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Hobbes : l’homme est un (grand méchant) loup pour l’homme
Faire de la méchanceté un problème seulement moral, qui impliquerait un relation entre un individu isolé et des valeurs, ne permet peut-être pas d’en éclairer tous les ressorts. Pour
Thomas Hobbes, il faut l’envisager dans sa dimension sociale :
la méchanceté est une réaction de défense contre la méchanceté des autres. Peu après avoir repris à son compte l’adage selon lequel
« l’homme est un loup pour l’homme », il écrit dans la dédicace de son ouvrage
Du citoyen (1642) :
« Même les hommes de bien doivent, à cause de la dépravation des méchants et s’ils veulent se protéger, recourir aux vertus guerrières – la force et la ruse – c’est-à-dire à la rapacité des bêtes ». Pour Hobbes, on n’est donc méchant que parce que les autres l’étaient déjà, parce qu’ils ont commencé à l’être avant nous. Mieux : nous nous devons d’être méchants parce que c’est notre seule manière de nous protéger d’une hostilité ambiante qui constitue pour nous une menace permanente – du moins aussi longtemps qu’il n’y a pas un cadre politique qui permette de contenir cette agressivité dans de strictes limites. La méchanceté, en ce sens, est contagieuse, mais être méchant n’est pas naturel ni instinctif : ce n’est qu’une affaire de réponse à une situation donnée.
Kant : l’être humain a un penchant pour le mal
Pour autant, les humains sont-ils condamnés à faire le mal lorsque la situation semble l’imposer ? Pas nécessairement.
Kant a beau écrire, dans
La Religion dans les limites de la seule raison (1793), que
« l’être humain est méchant par nature », cette nature n’est pas une fatalité pour autant. Chacun dispose en lui d’un certain penchant au mal, c’est-à-dire d’une certaine propension au mal, mais qui coexiste avec une disposition originelle au bien. Cette tension interne peut nous pousser à préférer nos inclinations sensibles, c’est-à-dire la recherche de notre plaisir, à l’obéissance à la loi
morale. Mais aussi radical que soit ce penchant pour le mal, il n’est pas l’expression d’une quelconque perversité diabolique qui ferait de nous des êtres foncièrement vicieux ou sadiques, puisqu’il n’est que la conséquence logique de notre faculté à être libres. Même si vous « voulons » le bien, nous restons toujours et irréductiblement libres d’agir autrement, de nous soustraire aux injonctions de la morale et donc de faire le mal.
Être méchant, c’est donc plutôt être faible et faillible, conformément à ce que Kant appelle
« une fragilité de la nature humaine ».
C’est bien connu : dans le monde, il y a les gentils d’un côté, et les méchants de l’autre… Encore n’est-il pas toujours aisé de les identif...
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