En France comme dans la plupart des pays, le train de vie et le salaire du Président fait lobjet dinterminables débats, une partie des citoyens estimant que les avantages matériels de celui qui est à la tête de lEtat le rendent complètement déconnecté de leur vie quotidienne.
Mais sil y a un pays où ce débat na pas lieu dêtre, cest bien lUruguay, rapporte la BBC, qui est allée rencontrer chez lui le seul président au monde qui vit dans une ferme délabrée et reverse la grande majorité de son salaire à des uvres caritatives.
Jose Mujica a refusé la luxueuse résidence habituellement réservée aux présidents uruguayens et a choisi de rester sur la ferme de sa femme, au bout dun chemin de terre près de la capitale Montevideo. Il tire son surnom du fait quil reverse 90% de son salaire mensuel de 9.300 euros à des uvres caritatives en faveur des pauvres ou des petits entrepreneurs. Le salaire quil lui reste correspond à peu près au revenu moyen denviron 600 euros. Et il ne semble manquer de rien:
«Jai vécu comme ça la plupart de ma vie. Je peux vivre avec ce que jai.»
Sa déclaration de patrimoine, une obligation pour les élus uruguayens, sélevait à 1.411 euros en 2010, soit la valeur de sa Coccinelle Volkswagen 1987. Cette année, il y a rajouté les biens de sa femme (du terrain, des tracteurs et une maison), amenant son total à 168.000 euros, une fortune toujours bien inférieure à celle de son vice-président ou de son prédécesseur.
Elu en 2009, Mujica a participé à la guérilla uruguayenne des Tupamaros, un groupe armé dextrême-gauche inspiré de la révolution cubaine. Il a reçu six balles dans le corps et passé 14 années en prison dans des conditions difficiles avant dêtre libéré en 1985, quand lUruguay est devenue une démocratie. Cest en prison quil a développé sa philosophie de vie:
«On mappelle le président le plus pauvre, mais je ne me sens pas pauvre. Les pauvres sont ceux qui travaillent uniquement pour avoir un style de vie dépensier, et qui en veulent toujours plus. Cest une question de liberté. Si vous navez pas beaucoup de possessions, vous navez pas besoin de travailler comme un esclave toute votre vie pour les soutenir, et vous avez plus de temps pour vous-même.»
Le mois dernier, lAFP lui consacrait également un article, rapportant le vaste débat politique quil a lancé sur «la production et la vente de cannabis sous contrôle de l'Etat, afin de lutter contre le trafic et la toxicomanie», à limage de ce que propose Daniel Vaillant en France, ou encore son combat pour le droit à lavortement. Sous son impulsion, le Congrès a récemment passé une loi impopulaire légalisant les avortements jusquà 12 semaines de grossesse.
Photo: Jose Mujica célèbre son élection à la présidence de l'Uruguay le 29 novembre 2009 à Montevideo, REUTERS/Andres Stapff