Y a-t-il ou non des termes à appréhender au sens figuré () dans le Coran?

3robi78

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Il est certes erroné d'appréhender au sens figuré tous les textes, ou n'importe quel texte, du Coran et de la Sunna.

Par contre il est possible de le faire pour certains textes précis, suivant en cela des principes précis.

Il est certes erroné d'appréhender au sens figuré la formule "يديَّ" que Dieu a employée à Son Sujet en Coran 38/75 : cela n'est pas au sens figuré : cela ne signifie pas ce que le terme "قدرة" ou "نعمة" signifie.

Par contre il n'est pas vrai de dire que dans le Coran et la Sunna il n'y a aucun terme qu'on puisse appréhender au sens figuré.

Avant de vous donner quelques exemples de termes du Coran et de la Sunna qu'il s'agit bel et bien d'appréhender au sens figuré, il faut rappeler ici que les noms "حقيقة" et "مجاز" renvoient aux termes utilisés par le locuteur :
– le terme (ou la formule) (لفظ) que le locuteur utilise, s'il lui confère le sens (معنى) pour lequel il (ou elle) a été forgé(e) (wudhi'a lahû), alors ce terme (ou cette formule) (لفظ) est dit : "حقيقة" ou "تحقيق" ;
– et le terme (ou la formule) (لفظ) que le locuteur utilise, s'il lui confère un sens (معنى) autre que celui pour lequel il (ou elle) a été forgé(e) (wudhi'a lahû) mais présentant un lien avec ce sens (معنى) originel, alors ce terme (ou cette formule) (لفظ) est dit : "مجاز" .

Par rapport maintenant au sens que le locuteur confère au terme qu'il utilise, on emploie deux formules voisines mais différentes :
– le sens (معنى) que le locuteur a conféré à un terme (لفظ) donné, si ce sens est bien le sens pour lequel ce terme (ou cette formule) a été forgé(e) (wudhi'a lahû), alors ce sens est dit : " معنى حقيقيّ" ;
– et le sens (معنى) que le locuteur a conféré à un terme (لفظ) donné, si ce sens est autre que le sens pour lequel ce terme (ou cette formule) a été forgé(e) (wudhi'a lahû) mais est apparenté à ce sens originel, alors ce sens est dit : "معنى مجازي" .
 

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Un exemple de présence d'un terme مجاز dans le Coran :

Dieu relate dans le Coran que l'un des deux compagnons de prison du prophète Joseph dit à ce dernier, lui relatant son rêve dont il voulait l'interprétation : "Je me vois (en rêve) pressant du khamr" (Coran 12/36).

Le terme "khamr" (خمر) désigne une boisson alcoolique (soit le vin précisément, soit toute boisson alcoolique : lire notre article).

Or c'était en réalité de "raisin" – et non de "vin" – que cet homme parlait (car on ne presse pas du vin : c'est là l'indice, qarîna, que le terme "khamr" n'est pas à appréhender ici dans son sens propre).

Pourtant, et bien que le terme "khamr" ne désigne pas de façon originelle "le raisin", Dieu a bien cité cette phrase où il y a ce terme "khamr" qui y désigne le raisin (au lieu que s'y trouve le terme "'inab", qui, lui, désigne de façon normale : "le raisin").

En fait si cette opération a été possible, c'est parce que ce que ce terme "khamr" désigne originellement – à savoir "le vin" – (et c'est là son sens propre), cela présente une relation ('alâqa) avec "le raisin" : "le vin" était du "raisin" ("al-khamru kâna 'inaban") ; en fait il est le résultat d'une transformation complète du raisin. C'est ce qui a fait qu'il a été possible d'employer le terme qui signifie à l'origine "vin" pour signifier en fait : "raisin".

Dans ce verset, le terme "خمر" est donc bel et bien un "مجاز", eu égard à ce qu'il y signifie ("raisin"), ce qui représente un "معنى مجازي" par rapport à ce terme.
Pour signifier la même chose, c'est le terme "عنب" qui est "حقيقة" ou "تحقيق" : le sens "raisin" est un "معنى حقيقيّ" par rapport à ce terme.

Vous avez ainsi, dans ce verset du Coran, l'emploi d'un terme à appréhender au sens figuré : il désigne originellement quelque chose mais a été employé pour désigner ce à partir de quoi cette chose est faite.
 

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Al-Bukhârî parle de la présence de termes مجاز dans la Sunna :

Al-Bukhârî écrit en effet dans son livre Khalqu Af'âl il-'ibâd : "Certains parmi les (ulémas) ont dit : "La plupart des erreurs des gens sur ces points (s'est produite) lorsqu'ils n'ont pas distingué le "مجاز" du "تحقيق" ; ni le "فعل" du "مفعول" ; ni le "وصف" de la "صفة" . Ils n'ont pas connu le mensonge pourquoi il est devenu mensonge, ni la véracité pourquoi elle est devenue véracité." Pour ce qui est de distinguer le "مجاز" du "تحقيق", cela est comme dans la parole du Prophète, que Dieu le bénisse et le salue, à propos du cheval : "وجدتُه بحرًا" ("Je l'ai trouvé étant une mer") : il s'agit de celui qui circule parmi les gens. Le "تحقيق" de cela aurait été (de dire) : "Sa course est bonne". (…) Et cela est (encore) comme la parole de celui qui dit : "النهر يجري" : son sens est : "L'eau coule". [Employer ces termes exacts et dire : "الماء يجري في النهر"] est le "تحقيق" . Les choses semblables (à cela) sont nombreuses dans les langues" (Khalqu Af'âl il-'ibâd).

Suit la relation, avec différentes chaînes de transmission, du premier hadîth. Puis, le second "مجاز" dont il a parlé, al-Bukhârî veut montrer qu'il est présent dans le hadîth suivant : "صَّلَوَاتُ الْخَمْس كَنَهَرٍ يجري عَلَى بَابِ أَحَدِكُمْ ، يَغْتَسِلُ منهِ كُلَّ يَوْمٍ خَمْسَ مِراتٍ ، فَمَا يُبْقِي مِنْ الدَرَنِ شيء" ("Les cinq prières sont comme une rivière qui coule à la porte de l'un d'entre vous, dans laquelle il se baigne cinq fois chaque jour ; cela ne laisse alors subsister rien de la saleté") (Khalqu Af'âl il-'ibâd, relation n° 453).

On voit ici al-Bukhârî présenter ces deux hadîths comme étant de parfaits exemples de "مجاز".

Le premier recèle soit une métaphore (استعارة), soit une comparaison d'un type particulier (تشبيه بليغ).
Et le second recèle soit une métonymie (مجاز مرسل) (avec emploi du lieu pour désigner ce qui se trouve en ce lieu), soit un "مجاز عقلي" (avec إسناد الفعل إلى المكان) (comme dans la parole du prophète Joseph, sur lui soit la paix : "سبع شداد يأكلن ما قدمتم لهن" : il est évident que ce ne sont pas les 7 années de disette qui, elles-mêmes, mangeront le grain auparavant accumulé, mais les hommes qui, lors de ces 7 années de disette, mangeront le grain auparavant accumulé).
 

3robi78

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Règles de sémantique arabe à propos des termes ayant un sens figuré, avec des exemples issus du Coran :

Il existe trois choses :
- d'un côté il y a le terme (lafz) que le locuteur emploie ;
- de l'autre côté il y a la réalité (haqîqa khârija) que ce terme cherche à désigner ;
- entre les deux se trouve le sens (ma'nâ) que ce terme (lafz) évoque dans l'esprit humain, celui du locuteur et celui de sa cible.

– A) La Dalâla haqîqiyya : le fait qu'un terme (lafz) désigne le sens (ma'nâ) pour lequel il a été forgé (wudhi'a lahû).

– B) La Dalâla majâziyya : le fait qu'un terme (lafz) désigne un sens (ma'nâ) autre que celui pour lequel il a été forgé, mais qui a malgré tout un rapport avec ce sens là.

Dans le cas d'une Dalâla de ce second type (B), il y a dans la réalité (al-haqîqa al-khârija) une première chose, c'est celle à laquelle correspond le sens (ma'nâ) que l'émetteur, en employant ce terme (lafz), veut signifier (al-ma'na-l-murâd li-l-mutakallim, wa huwa-l-ma'na-l-majâzî).
Et il y a dans la réalité (al-haqîqa al-khârija) une seconde chose : celle à laquelle correspond le sens originel de ce terme (lafz) : il s'agit du sens pour lequel il a été forgé (al-ma'na-l-haqîqî).

Ensuite (dans le cas d'une مجاز لُغَوي) :

– B.A) Soit la relation existant entre la première chose (celle que l'émetteur veut désigner en employant ce terme) et la seconde chose (celle que le terme désigne normalement) est une relation de comparaison (تشبيه), mais seul le comparant (مشبَّه به) est mentionné, et pas le comparé (مشبَّه) ; ou bien le comparé (مشبَّه) est mentionné, et, avec lui, le corollaire du comparant (لازم المشبَّه به). On a alors affaire à une "استعارة", une "métaphore directe".

– B.B) Soit la relation existant entre la première chose (celle que l'émetteur veut désigner en employant ce terme) n'est pas une relation de comparaison. On a alors affaire à un "مجاز مرسل", une "métonymie".
 
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