Maroc : des islamistes "light" au seuil du pouvoir
Le Parti de la justice et du développement, modéré et favorable à la royauté, part favori des législatives, vendredi.
Après la Tunisie et avant lÉgypte, au tour du Maroc dappeler ses électeurs aux urnes. Vendredi, ils désigneront leurs nouveaux députés. Contrairement à ses voisins de la région, le royaume na connu quune "révolution douce". Le mouvement de contestation dit du 20 février na jamais réussi à mobiliser les foules et le roi Mohammed VI, en faisant adopter le 1er juillet une nouvelle Constitution, a su habilement renforcer sa popularité. Reste quà linstar de la Tunisie et de lÉgypte, les islamistes partent favoris.
Un Premier ministre islamiste?
Lune des mesures phares de la nouvelle Constitution prévoit que le Premier ministre soit désormais issu du parti majoritaire, et non plus désigné par le roi. Le scénario dun gouvernement dirigé par le Parti de la justice et du développement (PJD), les islamistes légaux, est dans toutes les têtes. Comme en Tunisie, les électeurs pourraient donner leur chance à ces nouveaux venus en politique ils nont jamais gouverné se présentant comme irréprochables moralement. Toutefois, pour Mohamed Darif, professeur de sciences politiques à luniversité Hassan-II de Casablanca, les jeux sont plus ouverts quil ny paraît: "Les islamistes ont en face deux des partis expérimentés qui peuvent mobiliser massivement pour les élections." Pour Jean-Noël Ferrié, directeur de recherche au CNRS à Rabat, "il ne faut pas envisager un raz de marée des islamistes au Maroc". À ses yeux, le PJD se rapproche bien plus des Tunisiens dEnnahda que des Frères musulmans égyptiens : "Ils sont conservateurs mais ne sont obsédés ni par la charia ni par le port du voile. Qui plus est, ils sont globalement royalistes."
Une participation élevée?
Le référendum de juillet (73% de participation) a mobilisé les foules. Quen sera-t-il du vote de vendredi? "40 à 45% de participation constituerait un score honorable", estime Mohamed Darif, comparé aux 37% de participation aux législatives de 2007. "Le taux ne dépassera pas les 55%, pronostique Jean-Noël Ferrié. Une faible participation devrait être interprétée comme un désaveu, non à légard du roi, mais plutôt de la classe politique."
Quelle liberté daction pour le futur gouvernement?
La nouvelle Constitution prévoit de renforcer le rôle du Premier ministre et du Parlement (la nouvelle assemblée comptera 395 sièges au lieu de 325). Elle pose aussi le principe de légalité hommes femmes, sauf pour lhéritage. "Un gouvernement légitimé par les urnes et disposant dune majorité stable aura davantage de poids pour faire avancer le Maroc sur les questions sociales et économiques, assure Jean-Noël Ferrié. En matière demploi, de santé et de protection sociale, déducation, de lutte contre la corruption
" Autant de projets soutenus par le roi, qui gardera, quoi quil arrive, la maîtrise des opérations.
Cyril Bonnel, correspondance à Casblanca (avec Alexandre Duyck) - Le Journal du Dimanche
http://www.lejdd.fr/International/M...ives-vendredi-au-Maroc-426201/?from=headlines