Les nouveaux modes de financement bancaires dits halal reviennent plus chers que les produits classiques. Tour des banques, deux semaines après le lancement officiel.
À deux semaines de leur entrée en vigueur, les produits «halal» se font encore désirer. Dès le début de ce mois, les premiers demandeurs ont fait le tour des banques de la place sans arriver à assouvir leur soif de se procurer finalement un produit financier islamique au Maroc.
Après des mois datermoiements de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri a apposé sa signature à la circulaire relative à ces nouveaux produits. Et cest Attijariwafa bank qui ouvre le bal, mais en limitant pour le moment son offre au volet immobilier. Ainsi, des trois produits halal, Ijara, Mourabaha et Moucharaka, le champion national a choisi den proposer seulement deux. Il sagit de la Mourabaha et de lIjara wa Iqtinâa quil a baptisé respectivement «Miftah Al Kheïr» et «Miftah Al Fath».
«Le potentiel de ces produits sur le marché semble important mais difficile à estimer. Nous sommes convaincus quil y a une attente concernant la commercialisation de ce genre de produits», commentent les responsables dAttijariwafa bank.
Et ce nest pas la demande qui manque. Une tranche considérable de ménages marocains ne veut pas acheter un logement décent du fait de son refus de contracter un crédit classique et donc pratiquer ce quelle considère comme le Riba (usure, dans la chariâ). La Banque centrale a donné son feu vert à ces produits alternatifs pour répondre à cette demande et ainsi contribuer aux efforts étatiques axés sur la lutte contre lhabitat insalubre.
Dans le package halal dAttijariwafa bank, il sagit, dune part, de «Miftah Al Kheïr». Un contrat par lequel la banque acquiert, à la demande du client, un bien immobilier à usage dhabitation ou professionnel en vue de le lui revendre moyennant une marge bénéficiaire convenue davance. Le règlement se fait par mensualité constante sur une durée choisie par le client. Ce dernier a ainsi la «conscience tranquille» étant donné quil paye une marge bénéficiaire et non pas des intérêts. Ce qui revient au même, puisquil y a, dans les deux cas, le payement dune majoration. Sauf que celle des produits «islamiques» revient plus cher.
Pour «Miftah Al Fath», il sagit dun contrat selon lequel la banque met à la disposition du client, à titre locatif, un bien immobilier (logement ou local professionnel), assorti de lengagement ferme du client (locataire) dacquérir le bien au terme du contrat. Un mode de financement qui sapparente au traditionnel Leasing. Aucun changement donc par rapport au crédit-bail classique.
«Ces produits sont un peu plus chers que les produits bancaires classiques. Le principe de calcul du coût supporté par le client nétant pas le même puisque la rémunération nest pas basée sur un taux dintérêt. Toutefois, la rentabilité générée par la banque sur ces produits est équivalente à celle des produits actuels. Lobjectif étant que le client bénéficie dune formule de financement qui répond à ses attentes dans de bonnes conditions», explique une source au sein dAttijariwafa bank.
Ainsi, pour la Mourabaha, le prix de vente au client est calculé en fonction du prix dacquisition du bien, des frais de transaction relatifs à cette acquisition et de la marge de la banque.
Pour Ijara wa Iqtinâa, le loyer à verser par le client sera calculé en fonction de la valeur du bien, des frais de transaction relatifs à cette acquisition ainsi que de la durée de financement.
Et ce sont également ces deux produits-là qui ont attiré lattention des équipes de la Banque marocaine pour le commerce et l'industrie (BMCI). En mettant en exergue les avantages de la Mourabaha et lIjara, ils se sont penchés particulièrement sur leur coût.
«Le coût de revient dépend de nombreux critères: lapport personnel, la durée et le montant varient dun client à lautre. En dehors de limpact de la fiscalité, le coût de revient de ces produits est assez proche des financements classiques déjà proposés par le groupe BMCI», selon le management de cette banque.
La filiale du groupe BNP Paribas veut se lancer elle aussi dans la promotion de ces nouveaux modes de financement.
«Une formation spécifique a été réalisée auprès de la force de vente pour ces trois produits afin den assurer une bonne commercialisation, avec un double objectif : sassurer que les clients comprennent bien ces nouveaux produits et suivre les recommandations délivrées par Bank Al-Maghrib. Une attention particulière sera portée à l'entretien avec le client, notamment au niveau des simulations proposées, afin de lui soumettre le produit le plus adapté à ses besoins», expliquent des responsables de cette banque.
À la Société générale marocaine de banques (SGMB), ces modes de financement islamiques sont sous la loupe. «Avant le lancement de ces produits, nous sommes en attente de réponse aux problématiques fiscales soulevées par ce type d'offre notamment en matière de financement immobilier», précise-t-on à la SGMB, pour souligner que les équipes de cette institution travaillent sur le lancement prochain d'une offre qui sera commercialisée sur son réseau de distribution de 230 agences réparties sur l'ensemble du Royaume. Le Groupe Banques Populaires nest pas en reste. Le président de ce groupe a affirmé, lors de lannonce des résultats semestriels, le jeudi 27 septembre à Casablanca, que ses collaborateurs sont en train détudier ces produits. Idem chez le Crédit immobilier et hôtelier (CIH) qui affirmé son intention de «puiser dans le panier de ces nouveaux produits», lors de la présentation des résultats financiers du premier septembre 2007.
À la Banque marocaine du commerce extérieur (BMCE), les équipes dOthman Benjelloun nont toujours pas finalisé leurs offres alternatives. En passant au crible ces modes de financement, les analystes de cette banque avaient déjà réalisé une étude à ce sujet. À la BMCE, donc, «lexistence dune demande domestique constitue une véritable opportunité pour les banques commerciales marocaines. En raison du refus de paiement des intérêts et du faible taux de bancarisation, ces produits correspondent au profil dune large catégorie de la population».
Les produits halal arrivent donc dans le secteur bancaire marocain à pas sûr. Ce marché a attisé lappétit de grandes banques tels que HSBC et ABN Amro.
Selon un rapport de lAssociation déconomie financière (AEF), la finance alternative représente actuellement près de 300 milliards de dollars, avec un taux de croissance du secteur de 15 % par an au cours de ces dix dernières années.
Au Maroc, il ny a toujours pas une estimation sur les potentialités de ce créneau. La nouvelle offre est plus chère que celle déjà existante, on le savait déjà. La demande est là, mais il faudra attendre les prochains mois pour une première, vraie et crédible, évaluation des finances islamiques au Maroc.
Ijara et Mourabaha en bref
Selon les définitions de Bank Al-Maghrib, les produits alternatifs immobiliers sont :
Ijara : Cette opération doit donner lieu à la signature, entre les deux parties, dun contrat dit «Ijara tachghilia», lorsquil sagit de location simple ou dun contrat dit «Ijara wa iqtinâa» dans le cas où elle est assortie dun engagement ferme dacquisition de la part du locataire.
Mourabaha : Contrat par lequel un établissement de crédit acquiert, à la demande dun client, un bien meuble ou immeuble en vue de le lui revendre à son coût dacquisition plus une rémunération convenue davance. Le règlement par le client donneur dordre se fait en un ou plusieurs versements pendant une période convenue davance. Limputation de la rémunération aux produits de létablissement de crédit doit se faire de manière étalée, sur la durée de vie du contrat.
À deux semaines de leur entrée en vigueur, les produits «halal» se font encore désirer. Dès le début de ce mois, les premiers demandeurs ont fait le tour des banques de la place sans arriver à assouvir leur soif de se procurer finalement un produit financier islamique au Maroc.
Après des mois datermoiements de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri a apposé sa signature à la circulaire relative à ces nouveaux produits. Et cest Attijariwafa bank qui ouvre le bal, mais en limitant pour le moment son offre au volet immobilier. Ainsi, des trois produits halal, Ijara, Mourabaha et Moucharaka, le champion national a choisi den proposer seulement deux. Il sagit de la Mourabaha et de lIjara wa Iqtinâa quil a baptisé respectivement «Miftah Al Kheïr» et «Miftah Al Fath».
«Le potentiel de ces produits sur le marché semble important mais difficile à estimer. Nous sommes convaincus quil y a une attente concernant la commercialisation de ce genre de produits», commentent les responsables dAttijariwafa bank.
Et ce nest pas la demande qui manque. Une tranche considérable de ménages marocains ne veut pas acheter un logement décent du fait de son refus de contracter un crédit classique et donc pratiquer ce quelle considère comme le Riba (usure, dans la chariâ). La Banque centrale a donné son feu vert à ces produits alternatifs pour répondre à cette demande et ainsi contribuer aux efforts étatiques axés sur la lutte contre lhabitat insalubre.
Dans le package halal dAttijariwafa bank, il sagit, dune part, de «Miftah Al Kheïr». Un contrat par lequel la banque acquiert, à la demande du client, un bien immobilier à usage dhabitation ou professionnel en vue de le lui revendre moyennant une marge bénéficiaire convenue davance. Le règlement se fait par mensualité constante sur une durée choisie par le client. Ce dernier a ainsi la «conscience tranquille» étant donné quil paye une marge bénéficiaire et non pas des intérêts. Ce qui revient au même, puisquil y a, dans les deux cas, le payement dune majoration. Sauf que celle des produits «islamiques» revient plus cher.
Pour «Miftah Al Fath», il sagit dun contrat selon lequel la banque met à la disposition du client, à titre locatif, un bien immobilier (logement ou local professionnel), assorti de lengagement ferme du client (locataire) dacquérir le bien au terme du contrat. Un mode de financement qui sapparente au traditionnel Leasing. Aucun changement donc par rapport au crédit-bail classique.
«Ces produits sont un peu plus chers que les produits bancaires classiques. Le principe de calcul du coût supporté par le client nétant pas le même puisque la rémunération nest pas basée sur un taux dintérêt. Toutefois, la rentabilité générée par la banque sur ces produits est équivalente à celle des produits actuels. Lobjectif étant que le client bénéficie dune formule de financement qui répond à ses attentes dans de bonnes conditions», explique une source au sein dAttijariwafa bank.
Ainsi, pour la Mourabaha, le prix de vente au client est calculé en fonction du prix dacquisition du bien, des frais de transaction relatifs à cette acquisition et de la marge de la banque.
Pour Ijara wa Iqtinâa, le loyer à verser par le client sera calculé en fonction de la valeur du bien, des frais de transaction relatifs à cette acquisition ainsi que de la durée de financement.
Et ce sont également ces deux produits-là qui ont attiré lattention des équipes de la Banque marocaine pour le commerce et l'industrie (BMCI). En mettant en exergue les avantages de la Mourabaha et lIjara, ils se sont penchés particulièrement sur leur coût.
«Le coût de revient dépend de nombreux critères: lapport personnel, la durée et le montant varient dun client à lautre. En dehors de limpact de la fiscalité, le coût de revient de ces produits est assez proche des financements classiques déjà proposés par le groupe BMCI», selon le management de cette banque.
La filiale du groupe BNP Paribas veut se lancer elle aussi dans la promotion de ces nouveaux modes de financement.
«Une formation spécifique a été réalisée auprès de la force de vente pour ces trois produits afin den assurer une bonne commercialisation, avec un double objectif : sassurer que les clients comprennent bien ces nouveaux produits et suivre les recommandations délivrées par Bank Al-Maghrib. Une attention particulière sera portée à l'entretien avec le client, notamment au niveau des simulations proposées, afin de lui soumettre le produit le plus adapté à ses besoins», expliquent des responsables de cette banque.
À la Société générale marocaine de banques (SGMB), ces modes de financement islamiques sont sous la loupe. «Avant le lancement de ces produits, nous sommes en attente de réponse aux problématiques fiscales soulevées par ce type d'offre notamment en matière de financement immobilier», précise-t-on à la SGMB, pour souligner que les équipes de cette institution travaillent sur le lancement prochain d'une offre qui sera commercialisée sur son réseau de distribution de 230 agences réparties sur l'ensemble du Royaume. Le Groupe Banques Populaires nest pas en reste. Le président de ce groupe a affirmé, lors de lannonce des résultats semestriels, le jeudi 27 septembre à Casablanca, que ses collaborateurs sont en train détudier ces produits. Idem chez le Crédit immobilier et hôtelier (CIH) qui affirmé son intention de «puiser dans le panier de ces nouveaux produits», lors de la présentation des résultats financiers du premier septembre 2007.
À la Banque marocaine du commerce extérieur (BMCE), les équipes dOthman Benjelloun nont toujours pas finalisé leurs offres alternatives. En passant au crible ces modes de financement, les analystes de cette banque avaient déjà réalisé une étude à ce sujet. À la BMCE, donc, «lexistence dune demande domestique constitue une véritable opportunité pour les banques commerciales marocaines. En raison du refus de paiement des intérêts et du faible taux de bancarisation, ces produits correspondent au profil dune large catégorie de la population».
Les produits halal arrivent donc dans le secteur bancaire marocain à pas sûr. Ce marché a attisé lappétit de grandes banques tels que HSBC et ABN Amro.
Selon un rapport de lAssociation déconomie financière (AEF), la finance alternative représente actuellement près de 300 milliards de dollars, avec un taux de croissance du secteur de 15 % par an au cours de ces dix dernières années.
Au Maroc, il ny a toujours pas une estimation sur les potentialités de ce créneau. La nouvelle offre est plus chère que celle déjà existante, on le savait déjà. La demande est là, mais il faudra attendre les prochains mois pour une première, vraie et crédible, évaluation des finances islamiques au Maroc.
Ijara et Mourabaha en bref
Selon les définitions de Bank Al-Maghrib, les produits alternatifs immobiliers sont :
Ijara : Cette opération doit donner lieu à la signature, entre les deux parties, dun contrat dit «Ijara tachghilia», lorsquil sagit de location simple ou dun contrat dit «Ijara wa iqtinâa» dans le cas où elle est assortie dun engagement ferme dacquisition de la part du locataire.
Mourabaha : Contrat par lequel un établissement de crédit acquiert, à la demande dun client, un bien meuble ou immeuble en vue de le lui revendre à son coût dacquisition plus une rémunération convenue davance. Le règlement par le client donneur dordre se fait en un ou plusieurs versements pendant une période convenue davance. Limputation de la rémunération aux produits de létablissement de crédit doit se faire de manière étalée, sur la durée de vie du contrat.