Paralysés : des progrès à petits pas

Milamber

Soyez bon envers chacun ~
VIB
Mardi 8 avril, la revue Brain a publié les saisissants résultats, chez l’homme, d’une stratégie de stimulation électrique de la moelle épinière. Quatre patients présentant une paralysie complète des membres inférieurs, après un accident survenu deux à quatre ans plus tôt, ont été capables d’exécuter de nouveau des mouvements intentionnels assez précis des jambes. Chaque année en France, 1 000 à 1 500 personnes sont victimes de tels accidents –le plus souvent des adultes jeunes. A la suite d’une lésion plus ou moins complète de la moelle épinière, elles se retrouvent paralysées à des degrés variables.

Chez les quatre hommes suivis dans l’étude de Brain, une équipe américaine (université de Louisville et université de Californie à Los Angeles) a implanté un module de stimulation électrique dans « l’espace épidural » (entre la dure-mère et le canal vertébral) de la région lombo-sacrée. Là, précisément, où aboutissent les fibres des neurones qui contrôlent les muscles des jambes.

« PROCHAINS ESSAIS CHEZ L’HOMME »

La stimulation continue de ces neurones a permis aux quatre patients de bouger de façon volontaire leur hanche, leur cheville, leurs orteils… « Il faut abandonner l’idée qu’aucune récupération n’est possible après une paralysie complète », estime Susan Harkema, qui a conduit ce travail, financé par la Fondation Reeve et les NIH américains. Pour autant, « on ne peut imaginer qu’avec cette seule intervention, ces patients remarcheront un jour dans la rue, tempère le professeur Grégoire Courtine, de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL). Mais c’est un résultat extrêmement prometteur : avec cette seule stimulation électrique, les quatre patients testés ont été capables de transformer une entrée auditive, par exemple la demande d’un médecin de bouger leur cheville, en une réponse motrice spécifique. »

Grégoire Courtine est un spécialiste de « neuro-réhabilitation », une stratégie combinant trois approches : une stimulation chimique et une stimulation électrique de la moelle épinière, associées à un entraînement physique. En 2012, son équipe publiait dans Science une étude qui a fait grand bruit.

Les chercheurs parvenaient à rétablir une marche volontaire chez des rats rendus paraplégiques par une lésion médullaire [de la moelle épinière]. Ils injectaient dans la moelle, sous la lésion, un « cocktail » de molécules activatrices (adrénaline, noradrénaline, dopamine…). Puis ils appliquaient une stimulation électrique sur la
moelle épinière. Les rats paraplégiques ainsi stimulés étaient placés sur un tapis roulant, soutenus par un harnais robotisé. Après deux mois d’entraînement, ils avaient réappris à marcher volontairement – quand la lésion n’était pas complète. « Depuis 2012, nous avons progressé dans l’optimisation des technologies de stimulation électrique et d’entraînement robotique. Nous envisageons de prochains essais chez l’homme, indique Grégoire Courtine. Notre approche ne guérira pas les patients. Mais elle ambitionne d’améliorer leur qualité de vie. »

RÉGÉNÉRATION DES NEURONES

Plusieurs approches complémentaires se consacrent à la régénération des neurones. « Pourquoi, chez l’homme ou la souris, les fibres du système nerveux périphérique parviennent-elles à repousser, tandis que celles du système nerveux central [cerveau et moelle épinière] en sont incapables ? », s’interroge le professeur Bernard Zalc, qui a dirigé le Centre de recherche de l’Institut du cerveau et de la moelle épinière (ICM, UPMC, Inserm, CNRS), à Paris. Une des réponses vient de la « myéline », cette gaine qui entoure certaines fibres nerveuses. « Martin Schwab, de l’université de Zurich, a isolé les protéines de la myéline du système nerveux central. Et montré que l’une d’elles, NOGO, inhibe la repousse de l’axone », ce prolongement du neurone qui transporte le message nerveux, souligne Bernard Zalc. Ce qui a conduit à la mise au point d’un anticorps-anti NOGO, inhibant cette inhibition.

« Cette approche s’inscrit dans une voie qui vise à rendre l’environnement neuronal plus favorable à la repousse des axones », note Geneviève Rougon (CNRS-Université Aix-Marseille). Outre la piste de la myéline, est explorée la voie des « astrocytes », des cellules au rôle ambigu.

Tantôt elles semblent entraver la repousse axonale en formant une cicatrice autour de la lésion. Mais selon un travail publié dans Science le 1er novembre 2013, certains astrocytes bénéfiques se différencient à partir de cellules souches présentes dans la moelle épinière lésée. « Si l’on perturbe cette barrière d’astrocytes, il y a moins de récupération fonctionnelle », souligne Grégoire Courtine.

THÉRAPIE GÉNIQUE

Une stratégie de thérapie génique a été publiée le 2 avril dans The Journal of Neurosciences. Une équipe du King’s College, à Londres, a injecté un vecteur viral dans la lésion médullaire de rats adultes. Ce vecteur contenait le gène d’une enzyme : une « chondroïtinase », qui digère des molécules s’accumulant autour de la lésion. Résultats : la repousse axonale a augmenté, favorisant la récupération des pattes arrière des rats traités.

Une autre approche consiste à modifier génétiquement les neurones lésés pour faire repousser leurs axones. « De nombreux laboratoires cherchent à identifier, dans le système nerveux périphérique, les molécules favorisant la croissance et la régénération axonales. Il s’agit ensuite de promouvoir leur fabrication par les neurones lésés du système nerveux central », dit Florence Bareyre, de l’université Ludwig Maximilians à Munich (Allemagne). A cet égard, le rôle bénéfique d’une protéine, PCAF, vient d’être montré (Nature Communications, 1er avril).

Toutes ces approches restent très en amont d’une application chez l’homme. D’autant que plusieurs essais ont été abandonnés. L’intérêt de l’anticorps anti-NOGO a ainsi été évalué chez l’homme. Mais cet essai, promu par le laboratoire Novartis, semble avoir été stoppé – en toute discrétion… De même, des start-up américaines avaient lancé de petits essais pour évaluer des greffes de cellules souches dans la moelle épinière de patients paralysés. Ces essais ont été interrompus. « Une étape d’évaluation chez le primate est indispensable », note Grégoire Courtine.


http://www.lemonde.fr/sciences/arti...des-progres-a-petits-pas_4397091_1650684.html
 

Fitra

Allah, Souria, Houria wa bass
Ca me fait penser aux livres sur la neuroplasticité, je suis nulle en sciences exactes (hélas :D ) mais il y'a eu des expériences incroyables, des gens qui récupèrent des capacités qu'n leur avait dit perdues à jamais ...
 

Milamber

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VIB
Ca me fait penser aux livres sur la neuroplasticité, je suis nulle en sciences exactes (hélas :D ) mais il y'a eu des expériences incroyables, des gens qui récupèrent des capacités qu'n leur avait dit perdues à jamais ...
Les sciences exactes ne peuvent pas tout expliquer, on tâtonne dans bien des sujets encore (si tu voyais les théories par exemple de la création de la vie :D...), il y a tellement d'exemples. La neuroplasticité concerne le cerveau, l'organe le plus incompris par les scientifiques.

PS: il n'est jamais trop tard pour apprendre :cool:
 
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