"Jalons sur la route de l'Islam" est déjà en soi un programme politique. Le programme en 50 points des Frères Musulmans en est un autre.
La conquête mondiale est aussi écrite noir sur blanc, mais tu n'y vois qu'une bravade.
L'idéologie islamiste s'appuie sur la dialectique court terme/long terme. L'idée de "riposte" contre les "attaques occidentales" est un gros hameçon court-termiste qui ne dissimule pas l'objectif de conquête sur le long terme.
Je suis désolé, mais il ne me paraît pas très difficile de faire la différence entre d'un côté un programme politico-militaire réalisable, et de l'autre côté un discours eschatologique servant de propagande et de système d'exploitation pour le premier. D'ailleurs, l'essentiel des charges portées par
Jalons sur la route le sont contre les musulmans que
Qotb considère comme "sortis de l'islam" : il s'agit avant tout d'un affrontement intérieur.
Les révolutionnaires iraniens en 1979, ou même les partisans des
Saoud au début du siècle dernier annonçaient aussi vouloir conquérir le monde.
Che Guevara aussi. Pourtant, derrière les grandes envolées universalistes, ce sont toujours les réalités du terrain, les permanences historiques et les enjeux locaux qui commandent.
Je cite un commentaire sur
Le Management de la sauvagerie (
http://kurultay.fr/blog/?p=187) :
Le but politique ultime de la démarche est la fondation d’un califat islamique durable, où la politique et l’ordre social seraient régis par la Charia. Ce n’est possible que par la guerre (
Jihad), dans la mesure où tous les sites éligibles sont tenus par des Etats impies. A cette fin,
Abu Bakr Naji promeut une approche méthodique, à commencer par le choix des théâtres d’opérations par ordre de priorité. Laquelle priorité s’établit en fonction de critères pragmatiques :
1- Le territoire doit présenter de la profondeur géographique et une topographie propice à la démarche.
2- Le pouvoir de l’Etat doit se trouver sensiblement dilué en périphérie du territoire, voire en banlieue des villes très peuplées.
3- Il doit préexister sur place un substrat djihadiste.
4- La population doit être culturellement, religieusement réceptive.
5- Le trafic d’armes doit y être possible sans contraintes rédhibitoires.
Fin de citation. Les Etats donnés par la suite pour illustrer ces critères étaient l'Algérie, l'Arabie saoudite, la Jordanie, la Libye, le Maroc, la Mauritanie, le Nigeria, le Pakistan, la Tunisie et le Yémen. Il est très clair qu'aucun pays non-musulman ne peut figurer sur cette liste.
Mais naturellement, le fait que l'Etat islamique ne cherche pas à prendre le pouvoir en Europe (ou à la conquérir) ne nous met pas à l'abri de ses attaques.