Voilà un des texte de René Guenon comme je les aime, plein de vérités !
"Il est convenu quon ne peut parler du diable sans provoquer, de la part de tous ceux qui se piquent dêtre plus ou moins « modernes », cest-à-dire limmense majorité de nos contemporains, des sourires dédaigneux ou des haussements dépaules plus ou moins méprisants encore ; et il est des gens qui, tout en ayant certaines convictions religieuses, ne sont pas les derniers à prendre une semblable attitude. Ceux-là, en effet sont bien obligés dadmettre en principe lexistence du démon, mais ils seraient fort embarrassés davoir à constater son action effective ; cela dérangerait par trop le cercle restreint didées toutes faites dans lequel ils ont coutume de se mouvoir. Cest là un exemple de « positivisme pratique » : les conceptions religieuses sont une chose, la « vie ordinaire » en est une autre, et, entre les deux, on a bien soin détablir une cloison aussi étanche ; mais quel moyen de faire autrement, dans une société aussi « éclairée » et aussi « tolérante » que la nôtre, sans se faire traiter à tout le moins d « halluciné » ? Sans doute, une certaine prudence est souvent nécessaire, mais prudence ne veut pas dire négation « à priori » et sans discernement.
En ce qui nous concerne, nous ne voulons pas pousser les choses à lextrême, et ce nest pas à nous quil appartient de poser la question dune action directe et « personnelle » de Satan ; mais peu importe, car, quand nous parlons de « satanisme », ce nest pas ainsi que nous lentendons. Au fond les questions de « personnification », si lon peut sexprimer ainsi, sont parfaitement indifférentes à notre point de vue ; ce que nous voulons dire est tout à fait indépendant de cette interprétation particulière aussi bien que de toute autre, et nous nentendons en exclure aucune, sous la seule condition quelle corresponde à une possibilité.
En tout cas, ce que nous voyons dans tout cela, et plus généralement dans le spiritisme et les autres mouvements analogues, ce sont des influences qui proviennent incontestablement de ce que certains appellent la « sphère de lAntéchrist » ; cette désignation peut encore être prise symboliquement, mais cela ne change rien à la réalité et ne rend pas ces influences moins néfastes. Assurément, ceux qui participent à de tels mouvements, et même ceux qui croient les diriger, peuvent ne rien savoir de ces choses ; cest bien là quest le plus grand danger, car beaucoup dentre eux, très certainement, séloigneraient avec horreur sils pouvaient se rendre compte quils se font les serviteurs des « puissances des ténèbres » ; mais leur aveuglement est souvent irrémédiable, et leur bonne foi même contribue à attirer dautres victimes ; cela nautorise-t-il pas à dire que la suprême habileté du diable, de quelque façon quon le conçoive, cest de faire nier son existence ?"
René Guénon, La question du satanisme. Extrait de LErreur Spirite.
"Il est convenu quon ne peut parler du diable sans provoquer, de la part de tous ceux qui se piquent dêtre plus ou moins « modernes », cest-à-dire limmense majorité de nos contemporains, des sourires dédaigneux ou des haussements dépaules plus ou moins méprisants encore ; et il est des gens qui, tout en ayant certaines convictions religieuses, ne sont pas les derniers à prendre une semblable attitude. Ceux-là, en effet sont bien obligés dadmettre en principe lexistence du démon, mais ils seraient fort embarrassés davoir à constater son action effective ; cela dérangerait par trop le cercle restreint didées toutes faites dans lequel ils ont coutume de se mouvoir. Cest là un exemple de « positivisme pratique » : les conceptions religieuses sont une chose, la « vie ordinaire » en est une autre, et, entre les deux, on a bien soin détablir une cloison aussi étanche ; mais quel moyen de faire autrement, dans une société aussi « éclairée » et aussi « tolérante » que la nôtre, sans se faire traiter à tout le moins d « halluciné » ? Sans doute, une certaine prudence est souvent nécessaire, mais prudence ne veut pas dire négation « à priori » et sans discernement.
En ce qui nous concerne, nous ne voulons pas pousser les choses à lextrême, et ce nest pas à nous quil appartient de poser la question dune action directe et « personnelle » de Satan ; mais peu importe, car, quand nous parlons de « satanisme », ce nest pas ainsi que nous lentendons. Au fond les questions de « personnification », si lon peut sexprimer ainsi, sont parfaitement indifférentes à notre point de vue ; ce que nous voulons dire est tout à fait indépendant de cette interprétation particulière aussi bien que de toute autre, et nous nentendons en exclure aucune, sous la seule condition quelle corresponde à une possibilité.
En tout cas, ce que nous voyons dans tout cela, et plus généralement dans le spiritisme et les autres mouvements analogues, ce sont des influences qui proviennent incontestablement de ce que certains appellent la « sphère de lAntéchrist » ; cette désignation peut encore être prise symboliquement, mais cela ne change rien à la réalité et ne rend pas ces influences moins néfastes. Assurément, ceux qui participent à de tels mouvements, et même ceux qui croient les diriger, peuvent ne rien savoir de ces choses ; cest bien là quest le plus grand danger, car beaucoup dentre eux, très certainement, séloigneraient avec horreur sils pouvaient se rendre compte quils se font les serviteurs des « puissances des ténèbres » ; mais leur aveuglement est souvent irrémédiable, et leur bonne foi même contribue à attirer dautres victimes ; cela nautorise-t-il pas à dire que la suprême habileté du diable, de quelque façon quon le conçoive, cest de faire nier son existence ?"
René Guénon, La question du satanisme. Extrait de LErreur Spirite.