Bonjour,
Ce que tu as placé entre parenthèse est le lot de n’importe quelle institution humaine. Même les hommes les plus civilisés ont fait et feront des guerres quand c’est nécessaire; ce prix, c’est le lot de l’existence, religion ou pas. Quand je parle de religion, je veux dire Dieu. Il n’y a pas de morale sans Dieu. Les conséquences du bien et du mal sont connues même des animaux, mais Dieu ne les a pas astreints à la morale et à la responsabilité. Ils ne font que suivre leurs instincts. Dostoïevski a très bien raconté cette problématique de l’athée face à la morale. Je place un passage à la fin pour rappeler ce crime odieux, dans une version moderne qui explore la morale. Ce n’est plus dans ce cas du roman, mais de l’histoire. Ton avis se base encore une fois sur une généralisation que tu fais de la morale, comme si toutes les morales se ressemblaient. Il y a des morales archaïques et tribales, et des morales civilisatrices. Que l’une devienne prédominante et s’impose sur d’autres, c’est une affaire de culture, de mentalité. La morale peut être exploitée à des fins égoïstes. Mais, à la base, la morale est divine, sacrée. Elle n’a rien à voir avec l’athéisme ou le nihilisme. Prétendre le contraire est un oxymore. L’athéisme est incompétent par lui-même à produire une civilisation, il lui faut plagier le religieux s’il veut édifier son existence. En d’autres mots, la Nature est à l’origine un phénomène spirituel et non matériel.
Pour ce qui est des « premiers hominidés », je dirais que tu suis là un penchant qui semble être le tien : rester dans le flou et la généralisation, ce qui est le propre du conventionnalisme institutionnalisé. Mais quiconque réfléchit indépendamment de ces théories sur la naissance de l’homme telles qu’enseignées par les courants darwiniens dans les écoles sait très bien qu’un être humain n’est rien d’autre qu’un animal figé à tout jamais dans son espèce s’il n’a pas eu comme exemple un autre humain qui l’a précédé et pour lui apprendre ne serait-ce que de se mettre dans la position debout et de marcher, que dire de penser ou faire de la morale. Dire « les premiers hommes », c’est sortir de la science et de l’histoire. Une hypothèse n’est pas la vérité, elle n’est qu’un élément permettant la recherche. Elle ne doit surtout pas s’imposer par rapport à d’autres plus sensées, ou par exemple devant des idées qui ont fait leur preuve, telles que l’intelligence ne peut que provenir d’une autre intelligence, une conscience d’une autre conscience ou la vie d’une autre vie.
Bien à toi.
« Mort héroïquement quelques années plus tard, dans la Résistance antinazie, le Dr Johannes Brouwer était un personnage romanesque. Nous savions, et cela nous impressionnait diablement – c’est le cas de le dire –, que Brouwer avait été autrefois, lorsqu’il était étudiant, condamné à de longues années de prison pour un crime gratuit. Il avait assassiné sa logeuse, sans raison, peut-être même sans envie – sans désir, plutôt –, tout simplement pour conduire à terme une expérience spirituelle inspirée de Raskolnikov. » Gorge Semprun, dans Adieu, vive la clarté…