Rien que pour rigoler un peu
Les actionnaires d’AIG ne sont pas dépourvus d’ingratitude
C’est ce qui s’appelle ne pas avoir la reconnaissance du ventre. Les ex-actionnaires du groupe américain d’assurance, AIG, sauvé de la faillite par le contribuable américain en 2008, lors de la crise financière, envisagent d’attaquer le gouvernement américain coupable d’avoir spolié ses actionnaires, comme le révèle le New York Times du 7 janvier. Décidément, le capitalisme outre-Atlantique ne doute de rien.
AIG, pour mémoire, a englouti la bagatelle de 182 milliards de dollars, après que le président américain d’alors, George Bush, décide d’appliquer le fameux principe du « too big to fail » (trop gros pour tomber) en nationalisant ce qui fut le premier assureur mondial. Quelques années plus tard, le groupe s’est payé une campagne de pub avec le slogan « Thank you America » et, il y a quelques semaines, le Trésor américain a vendu le reliquat de sa participation dans AIG. On aurait pu croire que ce soit l’épilogue d’une faillite qui n’aura jamais autant coûté au contribuable américain, jusqu’à ce que Maurice R. Greenberg, l’ex-PDG d’AIG et gros actionnaire du groupe n’entame une procédure contre le gouvernement.
Maurice R. Greenberg, vous savez ? Celui qui présidait aux destinées d’AIG avant la débâcle. Il avait alors fait preuve d’une grande créativité en diversifiant tous azimuts les activités d’AIG et, surtout, en usant et en abusant des produits spéculatifs sur les dettes. Un travail d’orfèvre, mais sans filet. Lorsque la bulle de la dette a explosé en 2008, on s’est aperçu qu’AIG n’avait rien provisionné pour se protéger de cette prise de risque.
Il y a donc un certain toupet aujourd’hui à se retourner vers l’Etat, sans qui AIG n’existerait plus. La démarche, pour contestable qu’elle soit, a sa propre logique. Les conditions de la nationalisation du groupe en 2008 contreviendraient au cinquième amendement de la Constitution américaine, selon lequel la puissance publique ne peut pas prendre possession de la propriété privée « sans une juste compensation ». Ce que contestent Greenberg et ses amis, c’est que les pouvoirs publics en échange du sauvetage ont fait payer des taux d’intérêt et des commissions jugées exorbitantes. De fait, le Trésor a récupéré 5 milliards de dollars et la banque centrale américaine (Fed) 17,7 milliards. Mais, pour être tout à fait honnête, il faut aussi préciser que l’Etat s’est assis sur 50 milliards de dettes publiques.
Les administrateurs d’AIG, qui se sont réunis, mercredi 9 janvier, ont finalement décidé de se dissocier de la class action menée par Maurice R. Greenberg, qui réclame 25 milliards de dollars. De l’art et la manière de dire merci, en quelque sorte.