Suite de l excellent article de Amnesty International
VAGUES D’ARRESTATIONS
Plusieurs centaines de personnes ont été incarcérées dans des camps des Forces centrales de sécurité, où elles n’ont accès ni à des avocats ni à leurs proches. Certaines ont par la suite été relâchées, mais au moins 274 d’entre elles ont été conduites devant le service du procureur général de la sûreté de l’État (SSSP), et au moins 146 devant des antennes locales du parquet au Caire, selon le Centre égyptien pour les droits économiques et sociaux [
5] et des avocats [
6].
D’après des avocats, les procureurs ont interrogé les suspects au sujet de leur participation aux manifestations et leur ont dit qu’ils faisaient l’objet d’une enquête en raison d’accusations comprenant celles d’« aide à une organisation terroriste pour qu’elle atteigne ses objectifs », de « diffusion de fausses nouvelles », de « participation à des manifestations non autorisées » et d’« utilisation à mauvais escient des réseaux sociaux » dans le but de diffuser les informations venant d’un « groupe terroriste », ce terme étant utilisé pour désigner les Frères musulmans, et ils ont ensuite ordonné leur placement en détention pour 15 jours.
ARRESTATIONS DE RESPONSABLES POLITIQUES, DE JOURNALISTES ET DE MILITANTS
Immédiatement après les manifestations, les forces de sécurité égyptiennes ont poursuivi leur campagne de répression, arrêtant des avocats, des journalistes, des militants et des responsables politiques.
Amnesty International a également rassemblé des informations sur l’arrestation de cinq journalistes. Sayed Abdellah, qui avait partagé des informations au sujet de la manifestation à Suez sur son compte Facebook, a été arrêté à son domicile le 22 septembre ; et Mohammed Ibrahim, fondateur du célèbre blog « Oxygen Egypt », a été arrêté pour avoir posté des vidéos portant sur les manifestations alors qu’il s’était rendu dans un poste de police du Caire, le 21 septembre, conformément aux conditions de sa mise à l’épreuve.
La militante et avocate spécialiste des droits humains Mahienour el Masry a été interceptée par des hommes en civil vers 19 heures le 22 septembre, et poussée dans une fourgonnette alors qu’elle venait de sortir d’un bâtiment du SSSP où elle était allée voir un avocat spécialiste des droits humains incarcéré, dont elle assurait la défense. Elle a par la suite été interrogée par un procureur du SSSP au sujet d’accusations infondées, étant notamment accusée d’avoir « aidé un groupe terroriste à atteindre ses objectifs » et de « diffusion de fausses nouvelles » dans le cadre d’une affaire remontant au moment où des manifestations ont eu lieu en
mars 2019, et placée en détention dans l’attente d’une enquête.
Trois personnes au moins ont été arrêtées à leur domicile à Suez, notamment Rashad Mohammed Kamal, un dirigeant syndical qui a lui aussi participé aux manifestations. Les autorités ont également continué de procéder à des arrestations dans toute l’Égypte, et au moins sept dirigeants de parti et avocats ont été arrêtés en tout début de journée le 24 septembre.
Parmi les autres responsables politiques arrêtés, on peut citer Abed Aziz Husseini, vice-président du parti Karama, qui a été appréhendé à la suite d’une déclaration diffusée par son parti annonçant qu’il suspendait ses activités en réaction à la répression sans précédent exercée par les autorités, et AbdelNasser Ismail, vice-président du Parti de l’alliance socialiste populaire.
« Le président Al Sissi va être confronté à un choix décisif au cours des prochains jours. Le monde va observer sa réaction face aux manifestations et vérifier si sa politique de répression continue de s’intensifier ; les alliés internationaux de l’Égypte doivent faire clairement savoir aux autorités du pays que la répression brutale des dissidents pacifiques ne sera pas tolérée », a déclaré Najia Bounaim.