Un juge antifoulard accusé de discrimination

Amine

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En Espagne, un juge antifoulard accusé de«discrimination»

Le premier jour, le juge Javier Gomez Bermudez n’a rien vu.Du moins n’a-t-il rien dit. C’est au cours de la seconde audience, le 29octobre, que ce magistrat de l’Audience nationale, la plus haute instance pénale du royaume, semble s’être aperçu de la présence de Zoubida Barik Edidi et l’a fermement priée de quitter la salle. Motif: cette avocate espagnole d’origine marocaine, qui assistait un confrère dans un procès lié au terrorisme, portait un foulard islamique. L’affaire fait grand bruit dans la presse espagnole depuis que la juriste a porté plainte contre le juge auprès du Conseil général du pouvoir judiciaire (CGPJ) pour «discrimination » et «abus de pouvoir». En septembre, ce même magistrat s’était déjà opposé à ce qu’une femme musulmane, témoin dans une affaire de terrorisme, se présente à la barre dans l’anonymat de sa burqa.Au terme d’une longue négociation, il avait obtenu qu’au moins les juges, les avocats et le procureur voient son visage pendant qu’elle déposait, le dos tourné au public.

Le cas de la cravate Pas de burqa cette fois-ci : Zoubida Barik Edidi était vêtue de sa robe d’avocat, un discret foulard violet lui couvrant les cheveux. «Le règlement n’exige que le port de la robe», plaide-t-elle. Rien, dans les statuts du barreau datant de 2001, n’interdit aux avocats de se couvrir la tête, du moment qu’ils «adaptent leur tenue vestimentaire à la dignité et au prestige de la robe qu’ils portent et au respect de la justice ». A39ans, Zoubida Barik Edidi débute dans la profession. Après un diplôme de droit obtenu à l’université Mohammed V de Rabat, elle est arrivée en Espagne en 1994. Elle a travaillé comme médiatrice culturelle auprès de femmes marocaines avant de reprendre ses études. Inscrite au barreau de Madrid depuis février, elle a déjà assisté à une dizaine de procès sans que personne trouve à redire à son voile. «Je veux savoir si cela peut se reproduire dans un autre tribunal, si je peux ou non exercer ma profession », a-t-elle demandé au CGPJ.

Afin de ne pas créer de tension avec la communauté musulmane, le gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero s’est toujours refusé a réglementer le portdu voile, encore moins au tribunal qu’à l’école. Après avoir exclu Mme Barik Edidi, le juge Gomez Bermudez aurait revendiqué, selon un avocat cité par ElPais, «une décision personnelle».Comme celle d’un autre président de tribunal de l’Audience nationale, Alfonso Guevara, qui expulsa de la salle d’audience,en décembre2008,un avocat parce qu’il refusait de mettre une cravate alors que le port de cet accessoire n’est plus obligatoire depuis 2001.A l’époque, les sages du Conseil général du pouvoir judiciaire avaient ordonné une enquête administrative contre le magistrat pour «manque d’égards».

Source:Le Monde
 
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