Bonsoir,
Je partage cet article que je valide complètement et qui, je trouve, met l'accent sur ce qu'est la philosophie même dans son point de départ, à savoir: l'art de vivre.
Au passage je ne peux que vous conseiller philosophie magasine pour ceux que ça intéresse. C'est assez riche et accessible dans le domaine. Parfois un article comme celui-ci nous permet de nous imprégner de la pensée de son auteur et ce qui va avec de manière succincte et efficaceme sans pour autant passer des semaines, des mois à lire un ou plusieurs ouvrages. Une synthèse en quelque sorte. Voir un échantillon.
Sans transition place au texte:
Hors-série "La Renaissance"
« Sujet merveilleusement vain, divers et ondoyant », l’homme n’a de cesse d’intriguer Montaigne. Or « chaque homme porte la forme entière de l’humaine condition » — et quoi de plus proche de soi que soi ? La tâche constante de l’auteur des Essais sera donc de capter le cours fugace de ses pensées et de ses sensations. De cette expérience de soi émerge la figure d’un homme singulier et changeant.
« Comme dit Pline, chacun est pour soi-même un très bon sujet d’étude, pourvu qu’il soit capable de s’examiner de près. Ce que je rapporte ici, ce n’est pas ce que je crois, mais ce que j’ai éprouvé ; ce n’est pas la leçon d’autrui, mais la mienne.
Il ne faut pourtant pas m’en vouloir si je la fais connaître. Car ce qui m’est utile peut aussi être utile aux autres, à l’occasion. Et de toutes façons, je ne fais de tort à personne, puisque je me sers seulement de ce qui m’appartient. Et si je dis des sottises, c’est à mes dépens, et sans dommage pour quiconque : c’est une divagation qui mourra avec moi, et sera sans conséquences. […] C’est une délicate entreprise, et plus encore qu’il n’y paraît, que de suivre une allure aussi vagabonde que celle de notre esprit, de pénétrer les profondeurs opaques de ses replis internes, de distinguer et de saisir au vol tant de menues apparences dans son agitation. Et c’est un passe-temps nouveau et extraordinaire, qui nous arrache aux occupations communes de ce monde, et même aux plus importantes d’entre elles.
Il y a plusieurs années que je suis moi-même le seul objet de mes pensées, que je n’examine et n’étudie que moi. Et si je m’intéresse à autre chose, c’est pour l’appliquer aussitôt à moi-même, le faire en quelque sorte entrer en moi. […] Il n’est rien d’aussi difficile à décrire que soi-même, ni de plus utile, pourtant. Mais encore faut-il se coiffer, encore faut-il s’apprêter et s’arranger avant de se montrer en public. Je me prépare donc sans cesse, puisque je me décris sans cesse. […]
Mon métier et mon art, c’est de vivre. Que celui qui me défend d’en parler selon l’idée, l’expérience et la pratique que j’en ai, ordonne à l’architecte de parler des bâtiments non pas selon ses conceptions, mais selon celles de son voisin, selon la science d’un autre et non selon la sienne ! […]
Je m’expose au contraire tout entier, comme un “écorché’’ sur lequel on verrait d’un seul coup d’œil les veines, les muscles, les tendons, chacun à sa place. […] Ce ne sont pas mes actes que je décris : c’est moi, c’est mon essence même. »
Montaigne, Essais, II, VI, 23-29, G. de Pernon (édition en ligne), pp. 68-70.
www.philomag.com
Je partage cet article que je valide complètement et qui, je trouve, met l'accent sur ce qu'est la philosophie même dans son point de départ, à savoir: l'art de vivre.
Au passage je ne peux que vous conseiller philosophie magasine pour ceux que ça intéresse. C'est assez riche et accessible dans le domaine. Parfois un article comme celui-ci nous permet de nous imprégner de la pensée de son auteur et ce qui va avec de manière succincte et efficaceme sans pour autant passer des semaines, des mois à lire un ou plusieurs ouvrages. Une synthèse en quelque sorte. Voir un échantillon.
Sans transition place au texte:
Hors-série "La Renaissance"
Michel de Montaigne : "Un passe-temps nouveau et extraordinaire"
« Sujet merveilleusement vain, divers et ondoyant », l’homme n’a de cesse d’intriguer Montaigne. Or « chaque homme porte la forme entière de l’humaine condition » — et quoi de plus proche de soi que soi ? La tâche constante de l’auteur des Essais sera donc de capter le cours fugace de ses pensées et de ses sensations. De cette expérience de soi émerge la figure d’un homme singulier et changeant.
« Comme dit Pline, chacun est pour soi-même un très bon sujet d’étude, pourvu qu’il soit capable de s’examiner de près. Ce que je rapporte ici, ce n’est pas ce que je crois, mais ce que j’ai éprouvé ; ce n’est pas la leçon d’autrui, mais la mienne.
Il ne faut pourtant pas m’en vouloir si je la fais connaître. Car ce qui m’est utile peut aussi être utile aux autres, à l’occasion. Et de toutes façons, je ne fais de tort à personne, puisque je me sers seulement de ce qui m’appartient. Et si je dis des sottises, c’est à mes dépens, et sans dommage pour quiconque : c’est une divagation qui mourra avec moi, et sera sans conséquences. […] C’est une délicate entreprise, et plus encore qu’il n’y paraît, que de suivre une allure aussi vagabonde que celle de notre esprit, de pénétrer les profondeurs opaques de ses replis internes, de distinguer et de saisir au vol tant de menues apparences dans son agitation. Et c’est un passe-temps nouveau et extraordinaire, qui nous arrache aux occupations communes de ce monde, et même aux plus importantes d’entre elles.
Il y a plusieurs années que je suis moi-même le seul objet de mes pensées, que je n’examine et n’étudie que moi. Et si je m’intéresse à autre chose, c’est pour l’appliquer aussitôt à moi-même, le faire en quelque sorte entrer en moi. […] Il n’est rien d’aussi difficile à décrire que soi-même, ni de plus utile, pourtant. Mais encore faut-il se coiffer, encore faut-il s’apprêter et s’arranger avant de se montrer en public. Je me prépare donc sans cesse, puisque je me décris sans cesse. […]
Mon métier et mon art, c’est de vivre. Que celui qui me défend d’en parler selon l’idée, l’expérience et la pratique que j’en ai, ordonne à l’architecte de parler des bâtiments non pas selon ses conceptions, mais selon celles de son voisin, selon la science d’un autre et non selon la sienne ! […]
Je m’expose au contraire tout entier, comme un “écorché’’ sur lequel on verrait d’un seul coup d’œil les veines, les muscles, les tendons, chacun à sa place. […] Ce ne sont pas mes actes que je décris : c’est moi, c’est mon essence même. »
Montaigne, Essais, II, VI, 23-29, G. de Pernon (édition en ligne), pp. 68-70.

Michel de Montaigne : "Un passe-temps nouveau et extraordinaire"
« Sujet merveilleusement vain, divers et ondoyant », l’homme n’a de cesse d’intriguer Montaigne. Or « chaque homme porte la forme entière de l’humaine…
