Le gouvernement vient d'interdire, pour trois ans, la pêche au sud du pays. 50 000 emplois sont menacés par cette décision.
Depuis le 6 novembre, les sardines ainsi que les chinchards et les maquereaux sont interdits à la pêche dans les eaux méridionales du Maroc. Et ce durant trois ans. Du côté des autorités, on explique la décision par une mise en conformité avec les recommandations des instituts scientifiques, notamment l'Institut national de recherches halieutiques (INRH), dont les rapports d'analyse déterminent les repos biologiques de pêche des différentes espèces, dont essentiellement le poulpe. "Chaque fois que la ressource est menacée ou que nos chercheurs constatent une surexploitation de poissons, nous n'hésitons pas à arrêter toute activité de pêche dans les zones concernées", précise ce cadre des Pêches maritimes. Mais du côté des professionnels, c'est un tout autre son de cloche. Pour eux, l'interdiction dénote une absence totale de planification de l'exploitation des pêcheries.
Pour Abderrahmane El-Yazidi, secrétaire général du Syndicat national des marins en haute mer, "cette décision montre que le secteur, qui connaît de graves problèmes financiers et structurels, est incapable de surmonter ses difficultés malgré la multitude de plans élaborés pour organiser l'effort de pêche". Les sardiniers mettent en cause l'accord de pêche signé entre le Maroc et la Russie. Conclu en 1992 et renouvelé à quatre reprises, il autorise vingt-huit navires russes à pêcher dans la limite de 200 000 tonnes d'espèces pélagiques, ainsi que l'affrètement d'autres bateaux par les Russes. Autrement dit, ces derniers "louent" des licences de pêche offertes en règle générale à des notables de la région. "Cette organisation a montré ses limites puisqu'elle freine tout effort d'investissement dans le secteur", poursuit Abderrahmane El-Yazidi. Il met en avant les alertes lancées au niveau mondial par des organismes de préservation de la ressource halieutique, qui n'ont cessé de tirer la sonnette d'alarme quant au risque de disparition de certaines espèces de poissons. "Nous avons eu à Marrakech, fin novembre, un grand symposium international sur le thon. Le monde entier s'est mobilisé pour mettre fin à la surexploitation de cette espèce. Est-ce le tour de la sardine ?" se demande-t-il.
Toujours est-il que la décision du ministère de l'Agriculture et de la Pêche constitue une sorte de signal d'alarme quant à l'avenir des activités de pêche au Maroc. Une première "alerte" avait pourtant été donnée dès la fin des années 1990 quand Thami Khyari, en charge du portefeuille des Pêches maritimes, avait pris une décision identique. Mais elle a vite été annulée par son successeur, ouvrant ainsi la voie à une exploitation maximale de cette réserve en sardines. "Les autorités savaient que ce stock était en péril, mais elles n'ont rien fait pour le préserver", explique un spécialiste. C'est que l'enjeu est de taille : l'industrie de transformation de la sardine emploie actuellement quelque 50 000 personnes et affiche un chiffre d'affaires de près de 2 milliards de dirhams [180 millions d'euros] à l'export par an.
Farida Ghazoui
TelQuel
http://www.courrierinternational.com/article.asp?obj_id=92631
Depuis le 6 novembre, les sardines ainsi que les chinchards et les maquereaux sont interdits à la pêche dans les eaux méridionales du Maroc. Et ce durant trois ans. Du côté des autorités, on explique la décision par une mise en conformité avec les recommandations des instituts scientifiques, notamment l'Institut national de recherches halieutiques (INRH), dont les rapports d'analyse déterminent les repos biologiques de pêche des différentes espèces, dont essentiellement le poulpe. "Chaque fois que la ressource est menacée ou que nos chercheurs constatent une surexploitation de poissons, nous n'hésitons pas à arrêter toute activité de pêche dans les zones concernées", précise ce cadre des Pêches maritimes. Mais du côté des professionnels, c'est un tout autre son de cloche. Pour eux, l'interdiction dénote une absence totale de planification de l'exploitation des pêcheries.
Pour Abderrahmane El-Yazidi, secrétaire général du Syndicat national des marins en haute mer, "cette décision montre que le secteur, qui connaît de graves problèmes financiers et structurels, est incapable de surmonter ses difficultés malgré la multitude de plans élaborés pour organiser l'effort de pêche". Les sardiniers mettent en cause l'accord de pêche signé entre le Maroc et la Russie. Conclu en 1992 et renouvelé à quatre reprises, il autorise vingt-huit navires russes à pêcher dans la limite de 200 000 tonnes d'espèces pélagiques, ainsi que l'affrètement d'autres bateaux par les Russes. Autrement dit, ces derniers "louent" des licences de pêche offertes en règle générale à des notables de la région. "Cette organisation a montré ses limites puisqu'elle freine tout effort d'investissement dans le secteur", poursuit Abderrahmane El-Yazidi. Il met en avant les alertes lancées au niveau mondial par des organismes de préservation de la ressource halieutique, qui n'ont cessé de tirer la sonnette d'alarme quant au risque de disparition de certaines espèces de poissons. "Nous avons eu à Marrakech, fin novembre, un grand symposium international sur le thon. Le monde entier s'est mobilisé pour mettre fin à la surexploitation de cette espèce. Est-ce le tour de la sardine ?" se demande-t-il.
Toujours est-il que la décision du ministère de l'Agriculture et de la Pêche constitue une sorte de signal d'alarme quant à l'avenir des activités de pêche au Maroc. Une première "alerte" avait pourtant été donnée dès la fin des années 1990 quand Thami Khyari, en charge du portefeuille des Pêches maritimes, avait pris une décision identique. Mais elle a vite été annulée par son successeur, ouvrant ainsi la voie à une exploitation maximale de cette réserve en sardines. "Les autorités savaient que ce stock était en péril, mais elles n'ont rien fait pour le préserver", explique un spécialiste. C'est que l'enjeu est de taille : l'industrie de transformation de la sardine emploie actuellement quelque 50 000 personnes et affiche un chiffre d'affaires de près de 2 milliards de dirhams [180 millions d'euros] à l'export par an.
Farida Ghazoui
TelQuel
http://www.courrierinternational.com/article.asp?obj_id=92631