Pourquoi les journalistes payent moins d'impôt

Pourquoi les journalistes payent moins d'impôt


La chasse aux niches fiscales est à la mode. Le projet socialiste pour 2012 propose d'annuler 50 milliards sur les 70 milliards de «dépenses fiscales inutiles» créées depuis 2002. Au chapitre des «dépenses fiscales inutiles» ou au moins injustes, le PS pourrait également citer une mesure prise par le gouvernement Jospin, l'allocation pour frais d'emploi des journalistes, une niche fiscale qu'avait fait sauter Alain Juppé et que la gauche a rétabli quelques années plus tard sous une forme légèrement allégée.

Depuis 1999, les journalistes sont autorisés à retrancher 7.650 euros de leur salaire imposable, au nom des frais professionnels non remboursés par leur employeurs. Un avantage fiscal conséquent. Prenons l'exemple d'un journaliste célibataire gagnant 2.500 euros par mois. Sans cet avantage fiscal, il payerait 2.534 euros d'impôt sur le revenu. Avec, il ne paye que 1.477 euros.

Les ouvriers du cartonnage de la région de Nantua

Cette niche fiscale a été créée en 1934. Le journalisme faisait partie d'une liste délicieusement surannée de 110 professions qui étaient supposées avoir des frais professionnels (transport, nourriture, matériel...) plus importants que la moyenne. En France, tous les salariés sont exonérés de 10% de leur revenu au nom de ces frais professionnels. Pour 30.000 euros gagnés, on n'en déclare en fait que 27.000.

Ces 110 professions bénéficiaient d'un coup de pouce supplémentaire, de 5% pour les ouvriers du cartonnage de la région de Nantua à 40% pour les tisseurs non propriétaires de leur métier de l'Ain, de l'Ardèche, de la Drôme, du Gard, de la Haute-Loire, de la Haute-Savoie, de l'Isère, de la Loire, du Puy-de-Dôme, du Rhône, de la Savoie, de la Saône-et-Loire et du Vaucluse. Au milieu de cet inventaire à la Pernaut, les journalistes bénéficiaient d'une déduction supplémentaire de 30%.

En 1996, au nom d'une vaste réforme sur l'impôt sur le revenu, le gouvernement Juppé tire un trait sur toutes ces niches fiscales, «devenues sans rapport avec la réalite des frais professionnels supportés par les interéssés et qui ont donc perdu toute justification». Une profession va particulièrement se plaindre, les journalistes. Une manifestation réunissant 2.000 personnes parcourt alors les rues de Paris. Une dizaine de titres de la presse quotidienne régionale lancent une opération «homme invisible», un boycott photographique des parlementaires favorables à la suppression de la niche.

On découvre à cette occasion que les journalistes ont nettement plus de moyens de pression que les ouvriers du cartonnage de la région de Nantua. «Le souvenir que j'en conserve est moins la hargne des journalistes que la trouille des politiques», raconte Alain Lambert, ex-rapporteur du budget au Sénat.

«La profession s'est mobilisée»

suite : http://www.slate.fr/story/43075/pourquoi-journalistes-payent-moins-impot
 
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