Deux ans après la révolution, petites combines et dessous-de-table sont toujours aussi répandus en Tunisie. Ils tendent même à se généraliser. Enquête sur un mal endémique.
La cession, finalement avortée, en novembre 2012, de 13 % de la Banque de Tunisie (BT) à un obscur fonds d'investissement luxembourgeois, le Royal Luxembourg Soparfi (RLS), a fait la une des médias. « Aucune enquête sérieuse n'avait été menée sur ce fonds d'investissement. Des proches de Ben Ali ou n'importe quelle mafia pouvaient être derrière cette nébuleuse. Même si l'État doit impérativement remplir ses caisses, la transparence des transactions est nécessaire. D'autant que cet argent n'est pas le sien et revient aux sociétés cessionnaires », explique un membre de l'association I Watch. Entre l'évaluation de la prévarication érigée en système par l'ancien régime et la nécessité de jeter les bases d'une bonne gouvernance, le pays tente de débusquer une corruption en pleine expansion.
Établi par Transparency International (TI), l'indice de perception de la corruption 2012 classe la Tunisie au 75e rang mondial, soit un recul de 16 places par rapport à 2010 et de 2 places par rapport à 2011. Au fond, les Ben Ali, parents et alliés, n'avaient pas besoin d'être à strictement parler corrupteurs ; ils avaient tout loisir de faire pression, de spolier et de prélever directement dans les caisses de l'État, comme ce fut le cas pour le fonds de solidarité 26-26. Ils n'en étaient pas moins corrompus, le partage du gâteau en famille impliquant compromissions, monnaies d'échange et renvois d'ascenseur. On s'enrichissait à coups de terrains ou de concessions agricoles obtenus à des prix symboliques, et on faisait son beurre avec les grands marchés publics. Le clan au pouvoir avait la mainmise sur des pans entiers de l'économie. Pas un bout de route, pas un grand chantier, pas un important projet n'étaient lancés sans que des parts ne fussent rétrocédées à l'un de ses membres.
Quand Belhassen Trabelsi, beau-frère de Ben Ali, a exigé 20 % de Carthage Cement, les promoteurs italiens ont abandonné leur projet à son unique profit. « L'acceptation de la corruption en tant que phénomène de société, la non-application des lois la sanctionnant, ainsi que l'exercice totalitaire du pouvoir sont à l'origine de sa propagation en Tunisie », analyse Kamel Ayadi, expert des politiques de lutte contre la corruption. Si l'ancien régime avait, en l'absence d'une culture de la transparence et de textes de loi, institutionnalisé les pratiques frauduleuses, la corruption semble, depuis la révolution, s'être démocratisée. « Avec le départ de Ben Ali, les spoliations ont cessé, mais les réseaux parallèles sont toujours là. Les proches du pouvoir qui les chapeautaient ont tout simplement été remplacés », affirme Taoufik Chamari, président du Réseau national anticorruption (RNAC).
La cession, finalement avortée, en novembre 2012, de 13 % de la Banque de Tunisie (BT) à un obscur fonds d'investissement luxembourgeois, le Royal Luxembourg Soparfi (RLS), a fait la une des médias. « Aucune enquête sérieuse n'avait été menée sur ce fonds d'investissement. Des proches de Ben Ali ou n'importe quelle mafia pouvaient être derrière cette nébuleuse. Même si l'État doit impérativement remplir ses caisses, la transparence des transactions est nécessaire. D'autant que cet argent n'est pas le sien et revient aux sociétés cessionnaires », explique un membre de l'association I Watch. Entre l'évaluation de la prévarication érigée en système par l'ancien régime et la nécessité de jeter les bases d'une bonne gouvernance, le pays tente de débusquer une corruption en pleine expansion.
Établi par Transparency International (TI), l'indice de perception de la corruption 2012 classe la Tunisie au 75e rang mondial, soit un recul de 16 places par rapport à 2010 et de 2 places par rapport à 2011. Au fond, les Ben Ali, parents et alliés, n'avaient pas besoin d'être à strictement parler corrupteurs ; ils avaient tout loisir de faire pression, de spolier et de prélever directement dans les caisses de l'État, comme ce fut le cas pour le fonds de solidarité 26-26. Ils n'en étaient pas moins corrompus, le partage du gâteau en famille impliquant compromissions, monnaies d'échange et renvois d'ascenseur. On s'enrichissait à coups de terrains ou de concessions agricoles obtenus à des prix symboliques, et on faisait son beurre avec les grands marchés publics. Le clan au pouvoir avait la mainmise sur des pans entiers de l'économie. Pas un bout de route, pas un grand chantier, pas un important projet n'étaient lancés sans que des parts ne fussent rétrocédées à l'un de ses membres.
Quand Belhassen Trabelsi, beau-frère de Ben Ali, a exigé 20 % de Carthage Cement, les promoteurs italiens ont abandonné leur projet à son unique profit. « L'acceptation de la corruption en tant que phénomène de société, la non-application des lois la sanctionnant, ainsi que l'exercice totalitaire du pouvoir sont à l'origine de sa propagation en Tunisie », analyse Kamel Ayadi, expert des politiques de lutte contre la corruption. Si l'ancien régime avait, en l'absence d'une culture de la transparence et de textes de loi, institutionnalisé les pratiques frauduleuses, la corruption semble, depuis la révolution, s'être démocratisée. « Avec le départ de Ben Ali, les spoliations ont cessé, mais les réseaux parallèles sont toujours là. Les proches du pouvoir qui les chapeautaient ont tout simplement été remplacés », affirme Taoufik Chamari, président du Réseau national anticorruption (RNAC).