Le pays de la plus grande raclette et de la plus grande raclure…
* Le titre original est : La plus grande raclette du monde, le plus grand effronté de l’univers
Al Massae
Il est du plein droit du ministre marocain de la Jeunesse et des Sports de se mettre en colère, non pas parce que la pluie a noyé sous un déluge d’eau le complexe Moulay Abdallah, transformé en l’espace de quelques minutes en étang, mais parce qu’il s’est énervé de ce que les Marocains aient vitupéré contre lui. Et donc, notre ministre a traité les mécontents de 5ème colonne qui travaille contre les intérêts supérieurs du pays… bref, des traîtres.
Les propos du ministre Mohamed Ouzzine ne sont nullement une surprise… en effet, dans ce pays, le traître, le félon est celui qui est animé par de nobles intentions et demande à éradiquer la corruption qui le ronge. Mais en revanche, les vrais voleurs et les grands traîtres sont considérés comme les serviteurs de la nation, fiers de leur devoir et attachés à préserver les intérêts du pays.Et même quand ces individus nous plongent dans des scandales à retentissement planétaire, comme l’affaire du complexe Moulay Abdallah, il nous faut continuer de reconnaître que c’est nous qui trahissons en cela que nous n’avons pas compris ce qui s’est vraiment passé, et que ce qui s’est vraiment passé est que le ciel nous a envoyé une pluie malencontreuse, tombée au mauvais moment, dans l’endroit le plus mal choisi.
Le complexe de Rabat devait recevoir l’équipe du Real Madrid, et cette équipe est peuplée de stars, plus importantes encore que les stars chefs d’Etat ou de gouvernement du G8 ou d’ailleurs… ces joueurs de foot sont bien plus importants qu’Obama, que Merkel et que Poutine… Si nous devions recevoir ce G8 sur nos terres, nous n’aurions pas été autant mobilisés que nous l’avons été, et que nous le sommes toujours. Mais il semblerait que le ministre n’ait pas vu plus loin que le bout de son nez, lui qui s’est mis en tête de recevoir le Real Madrid, sans prendre en garde qu’il devait l’accueillir dans un stade qui allait être submergé au 20ème millimètre d’eau.
En Espagne, nous avons été la risée des médias qui s’en sont donné à cœur joie. Ainsi, Marca, le journal qui fait autorité en sport, a insisté sur ces éponges qu’ont utilisées les Marocains pour dégager l’eau de la pelouse du stade de Rabat, et aux yeux des Espagnols, c’était aussi grave que de dire que leurs stars allaient entrer dans la prison de Temara et qu’elles allaient être invitées à prendre place sur des pals… Branle-bas de combat en Espagne, le Real ayant mis en avant sa menace de repartir, n’eusse été l’intervention salutaire de la FIFA qui a exigé, et obtenu, le transfert de la demi-finale de Rabat à Marrakech.
Voici quelques semaines, quand le Maroc avait laissé passer la CAN qui est finalement allée en Guinée Equatoriale, nous avions souri, puis ri, à la vue de ces stades équato-guinéens qui ont remplacé les stades bien de chez nous. Nous avons beaucoup ri quand nous avons vu la pelouse noyée sous quelques gouttes d’eau, puis nous sommes tombés à la renverse de rire, de fou rire, fous que nous sommes, quand nous avons vu des ouvriers équato-guinéens essayer d’écoper l’eau avec des moyens rudimentaires, comme des serpillères et des raclettes ! Des commentateurs avaient cru bon de s’interroger avec gravité sur cette douce folie qui avait été de confier cette si importante chose qu’est la CAN à la Guinée Equatoriale… et parmi ces commentateurs, bien évidemment, il y avait bon nombre de Marocains, comme Baddou Zaki, qui avaient dit pis que pendre sur cette CAN équato-guinéenne. A entendre ces gens, nous aurions eu l’impression que nous étions une nation très avancée, toisant de haut une autre, très arriérée…
On dit que « celui qui vit par l’épée périra par l’épée »… et de fait, nous nous sommes retrouvés, quelques jours plus tard, dans une situation bien pire que celle de la Guinée Equatoriale car ce qui nous est arrivé à nous s’est déroulé sous les objectifs des caméras du monde entier, braquées ce soir-là sur Rabat. Et donc, la planète a pu voir comment le Maroc a pu dégainer subitement la plus grande raclette du monde, et comment nous nous sommes transformés en un clin d‘œil en peuple primitif, épongeant avec des éponges et raclant avec des raclettes, évacuant le tout dans des seaux de peinture.
Mai en vérité, on vous le dit, dans ce scandale, la corruption n’est en rien coupable, du moins pas autant que la pluie… Quand aux corrompus qui ont veillé à la construction de ce stade, ou plutôt à son réaménagement, ils ne sont en rien responsables car ils se sont comportés en se basant sur le fait que le Maroc n’est pas un pays à forte pluviométrie.
Et puis, aussi, Ouzzine n’a pas fauté car cet homme, on lui a dit « sois ministres», et il le fut, et s’il y avait là un autre ministre, les choses n’auraient pas été autrement ; mais le problème est que le ministre s’est comporté comme un effronté qui a eu l’outrecuidance de défendre l’indéfendable. Et on se rappelle de cet homme quand, l’an passé, il avait emmené sa fille tenir la main à Lionel Messi lors du match amical entre Tanger et le FC Barcelone, et l’accompagner jusqu’au milieu de la pelouse, alors que ce privilège devait revenir à un autre enfant, celui qui avait été sacré meilleur joueur d’un tournoi local… Est-ce donc la 5ème colonne qui avait privé cet enfant de l’honneur d’accompagner Messi, pour le faire remplacer par la fille du ministre ? Sont-ce donc les traîtres et autres félons qui avaient volé son rêve à cet enfant ?
C’était là un exemple de l’égoïsme et de l’hypocrisie du ministre Ouzzine, et le voilà aujourd’hui, le même qui vient défendre l’indéfendable, montrant ainsi que le Maroc ne dispose pas seulement de la pus grande raclette du monde, mais de la plus grande raclure aussi…
Aujourd’hui, on entend parler de têtes qui sont tombées au sein du ministère des Sports, à savoir le Secrétaire général et d’autres lampistes, ce qui ne fait que confirmer ce qu’on savait déjà sur notre merveilleux pays… les petits trépassent pour que les grands passent et se prélassent…
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