L'impact de la grossesse sur le corps peut être une raison de ne pas vouloir d'enfant. C'est aussi une manière de s'opposer à la dépossession systémique du corps de toutes les femmes.
«Moi, je veux garder mon corps comme il est», affirme Anne, 28 ans, responsable retail pour une marque de vêtements qui a opté, entre autres pour cette raison, pour une ligature des trompes (comme, en 2010, 3,9% des femmes de 20 à 44 ans de France métropolitaine, ni stériles, ni enceintes, ayant des rapports sexuels et ne voulant pas d'enfant).
La pilule, sa contraception pendant des années, n'était en fait pas pour elle la solution la plus adaptée. «Je suis pas quelqu'un de très assidu.» Elle préférait aussi se passer des hormones de synthèse, qui avaient «des effets sures états d'âme, on corps». La capote, ensuite, ne lui convenait pas vraiment en matière de sensations intimes –«plusieurs fois, j'ai tenté le diable». Elle ne souhaitait «pas avoir un corps étranger dans son ventre» donc n'envisageait pas non plus le DIU au cuivre. Et «redoutai[t]» d'avoir à avorter. «J'avais besoin d'une solution définitive qui réglait le problème de la possibilité de tomber enceinte par accident, parce qu'en fait je sens depuis toujours que je ne veux pas porter d'enfant.»
La terminologie est précise. Ce n'est pas qu'Anne ne veut pas d'enfant: elle «ne ferme pas la porte à une adoption»; et sa filleule de 8 ans s'est retrouvée, par les circonstances de la vie, à sa charge. En revanche, porter un enfant, ce n'est pas pour elle. Ce qui lui déplaît dans la grossesse, c'est de «rajouter encore un humain» sur cette planète mais aussi l'impact que cette situation aura sur son corps. «Il me semble que, si on avait fait un bébé, vu mon gabarit –je fais 1,56 mètre, je suis svelte, mon corps est sportif, nerveux– et vu mon mec, le bébé m'aurait éclaté le bassin!» exagère-t-elle consciemment et en riant.
Sans s'être renseignée dans le détail sur le pourcentage de risque de fracture du sacrum ou du coccyx lors d'un accouchement par voie basse, Anne s'est dit que, vu l'étroitesse de son bassin, elle s'exposerait fortement à une césarienne. «Déjà, la ligature des trompes, c'est deux petites cicatrices qui peuvent se voir, et je me suis posé la question, parce que j'aime être en maillot de bain assez échancré. J'imagine même pas si j'avais dû faire une césarienne… Là, je me dis “ton corps ne changera pas outre mesure si tu décides d'en prendre soin, il y aura pas d'obstacle comme un bébé dans ton ventre pour venir chambouler tout ça”.»
Un discours qui ne manque pas de susciter les critiques et les jugements. Pour beaucoup (et peut-être vous, du moins de prime abord), sa décision serait celle d'une midinette superficielle, qui se soumet placidement aux injonctions pesant sur le corps des femmes et ferait de la joliesse sa priorité. «Avec les personnes avec qui j'ai discuté de mon choix, il y a ce truc “c'est pour continuer à correspondre aux codes”. Et quand bien même? Si ces codes-là me conviennent, à quel moment tu viens me dire que j'ai tort de faire ci ou ça? Je fais de mal à personne, je m'exhibe pas pour faire culpabiliser d'autres personnes, je suis en phase avec moi-même.» Sous une apparence frivole, son positionnement a, à l'inverse, quelque chose de féministe en ce qu'il questionne la place actuelle du corps des femmes (notamment enceintes) dans notre société. «Mon choix, à mes yeux, il est fort, insiste la jeune femme. J'en suis fière.»
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«Moi, je veux garder mon corps comme il est», affirme Anne, 28 ans, responsable retail pour une marque de vêtements qui a opté, entre autres pour cette raison, pour une ligature des trompes (comme, en 2010, 3,9% des femmes de 20 à 44 ans de France métropolitaine, ni stériles, ni enceintes, ayant des rapports sexuels et ne voulant pas d'enfant).
La pilule, sa contraception pendant des années, n'était en fait pas pour elle la solution la plus adaptée. «Je suis pas quelqu'un de très assidu.» Elle préférait aussi se passer des hormones de synthèse, qui avaient «des effets sur
La terminologie est précise. Ce n'est pas qu'Anne ne veut pas d'enfant: elle «ne ferme pas la porte à une adoption»; et sa filleule de 8 ans s'est retrouvée, par les circonstances de la vie, à sa charge. En revanche, porter un enfant, ce n'est pas pour elle. Ce qui lui déplaît dans la grossesse, c'est de «rajouter encore un humain» sur cette planète mais aussi l'impact que cette situation aura sur son corps. «Il me semble que, si on avait fait un bébé, vu mon gabarit –je fais 1,56 mètre, je suis svelte, mon corps est sportif, nerveux– et vu mon mec, le bébé m'aurait éclaté le bassin!» exagère-t-elle consciemment et en riant.
Sans s'être renseignée dans le détail sur le pourcentage de risque de fracture du sacrum ou du coccyx lors d'un accouchement par voie basse, Anne s'est dit que, vu l'étroitesse de son bassin, elle s'exposerait fortement à une césarienne. «Déjà, la ligature des trompes, c'est deux petites cicatrices qui peuvent se voir, et je me suis posé la question, parce que j'aime être en maillot de bain assez échancré. J'imagine même pas si j'avais dû faire une césarienne… Là, je me dis “ton corps ne changera pas outre mesure si tu décides d'en prendre soin, il y aura pas d'obstacle comme un bébé dans ton ventre pour venir chambouler tout ça”.»
Un discours qui ne manque pas de susciter les critiques et les jugements. Pour beaucoup (et peut-être vous, du moins de prime abord), sa décision serait celle d'une midinette superficielle, qui se soumet placidement aux injonctions pesant sur le corps des femmes et ferait de la joliesse sa priorité. «Avec les personnes avec qui j'ai discuté de mon choix, il y a ce truc “c'est pour continuer à correspondre aux codes”. Et quand bien même? Si ces codes-là me conviennent, à quel moment tu viens me dire que j'ai tort de faire ci ou ça? Je fais de mal à personne, je m'exhibe pas pour faire culpabiliser d'autres personnes, je suis en phase avec moi-même.» Sous une apparence frivole, son positionnement a, à l'inverse, quelque chose de féministe en ce qu'il questionne la place actuelle du corps des femmes (notamment enceintes) dans notre société. «Mon choix, à mes yeux, il est fort, insiste la jeune femme. J'en suis fière.»

Refuser d'être enceinte pour préserver son corps, un motif pas si superficiel
L'impact de la grossesse sur le corps peut être une raison de ne pas vouloir d'enfant. C'est aussi une manière de s'opposer à la dépossession systémique du corps de toutes les femmes.