Salam Sinear
Dire que la democratie est compatible avec l Islam ( ce qqui est juste d'ailleurs) laisse penser qu'elle puisse être étrangère à l'Islam. Hors mon propos va encore plus loin... je pense que que c'est grâce à l'Islam que le monde arabe a connu la democratie avec les 4 califats. Mais bon... on en parlera plus tard.
Salam. Merci pour ton intervention
Parler dintroduction de la démocratie par le règne des premiers califes, revient à tronquer lintention sous-jacente à linstauration du Califat par rapport à celle recherchée par les fondateurs.
Le concept même de démocratie était inexistant à lépoque, et donc non référable aux desseins qui ont été ceux des premiers musulmans dans le choix du Califat. Comme jai expliqué, celui-ci sest imposé dans un débat parce que les musulmans dalors, en labsence de toute structure étatique organisée, ont vu la continuation du modèle de société du Prophète à Médine comme le meilleur moyen, dans ces conditions où ils se trouvaient alors, de perpétuer son uvre et de répondre à ses intentions. Il sagit dun choix basé sur une interprétation compréhensible selon les conditions de lépoque. On ne peut transposer à travers lhistoire les critères de démocratie pour y associer les intentions originelles des fondateurs du Califat, qui étaient dabord religieuses.
Si par contre tu te réfères aux incontestables progrès civiques et juridiques apportés par la société califale dalors, là je te rejoins tout à fait. Mais en attirant ton attention que cette appréciation ne vaut que sur base dune comparaison par rapport à ce qui existait avant le Califat (société tribale, désorganisée, conflictuelle et désunie), et non de manière absolue. Cest la mise en perspective historique qui illustre, comme pour toute institution humaine, la qualité du Califat, dont les bienfaits étaient prononcés, certes, mais en rapport aux situations qui le précédaient. Ce constat nimpose pas dès lors de lériger en doctrine à suivre pour tous les contextes.
Il existe pourtant plusieurs versets du coran qui incitent les musulmans à gouverner avec le coran:
Sourate 5, verset 44.(
)
" " verset 45 " " verset 47(
.). Il y en a tant d'autres ainsi que des hadiths aussi qui confirment l'implication dans l Islam dans le politique.
Ces versets ont une portée morale, ils invitent à adhérer aux valeurs de justice, déquité et de tolérance chers au Coran et venant de Dieu, dans une société ou nexistaient aucune loi autre que les codes tribaux. Leur prêter une valeur dobligation de juger selon le Coran est une interprétation retenue par beaucoup de traditionalistes, je te laccorde, mais qui diverge de celle dautres musulmans qui ny voient pas un appel intemporel à prendre le Coran comme seule source de loi et à en faire un code juridique contraignant.
Il sagit certes dun débat dopinion, et perso je me range du côté de ceux qui estiment quune loi humaine peut parfaitement sinspirer dune éthique religieuse, compte tenu des circonstances de chaque époque, sans devoir nécessairement se référer à elle de manière « figée ». Le droit européen en est lexemple. Il intègre un héritage juridico-légal chrétien, auquel il ne fait plus aujourdhui de référence explicite, ce qui nempêche pas aux valeurs éthiques sous-tendant la plupart des textes constitutifs, den porter une influence marquée. Dès lors, gouverner selon les valeurs que Dieu nous donne, nimpose pas forcément de ne le faire quà travers un pouvoir religieux.
Dautre part, pour notre question ici, tu remarqueras que ces versets ne disent rien sur le type dorganisation politique idéal que doit recouvrir une société. Comme jai dit, le Coran est muet sur cette question, en laissant lappréciation à lhomme. Le Prophète lui-même na jamais donné dinjonction quant à sa succession. Le Coran contient dautre part un grand nombre de versets qui rappellent le statut de simple messager du Prophète, non son pouvoir politique, et il est important de sen rappeler quand on veut associer à tort religion et politique:
- « Tu nes quun messager » (Sourate «la famille dImram », verset 20)
- « Sache que tu nas quune seule mission, transmettre clairement ton message » (Labeille, v. 82)
- « Tu nas dautre mission que davertir » (Les anges, v. 23)
- « Ta mission nest pas de les contraindre à la foi » (Jonas, v. 99)
- « Je ne puis moi, répondre de votre salut » (Jonas, v. 108)
- « Rappelle ! Tu nes là que pour rappeler la parole de Dieu ! Tu nas nulle autorité contraignante à exercer sur eux » (Lépreuve universelle, v. 21-22)
Ces versets non exhaustifs, loin sen faut - sont éloquents sur le rôle de simple messager du Prophète, et excluent celui-ci de toute fonction de commandement ni de guidance autre que la transmission dune spiritualité.
A la base, il faut comprendre que limplication de lIslam dans la politique est bien moins le fait du Coran que des conditions historiques particulières dans lesquelles sest exercée la constitution et le développement des sociétés islamiques. Ces conditions ont été constituées par labsence détat, la non-existence dun corpus central de lois, la désunion des tribus et lutilisation de la nouvelle religion en tant que moyen et finalité de la constitution dune civilisation organisée. Les Ulémas se sont appropriés le rôle dédification des lois et lont conservé, laissant au pouvoir politique le soin de les appliquer et celui de la conduite des affaires militaires. Cette tradition sest ensuite ancrée dans les consciences collectives au point de sy imposer, mais a fait oublier quà la base elle résultait dun choix purement humain.
C'est une précision fort importante à mon sens même si nos points de vue se rejoignent plus tard sur la methode de la gouverance. Celle-ci peut être réformée ce qui était alors bon pour le 8, 10 ou 14 siecle ne serait plus valable aujourd hui et c est dans ce sens là qu'on peut dire que l'on doit s'adapter .
Cest mon point de vue également.
Le message du coran est clair et immuable mais c'est à l homme dans son perpetuel chagement qu il doit lui donner à chaque époque une lecture appropriée à son époque sans pour autant en perdre ni sa substance ni son essence.
Le Coran contient de léternel et du circonstanciel. Son immuabilité se situe avant tout au niveau de son esprit, de son éthique, de sa nature spirituelle éternelle. Distinguer les deux évite de la dénaturer et de verser dans du fondamentalisme. LIjtihad contemporain repose sur les bases de cette distinction et ne juge pas nécessaire de sacraliser la lettre de certaines injonctions qui sont circonstanciées aux conditions en vigueur à lépoque (châtiments corporels, rapport aux esclaves,
).
Dans à l'historique que tu mentionnes de l Histoire politique musulmane, tu as donné exemple de la période post-islamique!! Un état fort avec un pouvoir central politique économique et social s'est bien constitué avec les 4 khalif voir 5 en comptant Omar ibn abdel aziz, (houroub al rida, pour restituer l'argent des impots zakkat aux pauvres, constitutions des capitales politiques, des bibliotheques publiques, des aides financières aux pauvres...) que de symboles d'états non?? sauf si la notion d'état n'est valable que lorsqu'elle correspond à la cité d'aristote lol
Un état nest pas forcément religieux

. Les mêmes bienfaits que tu décris peuvent tout aussi bien saccomplir sans un pouvoir théocratique. Létat a bien existé dans cette période, évidemment, personne ne le nie, mais ce que je veux dire est que sa connotation religieuse a été le fruit des circonstances. Il est apparu à partir dun vide étatique, il ne sest substitué à aucun autre état et sest fait par et pour lIslam. Je te renvoie à ce que jai écrit plus haut quant aux particularités de lhistoire islamique, quil importe de mettre en exergue pour couper ce lien idéalisé entre état et religion, qui na été érigé en évidence dans la conscience islamique que par les conditions de son histoire.
(suite ci-après

).