Ce serait bien de faire UN post pour regrouper tous les articles parlant des dégâts fait par l'armée israélienne dans Gaza...
En voici déjà un :
Gaza. Sous le béton, les corps des enfants morts
GAZA.Alors que le cessez-le-feu est précaire, la population, encore hébétée par la violence subie, compte ses disparus. Les reportages de notre envoyé spécial. Gaza ville (bande de Gaza), envoyé spécial. Gaza sest réveillée hier matin encore hébétée par trois semaines de bombardements intensifs et dincursions terrestres particulièrement meurtrières. Peut-être le bilan le plus lourd en Palestine depuis des décennies. Le centre-ville est devenu un triste décor de béton brisé, dimmeubles éventrés, de vitres éclatées. Le plus grand complexe policier de Gaza, Saraya, nest plus quun souvenir, comme la plupart des commissariats de la ville. « Ici ils nous ont donné une leçon de démocratie », explique mi-rieur miagacé Karim, un jeune Palestinien, en montrant ce qui reste du Parlement : des pans de murs écroulés, des grilles tordues, des routes denceinte défoncées. Si tout le monde nest pas complètement rassuré il suffit de voir ces regards vers le ciel, non en un geste miséricordieux mais au contraire pour surveiller le sale drone qui tourne de façon exaspérante depuis le milieu de la nuit il est tout de même étonnant de constater à quelle allure les Gazaouis retrouvent une « vie normale ». Une normalité qui se décline pour eux par des conditions de vie quon noserait pas infliger à son pire ennemi.
CET ÉTAT PALESTINIEN QUI NE VOIT TOUJOURS PAS LE JOUR
La ville de Gaza ne possède pas découlement des eaux usées. Lorsquil pleut ce qui était le cas ces derniers jours de petits lacs se forment au beau milieu des rues. Lorsquon monte sur une terrasse pas trop ébranlée par les secousses militaires israéliennes, on a devant soi non pas la vie mais la grisaille des parpaings de ces maisons jamais peintes et jamais terminées. Limage même de cet État palestinien qui ne voit toujours pas le jour. Le cessez-le-feu est fragile. Les avions F-16, qui survolaient hier encore la ville à très basse altitude, se sont chargés de le souligner. Les quelques tirs de roquettes depuis le sol palestinien également. Les chars israéliens sont toujours en position près des frontières de la bande de Gaza, dont la continuité nord-sud est encore précaire. Élément nouveau révélé par le Parti du peuple palestinien (PPP, communiste, membre de lOLP) : lensemble des organisations palestiniennes se sont réunies à Gaza, Fatah et Hamas compris. Elles ont décidé daccepter le cessez-le-feu mais donnent une semaine à Israël pour se retirer définitivement. Pour arriver jusquà Gaza ville depuis Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, il a fallu ruser, passer en contrebande le check point installé par les militaires israéliens au niveau de leur ancienne colonie, à Netzarim, prendre les chemins de traverse devenus incontournables, la route principale ayant été soit détruite soit obstruée par des amoncellements de sable. À certains endroits, dans la pénombre, on aperçoit dailleurs des chars, prêts à tirer. Enfin cest larrivée dans la ville de Gaza meurtrie. Si le centre-ville a été fortement touché, les quartiers périphériques, en fait des faubourgs agricoles et des zones semi-industrielles, ont payé un lourd tribut à linvasion israélienne. Cest le cas de celui de Zeïtoun, à lest. Tout ce qui, de près ou de loin, ressemblait à une usine, a été visé. Tout et nimporte quoi puisque pour les Israéliens « usine palestinienne » signifie lieu de fabrication de roquettes ! Une usine de pièces détachées ? On frappe ! Une entreprise de mise en bouteilles de soda ? On frappe ! Comme sils avaient des détecteurs spéciaux qui se mettaient à siffler lorsquils repèrent du métal. Alors que nous avançons toujours plus avant dans Zeïtoun, la chaussée est de plus en plus obstruée par des tas de terre, des camions renversés. Les murs des maisons le long de cette voie sont criblés de balles de gros calibres. Un haut-parleur se met soudain à hurler et la centaine de personnes qui se trouvaient là se met à refluer. « On nous dit dévacuer parce que les chars israéliens reviennent », expliquent en soufflant un vieil homme, Abou Ahmed, le keffieh noué autour de la tête. « Jai vu un char de loin. » Effectivement, sur la gauche, en lisière dune petite colline, on aperçoit un de ces véhicules à chenille en train de rouler. Il est assez loin, mais la panique qui sest emparée de la foule en dit long sur la violence subie ces dernières semaines. On comprend mieux la volonté israélienne décarter les journalistes, dempêcher la publication de ce qui a été perpétré ici. En refluant, un groupe de femmes crient à notre adresse : « Allez voir comment ils nous ont massacrées ! Allez voir à lintérieur ». Abou Ahmed surenchérit : « Ils ont détruit toute ma ferme, coupé mes arbres, tué mes moutons. On continue à trouver des corps un peu partout. »
LE CORPS DUN ENFANT PORTÉ À BOUT DE BRAS
Au milieu dun groupe de maisons très abîmées, un amas de béton de ce qui a été une habitation. Des hommes sont à la peine pour tenter de déblayer les gravats, dextraire des corps totalement enfouis. La colère et lémotion sont palpables. Soudain quelquun crie « Allah Akbar ! » (Dieu est grand). Un cadavre est retiré tant bien que mal. Lodeur est intenable. Lhorreur revient quelques minutes après. Cette fois cest le corps dun enfant qui est porté à bout de bras par les secouristes. Ils veulent quon voie ce petit corps sans vie, les boyaux à lair, la tête défoncée. Cest là que se trouvait la famille Samouni, dont on a beaucoup parlé. Lun des rescapés, Salah Talal, blessé à la tête, raconte : « Larmée israélienne nous a tous regroupés dans cette maison parce quelle sinstallait dans celles qui étaient autour. Nous étions 110. Comme ils nous avaient laissés sans eau et sans nourriture, on est sortis pour prendre du bois pour faire du feu et confectionner du pain. Cest alors quils ont fait feu. Une première bombe est tombée. Cinq personnes ont été tuées. Cest là que jai été blessé. Puis un deuxième missile sest abattu, en tuant 22 autres. » Alors quil finit son récit, des cris retentissent à nouveau. On voit passer quatre hommes portant à nouveau un mort dans un linceul de plastique. On le place dans lambulance. On lemporte. Plus besoin de sirène. Il ne reste que les larmes de la peine et de la rage.
Pierre Barbancey
source :humanite.fr
En voici déjà un :
Gaza. Sous le béton, les corps des enfants morts
GAZA.Alors que le cessez-le-feu est précaire, la population, encore hébétée par la violence subie, compte ses disparus. Les reportages de notre envoyé spécial. Gaza ville (bande de Gaza), envoyé spécial. Gaza sest réveillée hier matin encore hébétée par trois semaines de bombardements intensifs et dincursions terrestres particulièrement meurtrières. Peut-être le bilan le plus lourd en Palestine depuis des décennies. Le centre-ville est devenu un triste décor de béton brisé, dimmeubles éventrés, de vitres éclatées. Le plus grand complexe policier de Gaza, Saraya, nest plus quun souvenir, comme la plupart des commissariats de la ville. « Ici ils nous ont donné une leçon de démocratie », explique mi-rieur miagacé Karim, un jeune Palestinien, en montrant ce qui reste du Parlement : des pans de murs écroulés, des grilles tordues, des routes denceinte défoncées. Si tout le monde nest pas complètement rassuré il suffit de voir ces regards vers le ciel, non en un geste miséricordieux mais au contraire pour surveiller le sale drone qui tourne de façon exaspérante depuis le milieu de la nuit il est tout de même étonnant de constater à quelle allure les Gazaouis retrouvent une « vie normale ». Une normalité qui se décline pour eux par des conditions de vie quon noserait pas infliger à son pire ennemi.
CET ÉTAT PALESTINIEN QUI NE VOIT TOUJOURS PAS LE JOUR
La ville de Gaza ne possède pas découlement des eaux usées. Lorsquil pleut ce qui était le cas ces derniers jours de petits lacs se forment au beau milieu des rues. Lorsquon monte sur une terrasse pas trop ébranlée par les secousses militaires israéliennes, on a devant soi non pas la vie mais la grisaille des parpaings de ces maisons jamais peintes et jamais terminées. Limage même de cet État palestinien qui ne voit toujours pas le jour. Le cessez-le-feu est fragile. Les avions F-16, qui survolaient hier encore la ville à très basse altitude, se sont chargés de le souligner. Les quelques tirs de roquettes depuis le sol palestinien également. Les chars israéliens sont toujours en position près des frontières de la bande de Gaza, dont la continuité nord-sud est encore précaire. Élément nouveau révélé par le Parti du peuple palestinien (PPP, communiste, membre de lOLP) : lensemble des organisations palestiniennes se sont réunies à Gaza, Fatah et Hamas compris. Elles ont décidé daccepter le cessez-le-feu mais donnent une semaine à Israël pour se retirer définitivement. Pour arriver jusquà Gaza ville depuis Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, il a fallu ruser, passer en contrebande le check point installé par les militaires israéliens au niveau de leur ancienne colonie, à Netzarim, prendre les chemins de traverse devenus incontournables, la route principale ayant été soit détruite soit obstruée par des amoncellements de sable. À certains endroits, dans la pénombre, on aperçoit dailleurs des chars, prêts à tirer. Enfin cest larrivée dans la ville de Gaza meurtrie. Si le centre-ville a été fortement touché, les quartiers périphériques, en fait des faubourgs agricoles et des zones semi-industrielles, ont payé un lourd tribut à linvasion israélienne. Cest le cas de celui de Zeïtoun, à lest. Tout ce qui, de près ou de loin, ressemblait à une usine, a été visé. Tout et nimporte quoi puisque pour les Israéliens « usine palestinienne » signifie lieu de fabrication de roquettes ! Une usine de pièces détachées ? On frappe ! Une entreprise de mise en bouteilles de soda ? On frappe ! Comme sils avaient des détecteurs spéciaux qui se mettaient à siffler lorsquils repèrent du métal. Alors que nous avançons toujours plus avant dans Zeïtoun, la chaussée est de plus en plus obstruée par des tas de terre, des camions renversés. Les murs des maisons le long de cette voie sont criblés de balles de gros calibres. Un haut-parleur se met soudain à hurler et la centaine de personnes qui se trouvaient là se met à refluer. « On nous dit dévacuer parce que les chars israéliens reviennent », expliquent en soufflant un vieil homme, Abou Ahmed, le keffieh noué autour de la tête. « Jai vu un char de loin. » Effectivement, sur la gauche, en lisière dune petite colline, on aperçoit un de ces véhicules à chenille en train de rouler. Il est assez loin, mais la panique qui sest emparée de la foule en dit long sur la violence subie ces dernières semaines. On comprend mieux la volonté israélienne décarter les journalistes, dempêcher la publication de ce qui a été perpétré ici. En refluant, un groupe de femmes crient à notre adresse : « Allez voir comment ils nous ont massacrées ! Allez voir à lintérieur ». Abou Ahmed surenchérit : « Ils ont détruit toute ma ferme, coupé mes arbres, tué mes moutons. On continue à trouver des corps un peu partout. »
LE CORPS DUN ENFANT PORTÉ À BOUT DE BRAS
Au milieu dun groupe de maisons très abîmées, un amas de béton de ce qui a été une habitation. Des hommes sont à la peine pour tenter de déblayer les gravats, dextraire des corps totalement enfouis. La colère et lémotion sont palpables. Soudain quelquun crie « Allah Akbar ! » (Dieu est grand). Un cadavre est retiré tant bien que mal. Lodeur est intenable. Lhorreur revient quelques minutes après. Cette fois cest le corps dun enfant qui est porté à bout de bras par les secouristes. Ils veulent quon voie ce petit corps sans vie, les boyaux à lair, la tête défoncée. Cest là que se trouvait la famille Samouni, dont on a beaucoup parlé. Lun des rescapés, Salah Talal, blessé à la tête, raconte : « Larmée israélienne nous a tous regroupés dans cette maison parce quelle sinstallait dans celles qui étaient autour. Nous étions 110. Comme ils nous avaient laissés sans eau et sans nourriture, on est sortis pour prendre du bois pour faire du feu et confectionner du pain. Cest alors quils ont fait feu. Une première bombe est tombée. Cinq personnes ont été tuées. Cest là que jai été blessé. Puis un deuxième missile sest abattu, en tuant 22 autres. » Alors quil finit son récit, des cris retentissent à nouveau. On voit passer quatre hommes portant à nouveau un mort dans un linceul de plastique. On le place dans lambulance. On lemporte. Plus besoin de sirène. Il ne reste que les larmes de la peine et de la rage.
Pierre Barbancey
source :humanite.fr