Par LÉA-LISA WESTERHOFF Correspondante à Rabat (Maroc)
Fin du suspense.
Ceux qui manifestent depuis quatre mois pour obtenir une monarchie parlementaire ne lauront pas, du moins pas dans limmédiat.
Dans le projet de réforme constitutionnelle présenté par Mohammed VI, vendredi soir, le roi voit ses pouvoirs clarifiés mais pas substantiellement limités.
Un rééquilibrage qui permet de muscler le rôle du Premier ministre et du Parlement sans toucher à lessentiel des prérogatives du monarque.
Cest ainsi que le chef du gouvernement ne sera plus nommé dautorité par Mohammed VI, mais obligatoirement issu du parti arrivé en tête des élections. Ce «président du gouvernement» peut également dissoudre le Parlement, mais le roi doit auparavant être consulté.
De la même façon, le Premier ministre propose le nom des membres de son cabinet tout comme des ambassadeurs et des walis (préfets), mais cest le roi qui les nomme.
«En matière de répartition et darchitecture du pouvoir, cela reste quand même une Constitution loin dêtre démocratique», analyse Mohammed Madani, professeur de sciences politiques à Rabat.
Résultat : pour les uns, cette nouvelle Constitution permet une «transition démocratique» ; pour les autres, cest une «démocratie en trompe-lil».
« Il y a de vraies avancées, mais aussi beaucoup de verrous qui nont pas sauté», résume Bachir Rachdi, cofondateur de Transparency Maroc et du Forum citoyen pour le changement démocratique, une coalition de 300 personnalités de la société civile.
Inviolable».
Parmi les avancées, la clarification des pouvoirs du roi. De 108 articles, la Constitution va passer à 180, et pour la première fois, elle fait une distinction entre les pouvoirs religieux et civil du roi.
«Larticle 19 donnait au pouvoir une coloration islamique et sacrée, et dans cette conception, il ny a pas de séparation des pouvoirs», analyse le professeur de droit constitutionnel Abderrahmane Baniyahya. Le roi était «le représentant suprême de la nation», il est désormais «chef de lEtat» et «commandeur des croyants», deux fonctions distinctes précisées et encadrées par la Constitution et non pas accordées grâce à une quelconque légitimité religieuse.
Cest le début «dune séparation entre le sacré et le temporel», estime Baniyahya. Le rôle du roi, cependant, névolue pas. Il continue à présider le Conseil des ministres et demeure la seule autorité religieuse du pays. Sa personne reste donc «inviolable», la notion de sacralité étant remplacée par celle de «respect» qui lui est dû. Et puis, il y a ces verrous qui limitent la portée démocratique du texte. «La primauté des conventions internationales sur le droit marocain est énoncée, mais il faut quelles soient en accord avec lidentité islamique du pays, ce qui est une vraie limite», analyse Bachir Rachdi. «De même, le roi reste le président du Conseil de la magistrature, son entourage peut continuer à influencer indirectement le cours de la justice», poursuit ce chef dune entreprise à Casablanca. Le roi continue également de nommer les juges.
Libération.fr
(suite)
Fin du suspense.
Ceux qui manifestent depuis quatre mois pour obtenir une monarchie parlementaire ne lauront pas, du moins pas dans limmédiat.
Dans le projet de réforme constitutionnelle présenté par Mohammed VI, vendredi soir, le roi voit ses pouvoirs clarifiés mais pas substantiellement limités.
Un rééquilibrage qui permet de muscler le rôle du Premier ministre et du Parlement sans toucher à lessentiel des prérogatives du monarque.
Cest ainsi que le chef du gouvernement ne sera plus nommé dautorité par Mohammed VI, mais obligatoirement issu du parti arrivé en tête des élections. Ce «président du gouvernement» peut également dissoudre le Parlement, mais le roi doit auparavant être consulté.
De la même façon, le Premier ministre propose le nom des membres de son cabinet tout comme des ambassadeurs et des walis (préfets), mais cest le roi qui les nomme.
«En matière de répartition et darchitecture du pouvoir, cela reste quand même une Constitution loin dêtre démocratique», analyse Mohammed Madani, professeur de sciences politiques à Rabat.
Résultat : pour les uns, cette nouvelle Constitution permet une «transition démocratique» ; pour les autres, cest une «démocratie en trompe-lil».
« Il y a de vraies avancées, mais aussi beaucoup de verrous qui nont pas sauté», résume Bachir Rachdi, cofondateur de Transparency Maroc et du Forum citoyen pour le changement démocratique, une coalition de 300 personnalités de la société civile.
Inviolable».
Parmi les avancées, la clarification des pouvoirs du roi. De 108 articles, la Constitution va passer à 180, et pour la première fois, elle fait une distinction entre les pouvoirs religieux et civil du roi.
«Larticle 19 donnait au pouvoir une coloration islamique et sacrée, et dans cette conception, il ny a pas de séparation des pouvoirs», analyse le professeur de droit constitutionnel Abderrahmane Baniyahya. Le roi était «le représentant suprême de la nation», il est désormais «chef de lEtat» et «commandeur des croyants», deux fonctions distinctes précisées et encadrées par la Constitution et non pas accordées grâce à une quelconque légitimité religieuse.
Cest le début «dune séparation entre le sacré et le temporel», estime Baniyahya. Le rôle du roi, cependant, névolue pas. Il continue à présider le Conseil des ministres et demeure la seule autorité religieuse du pays. Sa personne reste donc «inviolable», la notion de sacralité étant remplacée par celle de «respect» qui lui est dû. Et puis, il y a ces verrous qui limitent la portée démocratique du texte. «La primauté des conventions internationales sur le droit marocain est énoncée, mais il faut quelles soient en accord avec lidentité islamique du pays, ce qui est une vraie limite», analyse Bachir Rachdi. «De même, le roi reste le président du Conseil de la magistrature, son entourage peut continuer à influencer indirectement le cours de la justice», poursuit ce chef dune entreprise à Casablanca. Le roi continue également de nommer les juges.
Libération.fr
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