Les professeurs des écoles français sont sous-payés, selon l'ocde

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LE MONDE | 09.09.2014 à 11h09 • Mis à jour le 09.09.2014 à 11h57 | Par Maryline Baumard

Dix euros de plus ou de moins. Sa feuille de paye n'est jamais tout à fait la même. Pourtant, le montant affiché reste toujours sous la barre des 2 100 euros. Comme bloqué. « Après douze ans de métier, ce n'est pas beaucoup… », regrette Régis Forgione, professeur des écoles à Freyming-Merlebach (Moselle). Sa passion et son engagement n'y changent rien. Les innovations numériques qu'il met en place dans sa classe non plus.
En France, on croyait le salaire des enseignants proportionnel à leur ancienneté. Il est aussi proportionnel… à l'âge des élèves. L'OCDE, dans son panorama annuel, Regards sur l'éducation, paru mardi 9 septembre, a mis au jour cette loi étrange qui veut qu'un maître du primaire gagne 30 % de moins qu'un professeur de lycée.

Lire aussi : Le salaire des enseignants français à la loupe

« Pour la première fois, nous avons pu disposer des documents pour établir nos statistiques sur le salaire réel des professeurs, c'est-à-dire la somme inscrite au bas des feuilles de paye, indique Eric Charbonnier, expert à l'OCDE. Depuis des années, nous sommes conscients que les salaires “statutaires” théoriques que nous utilisions précédemment dans nos statistiques masquaient un écart conséquent entre le revenu réel du professeur des écoles et celui du professeur de lycée. Seule la prise en compte des heures supplémentaires et des primes permet une comparaison plus fine. »

Lorsque l'organisation internationale s'arrêtait à une comparaison des barèmes, l'écart entre ces deux niveaux d'enseignement n'était en effet que de 10 %.

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Les enseignants français sont moins bien payés que leurs collègues de l'OCDE. | DR

Cette fois, l'organisme international, qui s'appuie sur des données de 2012, a introduit dans son calcul les primes perçues pour le logement, la prime de suivi et d'orientation des élèves (ISOE), les heures supplémentaires, en intégrant le salaire des agrégés, autrefois exclus. Or, dans le primaire, les heures supplémentaires sont très rares, quand dans le second degré elles concernent plus de la moitié des enseignants et permettent de majorer de façon importante le traitement des fonctionnaires, surtout en lycée.

Ainsi calculé, le salaire moyen net mensuel d'un professeur des écoles est de 2 596 euros ; celui d'un professeur de lycée, de 3 389 euros (quel que soit l'âge de l'enseignant). Cette différence puise ses racines dans le passé. « Sous Jules Ferry, un professeur de collège gagnait trois fois plus qu'un instituteur en début de carrière, et deux fois plus en fin de carrière. Un agrégé huit fois plus en début de carrière, et six fois plus en fin de carrière que le maître d'école », rappelle l'historien Claude Lelièvre.

L'INSTITUTEUR GAGNE 54 % DE MOINS QUE SON VOISIN ALLEMAND

Lionel Jospin avait tenté de combler le fossé en 1989 alors qu'il était ministre de l'éducation. En transformant les instituteurs en professeurs des écoles, il a permis un pas en ce sens. Mais, aujourd'hui, la différence réside dans les compléments de salaire. Poursuivant dans la même direction, Vincent Peillon a, lors de son passage Rue de Grenelle, octroyé aux 323 000 maîtres d'école une prime à hauteur d'un tiers du montant de la prime second degré. Pas suffisant pour rééquilibrer les deux visages du métier d'enseignant.

Cette nouvelle manière qu'a l'OCDE d'ausculter le salaire des profs déplace quand même l'enseignant français dans la grille des comparaisons internationales. Auparavant, tous les enseignants français semblaient très mal payés. Cette fois, les calculs montrent que « le salaire moyen des professeurs des écoles français est de 17 % inférieur à la moyenne des pays de l'OCDE alors que celui des professeurs de collège se situe 3 % en dessous et celui des professeurs de lycée 2 % en dessous de cette moyenne », relève Eric Charbonnier.

L'instituteur hexagonal reste donc sous-payé quand le professeur de lycée gagne comme ses voisins. Son salaire se situe en effet dans la moyenne des 34 pays de l'OCDE. Il gagne néanmoins 14 % de moins que l'enseignant finlandais ou américain, 28 % qu'un Néerlandais et pire : 54 % de moins que son voisin allemand…

« CELA NE M'EMPÊCHE PAS D'AIMER MON MÉTIER »

Régis Forgione, dont l'école jouxte la frontière, est conscient que, de l'autre côté du Rhin, un professeur des écoles avec la même ancienneté que lui gagne bien plus. « Ces comparaisons ne m'empêchent pas d'aimer mon métier », remarque ce passionné, « mais elles peuvent en dissuader quelques-uns de passer les concours », estime-t-il. D'autant qu'il faut désormais un niveau bac + 5 pour être enseignant, en primaire ou dans le secondaire.

Poussant plus loin l'analyse, l'OCDE a comparé le salaire enseignant avec ce que ces diplômés gagneraient s'ils avaient opté pour une autre carrière. L'instituteur est encore le grand perdant. En France, il gagne 72 % de ce qu'il pourrait escompter avec son niveau de diplôme s'il travaillait ailleurs que dans l'éducation nationale. Au collège, un professeur français gagne 86 % du salaire de ses camarades d'université. Et au lycée, 95 %.

On aurait tort de se réjouir que moins payer les enseignants permet d'économiser de l'argent public. Sans corréler directement les deux indicateurs, l'organisation internationale note que « les systèmes performants sont aussi ceux qui offrent des salaires élevés à leurs enseignants, surtout dans les pays au niveau de vie élevé ».

  • Maryline Baumard
    Journaliste au Monde Les autres leçons du rapport
    Diplômes

    Selon le panorama annuel de l’OCDE, « Regards sur l’éducation », la France est de plus en plus diplômée : 43 % des 25-34 ans ont un diplôme post-bac, contre 20 % des 55-64 ans. 40 % des 25-34 ans ont un niveau de formation supérieur à leurs parents, contre 32 % en moyenne dans l’OCDE. En revanche, 10 % des jeunes ont un niveau inférieur à leurs parents.

    Budget

    Les pays de l’OCDE consacrent 6,1 % de leur PIB à l’éducation, la France 6 %. Les Etats-Unis, la Norvège ou Israël y consacrent 7 %. La France dépense 20 % de plus que la moyenne OCDE pour ses collégiens et lycéens ; et 20 % de moins pour ses élèves de primaire.

    Enseignement privé

    En France comme ailleurs, le poids du privé augmente dans l’enseignement supérieur. 20 % des étudiants y sont inscrits en 2012, contre 16 % en 2003.

http://www.lemonde.fr/ecole-primair...ye-au-lycee-qu-a-l-ecole_4484274_1473688.html
 
Y'a une erreur dans l'intitulé du graphe, ce sont des revenus annuels bruts et non des revenus annuels net. M'étonnerait que les profs du lycée soient payés 40000 euros net par an en moyenne (ça fait 3333 euros nets par mois!)
 
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