lundi 25 janvier 2010 - 08h:27
Serge Dumont - Le Temps
Alors que lémissaire américain George Mitchell fait la navette entre Ramallah et Jérusalem, les leaders palestiniens ne cachent pas leur pessimisme sur lévolution du processus de paix
« Nécoutez pas ce que disent les Israéliens. Regardez plutôt ce quils font et vous comprendrez que la reprise du processus de paix est plus éloignée que jamais. » A linstar du ministre palestinien des Négociations, Saeb Erekat, les responsables de lAutorité palestinienne (AP) ne croient plus vraiment au dialogue de paix avec Israël. Du moins, pas tant que Benyamin Netanyahou sera le Premier ministre de lEtat hébreu et que sa majorité sera composée de partis dextrême droite favorables à la poursuite de la colonisation.
Visite de George Mitchell
Car, sur le terrain, la construction se poursuit dans les implantations de Cisjordanie malgré le gel de dix mois proclamé le 29 novembre dernier par lEtat hébreu. A Jérusalem-Est (la partie arabe de la ville annexée par Israël après la guerre de juin 1967), les projets de colonies juives se multiplient alors que la municipalité interdit les projets immobiliers destinés à la population palestinienne.
« Benyamin Netanyahou dit quil nous tend la main, mais pour discuter de quoi ? » interroge Salam Fayyad, le chef du gouvernement palestinien. Certes, pour lheure, le président de lAP Mahmoud Abbas refuse denvisager un retour à laction violente. Mais au sein de la direction du Fatah, son parti, des « anciens » des deux Intifada commencent à hausser le ton. « Parce quIsraël ne comprend que le langage de la force », selon eux.
Recevant lémissaire américain pour la paix George Mitchell, le raïs palestinien a en tout cas confirmé dimanche son refus de sasseoir à la même table que les dirigeants israéliens « tant que la colonisation se poursuivra ». En revanche, il na pas rejeté lidée dun sommet organisé en Jordanie ou en Egypte entre lui et le président israélien Shimon Peres, lun des initiateurs du processus de paix dOslo (septembre 1993). Pour lheure, cette nouvelle proposition américaine censée réinitialiser les contacts entre Israël et lAP nen est encore quà sa phase exploratoire, mais il se dit à Ramallah que des contacts informels ont lieu à ce propos avec Tel-Aviv.
Mais tout cela reste très vague. Au Département palestinien de la planification et des réformes administratives, Ali Jarbawi - un proche de Mahmoud Abbas - doute ouvertement de lévolution positive du processus. « La paix, nous en avons parlé pendant presque dix après la signature des Accords dOslo. Pour déboucher sur quoi ? Sur un blocage total, nous déclare-t-il. Désormais, nous ne pouvons plus nous permettre de perdre du temps dans de telles péroraisons sans fin. Si Benyamin Netanyahou veut vraiment remettre les négociations de paix sur leurs rails, il doit énoncer les dossiers sur lesquels porteront les discussions et fixer une date limite de conclusion des débats. »
Deux Etats ?
Le pessimisme quant à lévolution de la situation a manifestement gagné du terrain parmi les élites de lAP. Recteur de luniversité Al-Quds de Jérusalem-Est et intellectuel mondialement connu, Sari Nusseibeh a toujours soutenu la poursuite du dialogue avec Israël. Ce qui lui a souvent valu des critiques acerbes émanant de son propre camp. Pourtant, lorsque nous lavons rencontré samedi, ce modéré semblait quelque peu désorienté : « Je voudrais tant que le processus de paix vive, mais il est au point mort. Comme beaucoup à Ramallah, jen arrive à me dire que la solution dite de "deux Etats pour deux peuples vivant en paix côte à côte" nest peut-être pas la bonne. Et quil faudrait envisager autre chose. Peut-être une fédération de communautés différentes comme en Belgique. Ou une confédération comme en Suisse, pourquoi pas ? En tout cas, il nous faut trouver des alternatives au blocage actuel. Notre imagination doit fonctionner à plein régime si nous voulons, à terme, éviter un nouveau bain de sang. »
Serge Dumont - Le Temps
Alors que lémissaire américain George Mitchell fait la navette entre Ramallah et Jérusalem, les leaders palestiniens ne cachent pas leur pessimisme sur lévolution du processus de paix
« Nécoutez pas ce que disent les Israéliens. Regardez plutôt ce quils font et vous comprendrez que la reprise du processus de paix est plus éloignée que jamais. » A linstar du ministre palestinien des Négociations, Saeb Erekat, les responsables de lAutorité palestinienne (AP) ne croient plus vraiment au dialogue de paix avec Israël. Du moins, pas tant que Benyamin Netanyahou sera le Premier ministre de lEtat hébreu et que sa majorité sera composée de partis dextrême droite favorables à la poursuite de la colonisation.
Visite de George Mitchell
Car, sur le terrain, la construction se poursuit dans les implantations de Cisjordanie malgré le gel de dix mois proclamé le 29 novembre dernier par lEtat hébreu. A Jérusalem-Est (la partie arabe de la ville annexée par Israël après la guerre de juin 1967), les projets de colonies juives se multiplient alors que la municipalité interdit les projets immobiliers destinés à la population palestinienne.
« Benyamin Netanyahou dit quil nous tend la main, mais pour discuter de quoi ? » interroge Salam Fayyad, le chef du gouvernement palestinien. Certes, pour lheure, le président de lAP Mahmoud Abbas refuse denvisager un retour à laction violente. Mais au sein de la direction du Fatah, son parti, des « anciens » des deux Intifada commencent à hausser le ton. « Parce quIsraël ne comprend que le langage de la force », selon eux.
Recevant lémissaire américain pour la paix George Mitchell, le raïs palestinien a en tout cas confirmé dimanche son refus de sasseoir à la même table que les dirigeants israéliens « tant que la colonisation se poursuivra ». En revanche, il na pas rejeté lidée dun sommet organisé en Jordanie ou en Egypte entre lui et le président israélien Shimon Peres, lun des initiateurs du processus de paix dOslo (septembre 1993). Pour lheure, cette nouvelle proposition américaine censée réinitialiser les contacts entre Israël et lAP nen est encore quà sa phase exploratoire, mais il se dit à Ramallah que des contacts informels ont lieu à ce propos avec Tel-Aviv.
Mais tout cela reste très vague. Au Département palestinien de la planification et des réformes administratives, Ali Jarbawi - un proche de Mahmoud Abbas - doute ouvertement de lévolution positive du processus. « La paix, nous en avons parlé pendant presque dix après la signature des Accords dOslo. Pour déboucher sur quoi ? Sur un blocage total, nous déclare-t-il. Désormais, nous ne pouvons plus nous permettre de perdre du temps dans de telles péroraisons sans fin. Si Benyamin Netanyahou veut vraiment remettre les négociations de paix sur leurs rails, il doit énoncer les dossiers sur lesquels porteront les discussions et fixer une date limite de conclusion des débats. »
Deux Etats ?
Le pessimisme quant à lévolution de la situation a manifestement gagné du terrain parmi les élites de lAP. Recteur de luniversité Al-Quds de Jérusalem-Est et intellectuel mondialement connu, Sari Nusseibeh a toujours soutenu la poursuite du dialogue avec Israël. Ce qui lui a souvent valu des critiques acerbes émanant de son propre camp. Pourtant, lorsque nous lavons rencontré samedi, ce modéré semblait quelque peu désorienté : « Je voudrais tant que le processus de paix vive, mais il est au point mort. Comme beaucoup à Ramallah, jen arrive à me dire que la solution dite de "deux Etats pour deux peuples vivant en paix côte à côte" nest peut-être pas la bonne. Et quil faudrait envisager autre chose. Peut-être une fédération de communautés différentes comme en Belgique. Ou une confédération comme en Suisse, pourquoi pas ? En tout cas, il nous faut trouver des alternatives au blocage actuel. Notre imagination doit fonctionner à plein régime si nous voulons, à terme, éviter un nouveau bain de sang. »