Zahra Boudkour, interview exclusive
Le jeudi 9 juillet 2009, vous avez été condamnée à 2 ans de prison ferme par le tribunal de Marrakech. Vous attendiez-vous à un tel verdict ?
(Long silence) Jai pris deux ans de prison avec neuf autres étudiants. Un étudiant a écopé de quatre ans. Nous étions tous préparés à une telle sentence. Nous étions même prêts à subir bien pire que la prison. La prison, ce nest quun petit lieu de détention.
Vous navez donc pas été déçue après le procès ?
Nous étions préparés psychologiquement. Le temps nous donnera raison car la vérité finit toujours par triompher. En attendant, je reste en prison encore quatre à six mois en attendant le procès en appel.
Que sest-il passé au tribunal en ce «jeudi noir» ?
Rien de spécial. Nous sommes restés fidèles à nos déclaration habituelles devant le juge. Nous avons déclaré que toutes les accusations intentées à notre encontre étaient infondées.
De quoi étiez-vous accusés exactement ?
De tentative dhomicide et davoir mis le feu dans la rue. Les gens qui nous ont collé ce procès sont bien connus. Le policier qui a été blessé pendant les manifestations na même pas été capable de désigner la personne qui la agressé. Le pire, cest quau moment où il a été brutalisé, nous étions déjà au commissariat !
Quavez-vous déclaré pendant le procès ?
Juste avant lénoncé du verdict, le juge nous a donné loccasion de nous exprimer une dernière fois. Nous assumons nos actes jusquau bout, quel que soit le jugement.
Quels sont les problèmes que vous rencontrez actuellement dans la prison civile de Boulmharez ?
Il ny a même pas un endroit où on peut se rendre pour consulter un médecin. Le médecin vient nous voir une seule fois par semaine. Même si quelquun est malade pendant la semaine, il doit attendre le vendredi. Et nous devons patienter jusquau lundi pour recevoir les médicaments. Peu importe quon attende, on peut mourir à petit feu
Le médecin est donc inefficace
Ce mois-ci, le médecin nous a rendu une seule visite. Chaque fois que je prends un traitement, cela ne me fait aucun effet. Jexplique pourtant au médecin que je souffre de plusieurs maux.
Je ne sais même pas quelles sont vraiment mes maladies et le médecin est incapable de me le dire !
Lorsquil y a urgence médicale, que se passe-t-il ?
On peut toujours attendre
des heures et des heures
De quels symptômes souffrez-vous ?
Jai un mal de crâne récurrent, qui saccentue lorsque je me lave la tête depuis quon ma frappée avec une barre fer au commissariat de Jemaâ El Fna. Jai également détranges douleurs au ventre et dans certaines parties de mon corps.
Décrivez-nous le cadre dans lequel vous vivez depuis mai 2008
Il est exécrable. Nous sommes trop nombreux dans un petit espace envahi par les cafards. Nous sommes une cinquantaine dans un lieu qui ne prendrait normalement pas plus de vingt personnes. Beaucoup de femmes sont très malades, elles souffrent des poumons et crachent du sang. Même les enfants sont dans un très sale état, ils ont des cafards sur le visage.
Quelles sont les conditions dhygiène ?
On se douche à leau froide une seule fois par semaine. Nous sommes une cinquantaine de personnes à nous partager un seul sanitaire.
Où dormez-vous ?
Dans de piteuses conditions. Il y a des détenues qui sont un peu mieux loties que dautres. Mais nous dormons toutes sur de vieilles guenilles.
Et que mangez-vous ?
De la nourriture pitoyable. En été, on mange des lentilles, des haricots, des fèves,
(silence) des carottes, des pommes de terre
cest-à-dire tout ce qui est fait avec beaucoup deau.
Est-ce quon vous maltraite en prison ?
(Silence) Non, non. On ne nous frappe pas