dune même difficulté : ce nest pas parce le Maroc affiche une proximité culturelle avec la France quil est facile dy faire des affaires. Comme lexplique par exemple Isabelle Reydet-Rousselet, de CMC2, une société de conseil et de communication installée à Casablanca, il est parfois difficile pour un Français arrivé au Maroc dappréhender le marché local. Il faut rester prudent face aux discours de façade. On peut avoir limpression que le marché est là, sans pour autant que rien ne se signe à la fin, explique-t-elle. Dailleurs, tant Steria, via une co-entreprise avec le groupe marocain FinanceCom, que GFI, via un management bien implanté dans la vie locale, ont demblée cherché à sappuyer sur des relais locaux.
- RH : la grande incertitude
Un institut spécialisé dans les certifications Cisco et Microsoft à Casablanca.
Le Maroc dispose dune grande force : la jeunesse de sa population. Et, selon de nombreux témoignages, souffre dune faiblesse : un système éducatif qui laisse à désirer. Les dirigeants de call center regrettent notamment un système qui privilégie larabe jusquau lycée avant de basculer au français, créant des profils ni tout à fait arabophones, ni tout à fait francophones. Ces entreprises doivent souvent accompagner les salariés quelles recrutent en les formant quelques mois pour les rendre opérationnels. La remarque vaut aussi pour les services informatiques, qui eux aussi mettent en place des modules de formation additionnels. Certes, avec laide de lEtat marocain.
Autre difficulté : la pénurie sur certains profils, notamment sur les ingénieurs en informatique. Selon les officiels marocains - notamment le ministre de lIndustrie et des Nouvelles Technologies -, cette pénurie appartiendrait aujourdhui au passé et serait due à une erreur de prévision : loffshoring dans le pays a surtout décollé grâce à linformatique, alors que le pays pensait que le demande concernerait avant tout lexternalisation de processus métier (BPO).
Pour réparer cette erreur daiguillage, le gouvernement a lancé ForShore 3000, programme visant à requalifier 3 000 personnes via un cycle de formation de 6 à 9 mois. Reste quentretemps, les salaires ont flambé, du fait de larrivée des SSII étrangères, raconte Amine Zniber, directeur du campus de Casablanca de Supinfo. Selon plusieurs témoignages, un technicien débutant touche quelque 400 euros par mois, mais un ingénieur monte à 1 000, voire 1 200 euros. Enfin, le Maroc souffre dun manque de compétences expérimentées, notamment dans la gestion de projet. Manifestement, les appels du pied du gouvernement pour faire rentrer les MRE (Marocains résidant à létranger) ne suffisent pas, même si ces derniers jouent incontestablement un rôle dans la structuration de lindustrie.
- Des formations peu lisibles
La multiplication des formations, des instituts, des écoles (Une école privée à Casablanca). ) imprime inévitablement la rétine de tout occidental se déplaçant des les centres économiques du royaume. Reste une question : que se cache-t-il derrière toutes ces formations ? Comme me le faisait remarquer Amine Zniber, il nexiste pas daccréditation des titres remis par les écoles supérieures, contrairement à ce qui existe au niveau des écoles professionnelles (niveau Bac+2)[. Attention donc aux dérives business que peut laisser sinstaller ce système, même si, selon Amine Zniber, une commission travaillerait sur ce sujet, ce qui devrait déboucher sur des accréditations dès lannée prochaine.
source : LeMagIT