Géopolitologue de renom, Pascal Boniface voue une véritable passion pour la question footballistique. Invité dhonneur de la Ligue de Lorraine, cet érudit balaye lactualité internationale du ballon rond avec un regard aiguisé.
Il a répondu spontanément à linvitation de son ami Bernard Desumer, fréquenté dans les couloirs de la Fondation du football dont il occupe le fauteuil de secrétaire général. Son nom ne vous est peut-être pas familier mais son visage a dû safficher, un soir de crise de zapping aiguë, sur votre petit écran. Régulièrement convié par les acteurs du tube cathodique, Pascal Boniface, directeur de lInstitut de relations internationales et stratégiques, auteur dune quarantaine douvrages sur les questions stratégiques traitant de la politique extérieure de la France, a également développé une spécialité de la géopolitique du sport (en particulier du football). Géopolitique, un mot savant qui ne doit pas rebuter. La preuve avec ce bref tour dhorizon de lactualité nationale, et internationale, du ballon rond.
Laffaire Henry. « Ce qui me frappe, en France, cest notre capacité dautodénigrement. Aucune autre nation naurait engagé un tel débat sur la probité du sport au lendemain dune qualification. Dans les pays Anglo-Saxons, où le sport est accepté et aimé par les élites, jamais on aurait songé à rejouer le match. La main dHenry, ce nest quune faute comme il sen passe des milliers chaque année dans le football. Lagitation médiatique qui a escorté ce fait de match, la prise de position des politiques ou encore des intellectuels ne répond quà une jalousie maladive nourrie à légard du foot. Cette discipline représente 2,3 millions de licenciés à jour avec leur cotisation. Quel mouvement politique, quel courant religieux ou autres associations peut se targuer dune telle affluence. Cette popularité irrite en France. Thierry Henry mapparaît comme le bouc émissaire, au sens biblique du terme, de tous les péchés et frustrations générés par la société. Dans un pays où le mensonge est toléré en politique, on demande au sport en général, et au football en particulier, dêtre plus vertueux que le reste. Cest la vengeance des médiocres et des jaloux. »
Afrique du Sud. « Le comité dorganisation a vu juste en retenant lAfrique du Sud. Le Maroc, dun point de vue structurel, avait sans doute le meilleur dossier. Mais il me paraît stratégique doffrir lun des deux plus grands événements planétaires (avec les Jeux Olympiques), à un pays qui a su réaliser la plus grande réforme démocratique de lhistoire en tournant la page de lapartheid sans les dérives déplorées, par exemple, au Zimbabwe. A travers lAfrique du Sud, cest lensemble du continent africain qui va en retirer un bénéfice en terme dimage. Prouver au monde occidentale, qui jette souvent un regard empreint de charité et de commisération sur ses habitants, que lAfrique est capable dorganiser un tel événement na pas de prix. Sur le plan local, la patrie de Nelson Mandela dégagera un plus économique : elle mise sur 10 millions de touristes lannée suivant la Coupe du monde. »
Hortefeux. « La déclaration de Brice Hortefeux sur le coût de la sécurité qui doit être supporté par les clubs de foot ? Une simple intervention visant à le rendre populaire. La police nest-elle pas publique ? Ou souhaite-t-on la privatiser ? En suivant sa réflexion, un parti politique devra lui aussi sacquitter dune dîme lorsquil organise un meeting. Non, ce nest pas sérieux. Cest une manière de stigmatiser, encore et toujours, ce sport populaire. »
Algérie-Egypte. « Le football na pas que des vertus, ce nest pas un monde féerique qui règle les problèmes à la manière dune Mary Poppins. Mais dans le cas des incidents ayant émaillé la rencontre Algérie-Egypte, ce sont surtout les pouvoirs politiques de ces deux pays qui ont mis de lhuile sur le feu. Le football nest pas coupable, ce nest quun moyen entre les mains de décideurs politiques. Pour men être entretenu avec des dirigeants de lassociation Peace and Sport, je sais que seul le football, dans la sphère sportive, est capable de rapprocher des individus, voire de réconcilier, un court instant, des communautés. Pas le cyclisme, ni la Formule 1 »
Par : Jean-Michel CAVALLI.
Source : Le Républicain Lorrain
Il a répondu spontanément à linvitation de son ami Bernard Desumer, fréquenté dans les couloirs de la Fondation du football dont il occupe le fauteuil de secrétaire général. Son nom ne vous est peut-être pas familier mais son visage a dû safficher, un soir de crise de zapping aiguë, sur votre petit écran. Régulièrement convié par les acteurs du tube cathodique, Pascal Boniface, directeur de lInstitut de relations internationales et stratégiques, auteur dune quarantaine douvrages sur les questions stratégiques traitant de la politique extérieure de la France, a également développé une spécialité de la géopolitique du sport (en particulier du football). Géopolitique, un mot savant qui ne doit pas rebuter. La preuve avec ce bref tour dhorizon de lactualité nationale, et internationale, du ballon rond.
Laffaire Henry. « Ce qui me frappe, en France, cest notre capacité dautodénigrement. Aucune autre nation naurait engagé un tel débat sur la probité du sport au lendemain dune qualification. Dans les pays Anglo-Saxons, où le sport est accepté et aimé par les élites, jamais on aurait songé à rejouer le match. La main dHenry, ce nest quune faute comme il sen passe des milliers chaque année dans le football. Lagitation médiatique qui a escorté ce fait de match, la prise de position des politiques ou encore des intellectuels ne répond quà une jalousie maladive nourrie à légard du foot. Cette discipline représente 2,3 millions de licenciés à jour avec leur cotisation. Quel mouvement politique, quel courant religieux ou autres associations peut se targuer dune telle affluence. Cette popularité irrite en France. Thierry Henry mapparaît comme le bouc émissaire, au sens biblique du terme, de tous les péchés et frustrations générés par la société. Dans un pays où le mensonge est toléré en politique, on demande au sport en général, et au football en particulier, dêtre plus vertueux que le reste. Cest la vengeance des médiocres et des jaloux. »
Afrique du Sud. « Le comité dorganisation a vu juste en retenant lAfrique du Sud. Le Maroc, dun point de vue structurel, avait sans doute le meilleur dossier. Mais il me paraît stratégique doffrir lun des deux plus grands événements planétaires (avec les Jeux Olympiques), à un pays qui a su réaliser la plus grande réforme démocratique de lhistoire en tournant la page de lapartheid sans les dérives déplorées, par exemple, au Zimbabwe. A travers lAfrique du Sud, cest lensemble du continent africain qui va en retirer un bénéfice en terme dimage. Prouver au monde occidentale, qui jette souvent un regard empreint de charité et de commisération sur ses habitants, que lAfrique est capable dorganiser un tel événement na pas de prix. Sur le plan local, la patrie de Nelson Mandela dégagera un plus économique : elle mise sur 10 millions de touristes lannée suivant la Coupe du monde. »
Hortefeux. « La déclaration de Brice Hortefeux sur le coût de la sécurité qui doit être supporté par les clubs de foot ? Une simple intervention visant à le rendre populaire. La police nest-elle pas publique ? Ou souhaite-t-on la privatiser ? En suivant sa réflexion, un parti politique devra lui aussi sacquitter dune dîme lorsquil organise un meeting. Non, ce nest pas sérieux. Cest une manière de stigmatiser, encore et toujours, ce sport populaire. »
Algérie-Egypte. « Le football na pas que des vertus, ce nest pas un monde féerique qui règle les problèmes à la manière dune Mary Poppins. Mais dans le cas des incidents ayant émaillé la rencontre Algérie-Egypte, ce sont surtout les pouvoirs politiques de ces deux pays qui ont mis de lhuile sur le feu. Le football nest pas coupable, ce nest quun moyen entre les mains de décideurs politiques. Pour men être entretenu avec des dirigeants de lassociation Peace and Sport, je sais que seul le football, dans la sphère sportive, est capable de rapprocher des individus, voire de réconcilier, un court instant, des communautés. Pas le cyclisme, ni la Formule 1 »
Par : Jean-Michel CAVALLI.
Source : Le Républicain Lorrain