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Le groupe suédois de prêt-à-porter s'apprête à délocaliser des usines en Éthiopie pour faire face à la hausse rapide des salaires chinois.
Le numéro deux mondial du marché de l'habillement veut étendre son réseau de fournisseurs à l'Éthiopie, pays de la corne de l'Afrique, afin de "garantir sa capacité à livrer les produits dans tous les magasins", selon Camilla Emilsson Falk, la porte-parole du groupe. H&M souhaite selon elle augmenter la productivité des usines existantes, mais aussi rechercher de nouvelles implantations.
De nouvelles zones de production où les coûts sont, bien sûr, moins élevés. Ce sera alors l'Éthiopie plutôt que la Chine, où les salaires du secteur privé ont augmenté de 17,1 % l'année dernière, après une hausse de 18,3 % en 2011. Dans le pays dont la capitale Addis-Abeba abrite le siège de l'Union africaine, les salaires sont de quatre à cinq fois moins élevés.
La Chine est devenue un pays relativement cher pour les entreprises qui veulent produire : depuis 10 ans, le coût salarial unitaire a augmenté de 7 à 10 % par an, il n'est plus que de 30 % inférieur à celui des États-Unis, et est désormais supérieur à celui du Mexique ou de la Turquie. Les autorités chinoises ont également décidé d'augmenter récemment le salaire minimum afin de doper la consommation intérieure du pays. Ces paramètres ont suscité un mouvement de relocalisation de certaines industries, comme le textile ou la chaussure de sport, vers d'autres pays d'Asie et d'Afrique où la main-d'oeuvre est moins chère : "Nous sommes désormais au 2e degré de phase de délocalisation des entreprises européennes, qui, après la Chine, regardent vers l'Afrique ou vers des pays d'Asie où les coûts sont encore très bas", observe Pierre Jacquemot, chercheur à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris).
L'Éthiopie, "très recherchée par les investisseurs"
H&M n'est pas isolé, une entreprise sur cinq était prête à quitter la Chine en 2012 selon les chiffres d'une étude de la chambre de commerce de l'Union européenne à Pékin. Les deux tiers d'entre elles citaient la montée des salaires comme principal motif d'inquiétude. Adidas avait ouvert la voie il y a cinq ans en fermant certains de ses sites chinois pour se concentrer sur l'Inde, le Vietnam ou l'Indonésie. Le groupe suédois avait bien trouvé des usines au Vietnam et au Bangladesh, mais il a été violemment mis en cause au printemps après l'effondrement d'un immeuble à Savar, au Bangladesh, qui a tué plus de 1 200 personnes. "Les multinationales ne peuvent plus prendre de risque après ce drame", souligne Pierre Jacquemot. "On peut donc imaginer que le groupe H&M sera vigilant sur les conditions de travail des ouvriers en Éthiopie et l'impact des usines sur l'environnement ".
En Éthiopie, H&M ne sera de toute façon pas le premier. D'autres entreprises comme l'enseigne britannique Tesco, et le chinois Huajian, le fournisseur de Guess et Tommy Hilfiger ont déjà parié sur le pays. "Les Chinois ont construit en Éthiopie des zones d'implantation pour multinationales qui font du pays une destination très recherchée par les investisseurs", précise le chercheur. L'usine de Huajian est ainsi installée à Dukem, à 30 km au sud d'Addis-Abeba, dans une zone industrielle en plein développement, qui bénéficie comme toutes les entreprises sur cette zone de quatre ans d'exonérations fiscales et d'électricité gratuite, dans le cadre d'un "plan de croissance" mis en place par les autorités éthiopiennes.
En dépit d'une croissance parmi les plus dynamiques du continent, 10 %, l'Éthiopie reste un pays pauvre qui souffre d'une économie essentiellement axée sur l'agriculture, sans accès direct à la mer, et un an après la mort du Premier ministre Meles Zenawi, l'exécutif est toujours vivement critiqué par les défenseurs des droits de l'homme. Le groupe suédois affirme de son côté avoir "fait une analyse des risques pour l'Éthiopie, en [se] penchant sur la question des droits de l'homme". Soit. S'il est question de produire, il n'est en revanche pas question de vendre en Éthiopie pour le moment : déjà présent au Maroc et en Égypte, H&M ne compte pas s'installer ailleurs dans un futur proche.
Par Pauline Jacot pour Le Point
Le numéro deux mondial du marché de l'habillement veut étendre son réseau de fournisseurs à l'Éthiopie, pays de la corne de l'Afrique, afin de "garantir sa capacité à livrer les produits dans tous les magasins", selon Camilla Emilsson Falk, la porte-parole du groupe. H&M souhaite selon elle augmenter la productivité des usines existantes, mais aussi rechercher de nouvelles implantations.
De nouvelles zones de production où les coûts sont, bien sûr, moins élevés. Ce sera alors l'Éthiopie plutôt que la Chine, où les salaires du secteur privé ont augmenté de 17,1 % l'année dernière, après une hausse de 18,3 % en 2011. Dans le pays dont la capitale Addis-Abeba abrite le siège de l'Union africaine, les salaires sont de quatre à cinq fois moins élevés.
La Chine est devenue un pays relativement cher pour les entreprises qui veulent produire : depuis 10 ans, le coût salarial unitaire a augmenté de 7 à 10 % par an, il n'est plus que de 30 % inférieur à celui des États-Unis, et est désormais supérieur à celui du Mexique ou de la Turquie. Les autorités chinoises ont également décidé d'augmenter récemment le salaire minimum afin de doper la consommation intérieure du pays. Ces paramètres ont suscité un mouvement de relocalisation de certaines industries, comme le textile ou la chaussure de sport, vers d'autres pays d'Asie et d'Afrique où la main-d'oeuvre est moins chère : "Nous sommes désormais au 2e degré de phase de délocalisation des entreprises européennes, qui, après la Chine, regardent vers l'Afrique ou vers des pays d'Asie où les coûts sont encore très bas", observe Pierre Jacquemot, chercheur à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris).
L'Éthiopie, "très recherchée par les investisseurs"
H&M n'est pas isolé, une entreprise sur cinq était prête à quitter la Chine en 2012 selon les chiffres d'une étude de la chambre de commerce de l'Union européenne à Pékin. Les deux tiers d'entre elles citaient la montée des salaires comme principal motif d'inquiétude. Adidas avait ouvert la voie il y a cinq ans en fermant certains de ses sites chinois pour se concentrer sur l'Inde, le Vietnam ou l'Indonésie. Le groupe suédois avait bien trouvé des usines au Vietnam et au Bangladesh, mais il a été violemment mis en cause au printemps après l'effondrement d'un immeuble à Savar, au Bangladesh, qui a tué plus de 1 200 personnes. "Les multinationales ne peuvent plus prendre de risque après ce drame", souligne Pierre Jacquemot. "On peut donc imaginer que le groupe H&M sera vigilant sur les conditions de travail des ouvriers en Éthiopie et l'impact des usines sur l'environnement ".
En Éthiopie, H&M ne sera de toute façon pas le premier. D'autres entreprises comme l'enseigne britannique Tesco, et le chinois Huajian, le fournisseur de Guess et Tommy Hilfiger ont déjà parié sur le pays. "Les Chinois ont construit en Éthiopie des zones d'implantation pour multinationales qui font du pays une destination très recherchée par les investisseurs", précise le chercheur. L'usine de Huajian est ainsi installée à Dukem, à 30 km au sud d'Addis-Abeba, dans une zone industrielle en plein développement, qui bénéficie comme toutes les entreprises sur cette zone de quatre ans d'exonérations fiscales et d'électricité gratuite, dans le cadre d'un "plan de croissance" mis en place par les autorités éthiopiennes.
En dépit d'une croissance parmi les plus dynamiques du continent, 10 %, l'Éthiopie reste un pays pauvre qui souffre d'une économie essentiellement axée sur l'agriculture, sans accès direct à la mer, et un an après la mort du Premier ministre Meles Zenawi, l'exécutif est toujours vivement critiqué par les défenseurs des droits de l'homme. Le groupe suédois affirme de son côté avoir "fait une analyse des risques pour l'Éthiopie, en [se] penchant sur la question des droits de l'homme". Soit. S'il est question de produire, il n'est en revanche pas question de vendre en Éthiopie pour le moment : déjà présent au Maroc et en Égypte, H&M ne compte pas s'installer ailleurs dans un futur proche.
Par Pauline Jacot pour Le Point