Voici un article de Gilles Kepel, spécialiste du monde arabe paru dans le monde il y a quelques années (le 19.01.06 ), et qui me semble toujours d'actualité, voire plus, à lire certains posts ici ou dans d'autres sites.
En quoi Internet est utile pour les réseaux terroristes djihadistes ou autres ?
On le trouve la réponse dans le nom même d'Al-Qaida qui en arabe veut dire beaucoup de choses, et notamment la base, au sens entre autre de la base de données. On voit bien comment cette espèce de réseau qu'on a dû mal à définir s'est développée à partir de ce qu'était une base territoriale dans les années 1990. Le sens originel désignait le camp de base ou s'entraînait les volontaires Arabes qui venaient en Afghanistan, alors qu'aujourd'hui, c'est une sorte de base de données puisque, c'est à partir de réseaux virtuels qui se regroupent et se défont au gré des chats et sans aucune véritable attache territoriale, qu'on va voir des bombes exploser à Londres, à Madrid, à New York, à Djakarta. La globalisation du phénomène terroriste ne pourrait pas avoir lieu de la manière que l'on connaît aujourd'hui s'il n'y avait pas Internet.
Le deuxième point, c'est que la dissémination de la littérature du salafisme, du djihadisme d'Al-Qaida, celle pour l'essentiel traduite et commentée dans " Al-Qaida dans le texte ", on la trouve désormais exclusivement sur Internet en arabe sur des sites spécialisés qui sont régulièrement attaqués par des hackers hostiles qui les remplacent par des sites pornographiques avec un cookie qui empêche de sortir et qui contamine l'ordinateur parfois ; mais c'est quelque chose qui change complètement la donne parce que l'Internet crée une sorte de petite communauté des croyants virtuels dé-contextualisée et permet à ceux qui s'en réclament de ne plus vivre sous l'emprise d'un Imam local ou quelqu'un qui voudrait faire un Islam français puisque c'est aujourd'hui quelque chose à laquelle certains hommes politiques français sont très sensibles mais qui s'en émancipent et qui à travers le téléchargement de tel ou tel texte sur Internet vont avoir le sentiment d'avoir accès à une vraie source de la religion, de l'Islam tel qu'ils l'interprètent. C'est un phénomène qui n'est pas propre au terrorisme d'ailleurs, puisque les salafistes, ceux qui sont non violents, ont construit un véritable réseau de textes religieux, voire de sollicitation d'avis sur l'Internet.
Une fille vivant dans une banlieue française va interroger par Internet un cheikh saoudien salafiste pour savoir si elle a le droit de prendre la pilule, parce que si jamais elle met au monde un enfant dans une terre d'impiété, son enfant est en grand danger. Doit-elle plutôt prendre la pilule et rester en France ou immigrer vers la terre d'Islam. Le cheikh saoudien lui répond qu'il faut immigrer même si cela est difficile. On a là un bouleversement des comportements et du rapport à la source et à l'autorité. L'autorité religieuse qui vient d'Internet, que ce soit chez les salafistes ou chez les djihadistes, acquiert une espèce de scientificité, si j'ose dire, parce qu'elle sort de l'ordinateur ; et c'est un phénomène bizarre, car cela permet de mêler à la fois des injonctions qui ont l'air dépassées, médiévales puis l'ultra-moderne. L'Internet permet de supprimer d'abolir l'espace mais également le temps. Ce qui fait que des textes du VIIIe siècle de l'ère chrétienne qui incitent à égorger les impies et qui avaient un sens particulier dans la littérature polémique militaire ou religieuse du VIIIe siècle vont se retrouver reproduits comme tels sans aucune adaptation au XXIe siècle dans telle ou telle banlieue. C'est ça qui est très frappant et que l'on voit dans " Al-Qaida dans le texte " en particulier.
En quoi Internet est utile pour les réseaux terroristes djihadistes ou autres ?
On le trouve la réponse dans le nom même d'Al-Qaida qui en arabe veut dire beaucoup de choses, et notamment la base, au sens entre autre de la base de données. On voit bien comment cette espèce de réseau qu'on a dû mal à définir s'est développée à partir de ce qu'était une base territoriale dans les années 1990. Le sens originel désignait le camp de base ou s'entraînait les volontaires Arabes qui venaient en Afghanistan, alors qu'aujourd'hui, c'est une sorte de base de données puisque, c'est à partir de réseaux virtuels qui se regroupent et se défont au gré des chats et sans aucune véritable attache territoriale, qu'on va voir des bombes exploser à Londres, à Madrid, à New York, à Djakarta. La globalisation du phénomène terroriste ne pourrait pas avoir lieu de la manière que l'on connaît aujourd'hui s'il n'y avait pas Internet.
Le deuxième point, c'est que la dissémination de la littérature du salafisme, du djihadisme d'Al-Qaida, celle pour l'essentiel traduite et commentée dans " Al-Qaida dans le texte ", on la trouve désormais exclusivement sur Internet en arabe sur des sites spécialisés qui sont régulièrement attaqués par des hackers hostiles qui les remplacent par des sites pornographiques avec un cookie qui empêche de sortir et qui contamine l'ordinateur parfois ; mais c'est quelque chose qui change complètement la donne parce que l'Internet crée une sorte de petite communauté des croyants virtuels dé-contextualisée et permet à ceux qui s'en réclament de ne plus vivre sous l'emprise d'un Imam local ou quelqu'un qui voudrait faire un Islam français puisque c'est aujourd'hui quelque chose à laquelle certains hommes politiques français sont très sensibles mais qui s'en émancipent et qui à travers le téléchargement de tel ou tel texte sur Internet vont avoir le sentiment d'avoir accès à une vraie source de la religion, de l'Islam tel qu'ils l'interprètent. C'est un phénomène qui n'est pas propre au terrorisme d'ailleurs, puisque les salafistes, ceux qui sont non violents, ont construit un véritable réseau de textes religieux, voire de sollicitation d'avis sur l'Internet.
Une fille vivant dans une banlieue française va interroger par Internet un cheikh saoudien salafiste pour savoir si elle a le droit de prendre la pilule, parce que si jamais elle met au monde un enfant dans une terre d'impiété, son enfant est en grand danger. Doit-elle plutôt prendre la pilule et rester en France ou immigrer vers la terre d'Islam. Le cheikh saoudien lui répond qu'il faut immigrer même si cela est difficile. On a là un bouleversement des comportements et du rapport à la source et à l'autorité. L'autorité religieuse qui vient d'Internet, que ce soit chez les salafistes ou chez les djihadistes, acquiert une espèce de scientificité, si j'ose dire, parce qu'elle sort de l'ordinateur ; et c'est un phénomène bizarre, car cela permet de mêler à la fois des injonctions qui ont l'air dépassées, médiévales puis l'ultra-moderne. L'Internet permet de supprimer d'abolir l'espace mais également le temps. Ce qui fait que des textes du VIIIe siècle de l'ère chrétienne qui incitent à égorger les impies et qui avaient un sens particulier dans la littérature polémique militaire ou religieuse du VIIIe siècle vont se retrouver reproduits comme tels sans aucune adaptation au XXIe siècle dans telle ou telle banlieue. C'est ça qui est très frappant et que l'on voit dans " Al-Qaida dans le texte " en particulier.