De Gaza à la Californie : No Futur(s)
Donald Trump, Benyamin Netanyahou et Peter Thiel. Quels points communs relient le président des États-Unis, le premier ministre israélien et l'entrepreneur suprémaciste à la tête de l'une des plus importantes entreprises de big data ? Leurs nouveaux mots d'ordre : futuricide et apocalypse. Dans sa mutation technofasciste, le pouvoir politique et économique convoque désormais une mythologie de fin des temps, qui résonne particulièrement dans une époque crépusculaire.
Les Palestinien·nes ont appelé ça
les "Hunger Games". Chaque jour ou presque depuis le début du mois, dans les 18% de la bande de Gaza pas encore concernés par les zones militaires et les ordres d'évacuation israéliens, 2,3 millions d'entre eux jouent au jeu le plus ignoble qui soit. Ils vont à pied, à travers des kilomètres de ruines, à la rencontre des camions de l'aide supposément "humanitaire" fournie par l'opaque compagnie israélo-américaine Gaza Humanitarian Foundation (GHF), avec l'espoir de récupérer de quoi se nourrir. Les plus chanceux reviennent avec un sac de farine, un paquet de pois chiches, de quoi continuer à survivre au milieu de ce purgatoire terrestre. Les autres reviennent en portant le cadavre de leur proche, tué par l'armée israélienne, ses snipers, ses drones, ses tanks. Pour les Gazaoui·es, la GHF et le gouvernement israélien
ont mis en place un "abattoir humain". Et pendant ce temps, l'armée ne répond plus à la presse, et
coupe les télécommunications du territoire. La bande de Gaza est, plus que jamais depuis le 7-Octobre 2023, l'angle mort de l'humanité, alors que s'y joue une image de sa fin.
Au même moment, un autre écho de la fin d'humanité se fait, lui, entendre, en Occident. Une rhétorique biblique, apocalyptique, s'est invitée dans la bouche des broligarques - Donald Trump, Peter Thiel, Elon Musk. Dans quelques journaux qui osent nommer les choses, on l'entend. Est-ce un hasard, de voir reliées Gaza - plus que jamais
nexus de la lutte générale entre le vivant et sa négation - et la Californie ? Ce n'est pas un hasard, c'est une orientation politique. Celle d'une oligarchie "No Future" qui, tout en accélérant l'effondrement général du monde au nom de l'accumulation, légitime désormais son entreprise de dévastation en puisant dans le lexique du fondamentalisme religieux.
L'Apocalypse était inévitable, osent désormais ses grands architectes.