Bonjour 
Je lisais un traité de Cicéron sur les passions (les Tusculanes IV et V) et je suis choqué que cet homme si brillant puisse dire des choses aussi outrancières, aussi... inhumaines sur les passions (il inclut dans ce mot toutes les émotions et n'en exclut qu'un contentement tranquille propre au sage).
Voici deux textes pour que vous puissiez en juger :
"""
Voilà pourquoi nous taxons de tiédeur et de mollesse la théorie et le discours des péripatéticiens, qui jugent nécessaires les passions, se contentant de leur fixer une limite à ne pas franchir. Fixer une limite au vice! Transgresser les préceptes de la raison ne serait donc pas un vice?
[...]
Ainsi, chercher à fixer une limite au vice, c'est faire comme si l'on croyait possible de se jeter du haut du rocher de Leucate et d'arrêter sa chute à volonté! Mais c'est impossible, et l'âme, elle non plus, ne peut, une fois envahie par le trouble et l'excitation des passions, se reprendre ni s'arrêter à volonté sur cette pente. Ce qui devient pernicieux avec le temps est vicieux dès l'origine; et le chagrin, comme toute passion, pernicieux quand il a atteint un certain développement, charrie donc dès sa naissance un poison redoutable : à peine a-t-on quitté la raison que les passions se déchaînent; notre faiblesse, indulgente à elle-même, nous entraîne toujours plus loin sur cette mer des passions, et ne trouve plus de lieu où jeter l'ancre. Et donc, donner son approbation à des passions modérées, cela revient à approuver une injustice modérée, une lâcheté modérée, une intempérance modérée : c'est exactement la même chose. Fixer une limite aux vices, c'est déjà en assumer une partie. Conduite certes haïssable, mais surtout fort périlleuse, car les vices se tiennent sur un terrain glissant, et une fois l'élan donné, ils descendent la pente, sans rien à quoi se raccrocher.
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Je lisais un traité de Cicéron sur les passions (les Tusculanes IV et V) et je suis choqué que cet homme si brillant puisse dire des choses aussi outrancières, aussi... inhumaines sur les passions (il inclut dans ce mot toutes les émotions et n'en exclut qu'un contentement tranquille propre au sage).
Voici deux textes pour que vous puissiez en juger :
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Voilà pourquoi nous taxons de tiédeur et de mollesse la théorie et le discours des péripatéticiens, qui jugent nécessaires les passions, se contentant de leur fixer une limite à ne pas franchir. Fixer une limite au vice! Transgresser les préceptes de la raison ne serait donc pas un vice?
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Ainsi, chercher à fixer une limite au vice, c'est faire comme si l'on croyait possible de se jeter du haut du rocher de Leucate et d'arrêter sa chute à volonté! Mais c'est impossible, et l'âme, elle non plus, ne peut, une fois envahie par le trouble et l'excitation des passions, se reprendre ni s'arrêter à volonté sur cette pente. Ce qui devient pernicieux avec le temps est vicieux dès l'origine; et le chagrin, comme toute passion, pernicieux quand il a atteint un certain développement, charrie donc dès sa naissance un poison redoutable : à peine a-t-on quitté la raison que les passions se déchaînent; notre faiblesse, indulgente à elle-même, nous entraîne toujours plus loin sur cette mer des passions, et ne trouve plus de lieu où jeter l'ancre. Et donc, donner son approbation à des passions modérées, cela revient à approuver une injustice modérée, une lâcheté modérée, une intempérance modérée : c'est exactement la même chose. Fixer une limite aux vices, c'est déjà en assumer une partie. Conduite certes haïssable, mais surtout fort périlleuse, car les vices se tiennent sur un terrain glissant, et une fois l'élan donné, ils descendent la pente, sans rien à quoi se raccrocher.
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