FPP75
VIB
Quest-ce qui fait de moi un homme: mon pénis ? Le regard des femmes ? Celui de mes enfants ? Mais qui suis-je alors quand jai des pannes, quand ma compagne me quitte et que ma famille éclate ?
Etre un homme, cest difficile. Ce qui ne veut pas dire quêtre une femme soit nécessairement plus facile, mais la question ici, pour commencer, est « un homme, cest quoi ? ». Eh bien, cest difficile. Prenez Blaise, 43 ans, en instance de divorce au moment où, sur lun des forums de psychologies. com, il écrit : « Ma femme ne ma pas pardonné de lui avoir fait un enfant. Pendant ces dernières années, je nai eu quune sexualité de solitaire. Cest déstabilisant et frustrant. Dernièrement, jai rencontré quelquun et ça sest plutôt mal passé : la panne totale. Jai beau me dire que les circonstances ny étaient pas, que ce nétait pas la bonne personne On ne peut sempêcher de penser quon est un gros nul. Cest dur ». Un gros nul. Son témoignage mévoque dautres situations Par exemple celle de Paul, 47 ans, qui raconte plus loin dans ce hors-série (p. 48) comment il a choisi lui de répondre à son désarroi en ayant recours à des call-girls. Ou celle de Tom, le père à la dérive du fulgurant roman de David Vann, Sukkwan Island, qui dit à son fils : « Lhomme nest que lappendice des femmes. Les femmes se satisfont à elles-mêmes et nont pas besoin des hommes. Mais les hommes, oui, ont besoin delles. Ce sont donc elles qui ont tout le pouvoir. Elles qui décident de ce qui doit être fait et comment. Et qui changent davis tout le temps. Nous navons rien à dire dans tout ça. » Je pourrais y ajouter le mien. Récemment divorcé, jai assisté au déménagement de mes enfants et de leur mère avec le désarroi du général devant son armée en déroute, du cultivateur après la grêle, du navigateur de haute mer sans boussole ni gouvernail. Et ce nest pas la première fois que jen fais lexpérience, la rupture déclenche un séisme tel que sinsinue le doute : suis-je seulement encore un homme ?
Être un homme, cest la bite
Mais cest quoi, être un homme ? « Lidentité masculine, cest la bite ! », sexclame le Dr Ronald Virag avec la certitude de sa profession. Virag est un andrologue français assez connu, notamment pour sa participation aux recherches ayant donné jour au petit losange bleu anagramme de son nom, le Viagra. Aujourdhui, il se concentre plutôt sur les implants péniens, quil pratique pour pallier les problèmes érectiles graves ou augmenter la taille des membres jugés inadéquats. En trente ans, il a suivi pas moins de quinze mille patients. Abondamment décoré de sculptures phalliques, petites et grandes, en ivoire ou en ébène, son cabinet sapparente à un musée de lérotisme masculin. « Celle-ci vient du Bénin : au moment où le garçon devient pubère on la plante devant sa case pour appeler la fertilité. Allez-y, touchez-la, nayez pas peur ! » Pour Virag, donc, le pénis cest lhomme, et inversement. « Je reçois des patients au bord du suicide parce que lon sest moqué deux dans les vestiaires ou à cause du commentaire imprudent dune femme au lit ». Sen suit le croquis dune intervention chirurgicale type : « On déshabille la verge, on fend lalbugine dans le sens de la longueur et lon fixe un patch veineux prélevé sur la cuisse ». Puis on recoud le tout. Jen frissonne. Entre ses mains le sexe du patient aura gagné en circonférence. « Mieux vaut lavoir grosse que longue », soutient le chirurgien. Il me raconte le cas dun jeune homme de 22 ans, venu consulter « avec sa mère ». Le garçon était déprimé, il la opéré. « Tout nest pas résolu pour lui, mais le mec est content ». Vraiment ?
Être un homme, cest renoncer
Cette question de ce qui « fait » lhomme, Belinda Cannone lexplore en creux dans le court essai quelle consacre à la « nature » des femmes, La Tentation de Pénélope. « La biologie nous confirme ce quaffirmait Simone de Beauvoir, quen matière de comportement on ne naît pas femme, on le devient. Si lon devient femme, cest que lhumain est un animal social et que la féminité est, comme la masculinité, une construction sociale. Notamment. Parce quil est nécessaire de parler aussi de la psyché, et de linconscient ». Quand je vois mes fils se bagarrer, ils ne le font pas à la manière des filles. Pourtant, à 7 et 9 ans ils portent les cheveux longs (trop : motif du divorce !) et je nai rien trouvé à redire lorsque laîné a demandé un aspirateur-jouet pour Noël (sinon que le truc ne lintéresse déjà plus et quil accumule la poussière ). Sérieusement mais tout cela est très sérieux, il y a des types qui se flinguent pour cela , quand la belle Belinda écrit, dans Libé : « Une femme peut jouir simplement au contact du corps aimé, sans caresses ni gestes », je réponds : oui, un homme aussi, mais cela sappelle léjaculation précoce. Des types qui se flinguent, Pavese en est un. Il a écrit Le Métier de vivre, il aurait pu lappeler « le métier dêtre un homme ».
Etre un homme, cest difficile. Ce qui ne veut pas dire quêtre une femme soit nécessairement plus facile, mais la question ici, pour commencer, est « un homme, cest quoi ? ». Eh bien, cest difficile. Prenez Blaise, 43 ans, en instance de divorce au moment où, sur lun des forums de psychologies. com, il écrit : « Ma femme ne ma pas pardonné de lui avoir fait un enfant. Pendant ces dernières années, je nai eu quune sexualité de solitaire. Cest déstabilisant et frustrant. Dernièrement, jai rencontré quelquun et ça sest plutôt mal passé : la panne totale. Jai beau me dire que les circonstances ny étaient pas, que ce nétait pas la bonne personne On ne peut sempêcher de penser quon est un gros nul. Cest dur ». Un gros nul. Son témoignage mévoque dautres situations Par exemple celle de Paul, 47 ans, qui raconte plus loin dans ce hors-série (p. 48) comment il a choisi lui de répondre à son désarroi en ayant recours à des call-girls. Ou celle de Tom, le père à la dérive du fulgurant roman de David Vann, Sukkwan Island, qui dit à son fils : « Lhomme nest que lappendice des femmes. Les femmes se satisfont à elles-mêmes et nont pas besoin des hommes. Mais les hommes, oui, ont besoin delles. Ce sont donc elles qui ont tout le pouvoir. Elles qui décident de ce qui doit être fait et comment. Et qui changent davis tout le temps. Nous navons rien à dire dans tout ça. » Je pourrais y ajouter le mien. Récemment divorcé, jai assisté au déménagement de mes enfants et de leur mère avec le désarroi du général devant son armée en déroute, du cultivateur après la grêle, du navigateur de haute mer sans boussole ni gouvernail. Et ce nest pas la première fois que jen fais lexpérience, la rupture déclenche un séisme tel que sinsinue le doute : suis-je seulement encore un homme ?
Être un homme, cest la bite
Mais cest quoi, être un homme ? « Lidentité masculine, cest la bite ! », sexclame le Dr Ronald Virag avec la certitude de sa profession. Virag est un andrologue français assez connu, notamment pour sa participation aux recherches ayant donné jour au petit losange bleu anagramme de son nom, le Viagra. Aujourdhui, il se concentre plutôt sur les implants péniens, quil pratique pour pallier les problèmes érectiles graves ou augmenter la taille des membres jugés inadéquats. En trente ans, il a suivi pas moins de quinze mille patients. Abondamment décoré de sculptures phalliques, petites et grandes, en ivoire ou en ébène, son cabinet sapparente à un musée de lérotisme masculin. « Celle-ci vient du Bénin : au moment où le garçon devient pubère on la plante devant sa case pour appeler la fertilité. Allez-y, touchez-la, nayez pas peur ! » Pour Virag, donc, le pénis cest lhomme, et inversement. « Je reçois des patients au bord du suicide parce que lon sest moqué deux dans les vestiaires ou à cause du commentaire imprudent dune femme au lit ». Sen suit le croquis dune intervention chirurgicale type : « On déshabille la verge, on fend lalbugine dans le sens de la longueur et lon fixe un patch veineux prélevé sur la cuisse ». Puis on recoud le tout. Jen frissonne. Entre ses mains le sexe du patient aura gagné en circonférence. « Mieux vaut lavoir grosse que longue », soutient le chirurgien. Il me raconte le cas dun jeune homme de 22 ans, venu consulter « avec sa mère ». Le garçon était déprimé, il la opéré. « Tout nest pas résolu pour lui, mais le mec est content ». Vraiment ?
Être un homme, cest renoncer
Cette question de ce qui « fait » lhomme, Belinda Cannone lexplore en creux dans le court essai quelle consacre à la « nature » des femmes, La Tentation de Pénélope. « La biologie nous confirme ce quaffirmait Simone de Beauvoir, quen matière de comportement on ne naît pas femme, on le devient. Si lon devient femme, cest que lhumain est un animal social et que la féminité est, comme la masculinité, une construction sociale. Notamment. Parce quil est nécessaire de parler aussi de la psyché, et de linconscient ». Quand je vois mes fils se bagarrer, ils ne le font pas à la manière des filles. Pourtant, à 7 et 9 ans ils portent les cheveux longs (trop : motif du divorce !) et je nai rien trouvé à redire lorsque laîné a demandé un aspirateur-jouet pour Noël (sinon que le truc ne lintéresse déjà plus et quil accumule la poussière ). Sérieusement mais tout cela est très sérieux, il y a des types qui se flinguent pour cela , quand la belle Belinda écrit, dans Libé : « Une femme peut jouir simplement au contact du corps aimé, sans caresses ni gestes », je réponds : oui, un homme aussi, mais cela sappelle léjaculation précoce. Des types qui se flinguent, Pavese en est un. Il a écrit Le Métier de vivre, il aurait pu lappeler « le métier dêtre un homme ».