....Plutôt que de céder à laffolement et au retour de la paranoïa qui nous avaient valu la catastrophique loi antiterroriste en 2002-2003, plutôt que doublier les ouvertures que le royaume est appelé à faire sous le prétexte quil est en danger, je préfère penser que ce qui vient de se passer à Marrakech peut paradoxalement beaucoup nous aider. Je crois simplement que nous avons la possibilité de franchir un cap. Le Maroc est en danger ? Soit. Mais, contrairement à 2003, il y a moyen de riposter sans ressembler à un pays arriéré. La menace terroriste ne peut pas et ne peut plus servir dalibi pour renvoyer les réformes aux calendes grecques. Le danger sécuritaire ne doit plus justifier le recours à la torture parce que rien ne justifie la torture. Quand ils seront arrêtés, les commanditaires de lattentat de Marrakech doivent être jugés et traités en êtres humains, avec des procès dignes et équitables. Ils ont supprimé des vies humaines et mis en branle tout un pays, mais ils restent des êtres humains et ils doivent être traités en tant que tels. En 2003, nous avions oublié de le dire. En 2011, nous ne loublierons pas.
Ceux qui ont frappé Marrakech vont mettre à lépreuve la police, la justice et tout lEtat marocain. Ils leur offrent involontairement loccasion de prouver quils ont grandi, quils ne sont plus les mêmes, quils sont devenus meilleurs, c'est-à-dire normaux, des gens qui appartiennent au 21ème siècle et qui font enfin partie du panier des bons. Si la police et la justice ratent cette occasion, cest quelles sont nulles, définitivement. Et si elles sont nulles, cest quelles sont appelées à disparaître, et elles disparaîtront dune manière ou dune autre.
Ceux qui ont frappé Marrakech vont aussi mettre à lépreuve la jeunesse marocaine, le camp des démocrates et des défenseurs des libertés. Ce lot, dont nous faisons partie, a lopportunité de prouver quil a grandi et quil a appris à raison garder. Oui, la rage au ventre, nous allons militer pour que justice soit faite, mais dans le strict respect des droits des individus. Nous refusons le recours à la torture. Et nous maintenons nos revendications de changements et de réformes. Oui, complètement.