La « tbourida » marocaine reconnue internationalement

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Vieille tradition guerrière datant du XIIIᵉ siècle, l'art équestre marocain->art43815] de [la « tbourida » a été intégrée au patrimoine culturel immatériel de l'Unesco.
Très populaire dans les campagnes, cette spectaculaire charge de cavalerie est associée aux festivités tant nationales que régionales. Chaque année, le salon du cheval d'El-Jadida offre aux milliers de spectateurs enthousiastes des spectacles grandioses.
Ainsi, après examen du dossier de candidature déposé en 2019, le comité d'évaluation des (...)

- Culture / Patrimoine, Unesco

La « tbourida » marocaine reconnue internationalement
 
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à oujda et toutes la région, c'est en aout je crois qu'elle se passe, je me souviens quand je voyais les cavaliers venir en solitaire chacun de son village ou ville qui avant formés des tribus ils étaient beau!!!! et la noblesse dans l'allure des chevaux :love:
 
Encore aujourd’hui, dans les pays du Maghreb, impossible d’échapper à la fascination qu’exerce la légendaire fantasia... Une tradition équestre qui met à l’honneur les races d'Afrique du Nord.


Un simulacre équestre de combat​


Vivant symbole d’une équitation ancestrale et spectaculaire, la fantasia reste auréolée de mystère. Elle se pratique traditionnellement sur des chevaux Barbes ou Arabes-Barbes.

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L’écrivain Jean-Louis Gouraud a consacré quelques pages à la fantasia dans son passionnant ouvrage « Petite géographie amoureuse du cheval ». Voici ce qu’il en dit, la rapprochant d’une autre tradition équestre d’inspiration guerrière : la djighitovka du Caucase.
 
« Le mot, d’abord. On ne sait pas très bien d’où il vient. Ce n’est pas, en tout cas, celui qu’utilisent ceux qui la pratiquent (de nos jours, au Maroc, on préfère le mot tbourida). Pour les auteurs d’un des rares livres consacrés à L’Art de la fantasia, « ce terme trouve vraisemblablement son origine dans un sabir utilisé en Afrique du Nord, à base de français, d’italien, d’espagnol et d’arabe ». Il serait intéressant de savoir, aussi, d’où vient le mot sabir – mais cela nous éloignerait de notre sujet.

Au moins le mot fantasia est-il bien choisi. Il évoque, en effet, quelque chose de joyeux, de festif, de fantaisiste- ce qui est tout à fait le cas de cette exhibition équestre, qui se joue sur une très courte distance (150 à 200 mètres suffisent) et consiste – en gros – à lancer son cheval, départ arrêté, à vive allure, à lui demander une accélération foudroyante, pour l’arrêter pile en bout de piste, au pied des spectateurs médusés.

On agrémente l’exercice de quelques gesticulations aussi spectaculaires et, depuis l’invention du fusil à poudre, aussi bruyantes que possible. Lorsqu’on est en groupe - une dizaine de cavaliers constitue déjà une belle sorba -, tout l’art consiste à faire « parler la poudre », comme on dit dans les westerns, d’une seule voix. Tous les cavaliers sont priés de décharger leurs pétoires simultanément. Mais il est des régions d’Afrique du Nord où l’on préfère le sabre au fusil. Il faut alors le faire tournoyer de la manière la plus acrobatique possible autour et au-dessus de soi.

Il existe toutes sortes de fantasias. Dans l’est de l’Algérie, elle se pratique individuellement, et offre alors l’occasion de montrer l’habileté du cavalier à manier le sabre, l’épée ou le fusil – parfois même les trois à la fois. Cela peut alors ressembler beaucoup à la djighitovka. Dans cette région, la monture utilisée est généralement une jument dont la croupe, par pudeur, peut-être ( ?), est recouverte d’un tissu aux couleurs chatoyantes qui descend jusqu’à mi-jarrets. Plus à l’ouest, les fantasias sont plutôt collectives, et on y utilise plutôt des chevaux mâles.

Dans une (excellente) biographie d’un des personnages les plus pittoresques du Second Empire, Edmond Jouhaud cite un témoin de ce qui fut, peut-être, la plus grande fantasia de tous les temps, organisée le 18 septembre 1860, à l’occasion de la visite de l’empereur Napoléon III en Algérie. Voici ce témoignage : "La vaste plaine qui s’étend sous les yeux des spectateurs est muette… Tout à coup débouche une caravane avec ses troupeaux et son escorte. Simulant l’attaque de cette caravane, des milliers de cavaliers (vous avez bien lu : des milliers – on a parfois dit dix mille ! ) se ruent sur elle et tournoyant au galop et en déchargeant leurs armes ; ces longs fusils plaqués d’argent ou de corail ; ces chevaux alertes carapaçonnés de housses de soie de couleurs variées ; ces hautes coiffures noires en plumes d’autruche – attribut des guerriers – couronnant la tête des plus braves ; ces femmes, du haut de leurs palanquins hissés sur des chameaux, simulant l’effroi et poussant des cris sauvages ; cette mise en scène, à la fois grandiose et bizarre, vrai décor d’opéra, décuplé cent fois par le nombre des acteurs, tout cela produisit sur l’esprit de Leurs Majestés un étonnement indicible ».
 
Jeu viril par excellence, la fantasia est réservée, naturellement, aux messieurs. Mais on commence à voir quelques équipes féminines percer, au Maroc en particulier, qui est aujourd’hui le pays arabe où la fantasia est la plus pratiquée, la plus encouragée et la plus codifiée. Des fantasias y sont régulièrement organisées, de nos jours encore, un peu partout dans le pays, en particulier à l’occasion des moussems, rassemblements festifs dont le prétexte est souvent la célébration du souvenir d’un saint local.
 
Si les pouvoirs publics encouragent – et encadrent – ces manifestations, ce n’est pas seulement pour mieux les contrôler. C’est aussi parce qu’elles permettent le maintien de traditions dont la vivacité constitue indéniablement un puissant attrait touristique, et surtout parce qu’elles fournissent un prétexte aux gens de la campagne pour continuer à élever des chevaux : de bons chevaux, capables de briller sous la selle de leurs cavaliers enturbannés. On a bien compris au Maroc que la seule vraie sauvegarde du cheval, c’est son utilisation. Le jour où l’on cessera d’organiser des fantasias, le cheval – barbe et arabe-barbe, en particulier – disparaîtra du paysage »
 
La première narration d’une grande fantasia au Maroc par un Occidental est celle que reproduit Louis Mercier en appendice à sa traduction de La Parure des cavaliers et l’insigne des preux, qui est un peu la bible de la spécialité. Il s’agit d’un gros traité de furusiya (par ce mot, il faut entendre l’ensemble des connaissances des Arabes en matière d’équitation, d’hippologie et d’hippiatrie), rédigé au 14ème siècle de notre ère par un certain Aly ben Abderrahman ben Hodeil el-Andalusy à la demande du sultan et roi de Grenade.

Publiée en 1924, cette traduction est accompagnée d’un important appareil critique, et notamment du récit que fit un certain James Rilley, capitaine d’un brigantin américain ayant fait naufrage en novembre 1815 au large de Mogador (aujourd’hui Essaouira), d’un rassemblement de « treize à quinze cents chevaux arabes, aussi légers que le vent et plein de feu », que l’on soumettait, par vagues de 100, à des charges de cavalerie qui ressemblent beaucoup – mais en plus grand – aux fantasias d’aujourd’hui.

Le témoin y vit une sorte de simulacre de bataille : « Une espèce de petite guerre au combat simulé ». Il y a de cela, en effet, confirme Louis Mercier. « Toute la conception de la guerre, écrit-il, toute la tactique du Bédouin, tient dans la formule el feerr ul ferr, la charge, et le repli brusque, la fuite simulée », dont la fantasia est une sorte de parodie, d’illustration ludique.
 
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