Salon de l'UOIF : "Il y a les Français et il y a les musulmans..."
La 29e Rencontre annuelle des musulmans de France se tient jusqu'au 9 avril au Bourget, en banlieue parisienne. Depuis l’affaire Mohamed Merah, de nombreux musulmans s’estiment relégués au rang de citoyens de seconde zone. Reportage.
Le climat est "particulier". L’adjectif est récurrent dans les couloirs de la grand-messe annuelle de la communauté musulmane de France. À l’occasion du 29e Congrès de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF) qui s'est ouvert vendredi 6 avril, l’ambiance a effectivement quelque chose de singulier. Il faut dire que, cette année, le contexte politique s’est invité avec raffût. En interdisant la venue de six prédicateurs qui tiennent, selon le président Nicolas Sarkozy, "des discours qui ne sont pas compatibles avec l'idéal républicain", en "regrettant" la présence de l’intellectuel musulman suisse Tariq Ramadan et en mettant en garde l’UOIF contre les "porteurs d’appels à la violence et à la haine […]", le gouvernement n’a pas caché son animosité face à l'organisation, réputée proche des Frères musulmans.
Une position ferme qui a non seulement fait voler en éclat les relations cordiales qu’entretenait le président français avec l’UOIF depuis une dizaine d’années, mais qui a aussi été mal digérée par des musulmans qui s’estiment de plus en plus relégués au rang de citoyens de seconde zone.
"Il y a les Français et il y a les musulmans. Et les musulmans sont les méchants", affirme Saïd, un étudiant niçois de 20 ans qui a fait le voyage depuis la Côte d’Azur. "On peut être Arabe juif, Arabe chrétien, mais dès qu’on voit un Arabe, on se dit qu’il est forcément musulman. Et donc potentiellement terroriste", ajoute le jeune homme, vêtu d’une longue djellaba blanche.
"Je pense à mettre un croissant vert sur ma chemise"
De l’avis général, la rupture entre le gouvernement et les musulmans s’est officialisée avec l’affaire Mohamed Merah. À quelques jours de l’élection présidentielle, les tueries de Toulouse et de Montauban ont laissé derrière elles une odeur nauséabonde. À un point tel qu’Abdel Hafid, un commerçant de produits de beauté d’une cinquantaine d’années, n’hésite pas à lâcher : "Je pense parfois à mettre un croissant vert sur ma chemise", en référence à l’étoile jaune que devaient porter les juifs durant la Seconde Guerre mondiale.
Une trentaine de conférenciers invités, dont le prédicateur suisse Tariq Ramadan, le politicien tunisien Rached Ghanouchi, la prix Nobel de la paix yéménite Tawakkol Karman.