Climat de France : Colère dans la cité
Touche pas à ma baraque !
«Les habitants de Diar Echems se sont révoltés et ont obtenu des logements, nous sommes dans la même situation, notre cité date des années 1950, les appartements sont exigus et linsalubrité caractérise les lieux», tonne Halim, 28 ans, émeutier de Climat de France à Oued Koreiche, sur les hauteurs de Bab El Oued, lune des nombreuses favelas dAlger.
Ici, des affrontements violents ont eu lieu mardi soir et mercredi matin et ont repris hier entre les habitants de la cité et les forces de lordre dépêchées sur les lieux. Face aux gaz lacrymogènes et aux balles en caoutchouc, les émeutiers ont pu résister et se montrer intraitables, usant de toutes sortes de projectiles (pierres, bouteilles de limonade, barres de fer
). Depuis quelques semaines, les habitants des cités délabrées, comme Diar El Mahçoul (El Madania) et ceux de Diar Echems ont renoué avec la contestation dans la rue, seule solution, selon eux, pour se faire entendre des autorités.
Comité de défense
A notre arrivée sur les lieux, la cité évoquait un champ de bataille avec les décombres des baraquements démolis par la manière forte. Le quartier est quadrillé par les forces de lordre suréquipées et stationnant aux abords de la cité. «Comme sils attendent lordre de passer à lassaut, on dirait que nous sommes à Ghaza», ironise un jeune de la cité. Mercredi, vers 5h, les services de Sonelgaz débarquent à Climat de France avec pour mission de couper les fils électriques des baraquements érigés en bas de la cité ainsi que le gaz, en vue de la démolition, dans la journée, de ces taudis décidée par le wali délégué qui a ordonné, selon nos sources, aux services de lAPC, lexécution de la décision. Les habitants, en apprenant tôt dans la matinée la nouvelle, se sont constitués en comité de «défense du quartier». Une formulation très en vogue en ce moment dans le sérail politique et médiatique du pouvoir. Car lorsquil sagit de réprimer les marches ou les parasiter, ces «comités de défense» sont tolérés, voire encouragés. Les autorités découvrent alors leurs adversaires du jour, les habitants furieux de Climat de France.
Ils sont sortis protester contre les opérations de démolition des constructions illicites érigées au cur de leur cité. Les services de lAPC, protégés par une armada de policiers, pénètrent dans la cité et procèdent à la démolition du site sur fond démeutes. «Nous lavons vécu comme une provocation, notamment à cause de lattitude du wali délégué qui na pas jugé utile de revoir sa décision ou, du moins, reporter la date des démolitions pour éviter le pire, surtout dans la situation actuelle», nous explique Abdellah, 52 ans, père de cinq enfants, et qui invite les autorités au dialogue, «avant quil ne soit trop tard». Dans cette cité héritée de lère coloniale, les bâtiments se sont dégradés et leur âge dépassé, les appartements sont exigus. Deux ou trois familles doivent pourtant sy entasser et les célibataires se retrouvent dehors en proie à tous les fléaux. Les conditions de vie sont terribles et chacun dort à tour de rôle. «A mon âge, je nai pas de chambre, quand un de mes frères rentrent dormir, moi je sors pour lui céder la place. Je me suis mis à lalcool et à la zetla, et je consomme des psychotropes pour oublier mon mal», confie Samir, 23 ans, chômeur.