Selon la Tradition islamique (Bukhârî, Sahîh 64.48.7), il y avait 360 statuettes représentant autant de divinités au moment où il reconquit La Mecque en 630.
Ba'l ("seigneur, maître du lieu") était le nom générique donné par Sémites de l'Ouest (= "Baal" dans la Tora) aux divinités locales, surtout dans les milieux agraires. Cité dans Coran 37.125 à propos d'Elie.
Les divinités mentionnées dans le Coran sont :
en Coran 71.23: Wadd, Suwâ', Yagûth, Ya'ûq, Nasr,
en Coran 53.19-20: Manât, al-Lât, 'Uzzä
Wadd avait son sanctuaire à Dumat al-Djandal. C'est la forme arabe d'Adad, dont le nom est attesté en Mésopotamie, dès l'époque pré-sargonique (- 2450). Cette divinité était représentée ainsi selon Ibn al-Kalbî: "c'était une statue d'homme dont la taille était des plus grandes; on y avait sculpté deux vêtements, l'un enveloppant la statue, l'autre suspendue aux épaules. Il était ceint d'une épée et portait un arc sur l'épaule; il tenait entre les mains une courte lance, surmontée d'un étendard, et un carquois contenant des flèches"
Suwâ' était la divinité des Hudhaylites. Le nom vient de la racine arabe sw', qui signifie "être lâché et paître librement". C'était donc particulièrement la divinité protectrice des animaux égarés.
[/b]Yaghûth[/b] était la divinité des Madhhidj. Le nom est l'inaccompli du verbe ghâtha ("donner la pluie, venir au secours"). L'ancienneté de ce nom est attestée dans la Genèse, où il désigne l'un des fils d'Esaü, ancêtre des Edomites. Gen 36.5,14,18, I Chr 1.35, sous la forme de Ye'ûsh. Yagûth était représenté sous la forme d'un lion.
Ya'ûq est l'inaccompli de la racine 'wq ("retenir"). C'était la divinité qui retenait ou rassemblait l'eau de pluie, pour la distribuer ensuite où elle voulait. Représentée peut-être sous la forme d'un cheval
Nasr était la divinité des Himyarites. Peut-être représentée sous la forme d'un vautour.
Les divinités de La Mecque
Elles sont citées en Coran 53.19-20. Ce sont toutes des déesses, à part Allâh.
Manât (ou al-Manât): était à l'origine la divinité des 'Aws et des Khazridj, puis elle est devenue pan-arabe.
Une autre forme de ce nom est conservé en Esaïe 65.11: Menî.
Il s'agit de la racine sémitique mnw ou mny qui signifie "compter, partager, compter les jours de la vie", d'où l'arabe maniyya ('la mort") et minä ("sperme"). On trouve la même racine avec le lême sens en Daniel 5.25: mené' mené' téqèl u parsîn (phrase araméene signifiant: "compté, compté, pesé, divisé").
C'était la déesse de la Fortune.
'Uzzä (ou al-'Uzzä) était la déesse des Qoréicdh, la tribu de Mohammed. Son temple se trouvait près de La Mecque, près de trois grands acacias sacrés. Il y avait un oracle et une pierre creuse (ghabghab) recueillait le sang des victimes immolées. Un haram, zone sacrée, l'entourait. C'est une racine sémitique que l'on retrouve dans l'hébreu 'oz ("la force"). C'était une déesse de la fécondité.
Al-Lât était peut-être le féminin d'Allâh. C'était une divinité pan-arabe, adorée à La Mecque, Tâ'if, à Pétra, à al-Hîra, à Alep et à Pamyre.
Allâh est la contraction d'al-ilâh ("le dieu"). Dans ilâh, âh est un suffixe. Le terme originel est donc Il qui correspond à l'hébreu El, lequel désigne aussi la divinité. La racine est 'wl ou 'yl qui connote l'idée de primauté en sémitique. Cf. l'arabe awwal ("premier") et l'hébreu ayil (="bélier", celui qui dirige le troupeau"). Comme le français "dieu" (avec une minuscule !), c'était un terme générique qui pouvait s'appliquer à toute divinité invoquée. Les différents dieux n'étaient en général pas invoquées sous leur nom particulier, mais par le terme générique d'Allâh. On disait donc souvent, par exemple, quand on s'adressait à al-'Uzzä: ô Allâh !, et non ô al-'Uzzä, comme en latin on pouvait dire : o deus ("ô dieu !") pour s'adresser à Jupiter.
Au 6ème siècle de notre ère, il y avait déjà en Arabie une situation nettement hénothéiste qui tendait à un monothéisme.
Ainsi les trois déesses al-Uzzä, al-Manât, et al-Lât étaient séjà considérées comme subordonnées à Allâh. Elles étaient considérées comme les filles d'Allâh.
© Ralph Stehly, Professeur d'histoire des religions, Université Marc Bloch, Strasbourg