Salut à tous,
Je partage avec vous une question, finalement classique, que nous nous sommes posés ensemble, ce soir, avec un ami musulman :
qu'est-ce que le mal et d'où vient-il ?
Si l'on part d'une hypothèse religieuse et monothéiste, soit l'on considère que rien n'existe en dehors de Dieu, et dans ce cas la différence de nature entre le bien et le mal perd de son évidence ; soit l'on considère qu'un principe mauvais préexiste à toute chose, à l'égal de Dieu, et l'on risque dans ce cas d'admettre que ce dernier n'est pas tout à fait seul à l'origine.
En gros, soit la frontière entre bien et mal devient flou, et dans ce cas on risque le panthéisme ; soit elle est bien radicale, originelle, et dans ce cas c'est le manichéisme qui nous guette.
Enfin, si je partage cette question dans la section
Islam, c'est bien parce que je compte avant tout la voir abordée d'un point de vue croyant et majoritairement musulman... mais ce n'est pas pour autant que les avis des athées, agnostiques et bouddhistes (#cc
@Yamantaka ) ne m'intéressent pas ! Selon vous, sans l'hypothèse divine, est-ce que le concept même de "mal" a un sens ? Et si oui, n'est-il alors que purement contextuel, seulement déterminé par le temps et le lieu où on lui donne la définition de mal ? Et si non, si vous lui donnez valeur d'absolu, alors la question redevient la même qu'au débat : qu'est-il et d'où vient-il ?
Si la question a déjà été posée avant, alors je vous présente mes excuses... en même temps, peut-être n'est-il pas mauvais de revenir sans cesse sur quelque chose d'aussi fondamental (me semble t-il) ?
Qu'est ce que le mal ? D'après le premier dictionnaire qui a apparu sur un célèbre moteur de recherche le mal est défini comme étant
ce qui est contraire au bon, à la vertu ; ce qui est condamné par la morale. Ou encore c
e qui est susceptible de nuire, de faire souffrir, ce qui n'est pas adapté.
D'après ces définitions, on remarque d'abord que le mal ne peut être défini sans son contraire, il est donc une négation du bon, du bien, de la vertu. Il me semble donc nécessaire de définir également le bien, le bon ou encore la vertu, mais puisqu'ils ont une connotation « religieuse », je pense donc qu'il serait plus cohérent avec le sujet de retenir la définition du mal comme c
e qui est susceptible de nuire, de faire souffrir, ce qui n'est pas adapté. Je commence par la dernière partie « ce qui n'est pas adapté ». On peut comprendre qu'est mal tout ce qui n'entre pas dans la « norme », ce qui est différent. Mais ce serait malhonnête de s'arrêter là ( dommage
). L'autre définition, c
e qui est susceptible de nuire, de faire souffrir, nous apporte un autre élément, c'est l'effet que ce qui est qualifié de
mal a, ou plutôt
peut avoir sur une personne ou un groupe de personnes.
Ce que toutes ces définitions nous apporte, c'est qu'il y a indéniablement quelque chose de relatif dans le mal, puisqu'il est le contraire de quelque chose. On suppose donc qu'il n'est pas absolu.
En prenant en considération la première définition, la plus admise, qui est le mal comme contraire à la vertu, la réponse a la question « sans l'hypothèse divine, est-ce que le concept même de "mal" a un sens? » aurait était non, ce qui n'est pas le cas dans la pratique puisque des personnes qui nient l'existence de Dieu condamnent
certains actes qui sont communément qualifiés de mal.
Je reformule ta question, si les Ecritures nous permettent de nommer le mal, l'aurions nous nommé quand même, même sans Elles ?
Si le mal est relatif, la réponse est oui. L'être humain, vivant en groupe, met en place des règles, un code de conduite que les individus d'un même groupe doivent suivre, auxquels ils doivent se soumettre pour qu'une vie en communauté soit possible. Le fait que ces règles changent d'une zone géographique à une autre, d'une époque à une autre montre que ce concept peut en effet être contextuel.
Ce qui rend la chose plus complexe, c'est le fond même de ces règles ou règlements. On remarque souvent qu'ils ont des choses en commun, pas uniquement entre elles, mais aussi avec la religion. Je citerai, à titre d'exemple, la condamnation du meurtre ou de la violence. Pourquoi ? Cela signifie-t-il que l'homme a quelque chose en lui, autre que la foi ou ses croyances, qui lui permet de distinguer le mal ?
La définition du mal comme c
e qui est susceptible de nuire, de faire souffrir, nous montre que ce qui est mal n'est pas identifié par la raison, mais par quelque chose d'intrinsèque. L'une des conséquences du mal ici est la souffrance, un sentiment. Un sentiment est
la connaissance plus ou moins claire, donnée d'une manière immédiate. Donc, un sentiment est un moyen de connaissance rapide et
a priori fiable. Mais avant ça, un sentiment est inhérent à l'humain et est quelque chose que tous les hommes partagent. On peut donc se demander Si le mal peut être identifié sans la connaissance, voire sans la reconnaissance de Dieu, est ce que cela signifierait qu'il est extérieur à lui ? S'il est extérieur à lui et reconnu par les hommes, cela signifie que l'homme est « bon » dans son essence, et c'est cette essence qui lui permet de discerner le bien du mal. Cela-dit, tous les hommes n'ont pas la même capacité de discernement. L'intensité ou l'étendue de cette « bonté » diffère d'une personne à une autre, indépendamment de son appartenance religieuse ou de ses croyances. Si le mal est extérieur à Dieu mais identifiable par l'homme, est ce que cela ne voudrait il pas dire que le mal est en l'homme ?