source:
http://bruxelles.blogs.liberation.f...és-financiers-américains-attaquent-leuro.html
Preuve que lon est dans lirrationnel le plus total : lécart de taux dintérêt (« spread »)entre la Grèce et lAllemagne, la signature la plus sûre de lUnion, sur les emprunts à deux ans, a atteint 550 points de base, et 370 sur les emprunts à dix ans, du jamais vu ! Les marchés exigent désormais dAthènes des taux dintérêt deux fois supérieurs à la moyenne des pays émergents
De même, le taux des CDS sur la Grèce senvolent. De quoi sagit-il ? Il faut savoir que le marché Goldman-sachs des « credit default swap », cest-à-dire lassurance quun prêteur contracte pour se prémunir contre un défaut dun État à qui il a prêté de largent, sest autonomisé : on peut acheter et vendre des CDS sans acheter le titre demprunt qui va avec, et en fonction de la demande et de loffre, le taux dintérêt appliqué au CDS varie à la hausse ou à la baisse. Ce taux permet de savoir si le marché pense quun État va faire défaut. Or, vendredi, le CDS grec était à 428 points de bases, un niveau là aussi sans précédent, alors que celui du Liban nétait quà 255, celui de lÉgypte, à 263 ou celui du Maroc à 113, des économies dont la solidité nest plus à démonter... Plus inquiétant, le spread sur les emprunts et les CDS portugais et espagnol suivent aussi une pente ascendante.
Que se passe-t-il réellement ? Selon des informations fiables que jai obtenu vendredi, émanant à la fois dautorités de marché et de banques, une grande banque dinvestissement américaine (qui a bénéficié du plan de sauvetage des banques US) et deux très importants hedge funds seraient derrière les attaques contre la Grèce, le Portugal et lEspagne. Leur but ? Gagner un maximum dargent en créant une panique qui leur permet dexiger de la Grèce des taux dintérêt de plus en plus élevés tout en spéculant sur le marché des CDS, un marché non régulé et totalement opaque, afin là aussi de les vendre plus cher quils ne les ont achetés. Pourquoi ne pas citer les noms ? Tout simplement parce quil sagit dun faisceau de présomptions quun tribunal risque de juger insuffisant en cas de procès. Et comme le dit un opérateur de marché : « on ne joue pas avec ces gens là ».
Daprès mes informations, les deux hedge funds qui tiennent lessentiel du marché grec des CDS ont été furieux de navoir reçu que 2 % du dernier emprunt grec (lancé le 25 janvier, pour une durée de 5 ans, il a recueilli 25 milliards deuros de demande, pour 8 milliards finalement levés). Comme ils ont acquis beaucoup de CDS, il leur fallait, pour garantir leurs gains (en cas de chute des taux desdits CDS), mettre en face du papier, cest-à-dire des emprunts dÉtat (ce quon perd sur un CDS, on le gagne ainsi sur lemprunt et réciproquement). Car ils ont un gros problème : pour linstant, ils ne peuvent pas vendre ces CDS sinon ils feraient eux-mêmes baisser les cours. Pour montrer leur force de frappe, et faire grimper encore les CDS, ils attaquent donc la Grèce en créant de la panique: « les CDS, cest un puits sans fond : avec 200 millions de dollars, vous jouez comme si vous aviez un milliard de dollars », explique un analyste de marché. Même jeu pour la banque dinvestissement américaine qui espère, à terme, pouvoir prêter directement de largent à une Grèce devenue incapable demprunter sur les marchés. Une fois le pays à genoux, elle ira voir le gouvernement pour lui proposer un prêt à un taux évidemment prohibitif
Afin daccroître la panique, ces hedges funds et la banque dinvestissement américaine se sont mis à vendre à tour de bras de leuro, suivis par des investisseurs tétanisés. Si leuro baisse, nest-ce pas parce que la zone euro va éclater ? Ce qui justifie que lon exige des taux dintérêt toujours plus hauts de la Grèce, du Portugal et de lEspagne
Hier, la monnaie unique a presque atteint 1,36 dollar : en moins de quinze jours, il a perdu dix cents, quinze cents depuis deux mois. Une glissade qui ne correspond à rien, mais qui, effet collatéral, donne de lair à léconomie européenne : plus leuro baisse, plus les produits made in eurozone deviennent attractifs. « Une très bonne nouvelle dans ce marasme », ironise un analyste.