Le Maroc a-t-il vécu un printemps démocratique à la fin des années 1990 ? à lénoncé de la question, Abderrahmane Saïdi, ministre technocrate de Hassan II, esquisse un large sourire. Il observe un long silence, durant lequel des centaines dimages défilent devant ses yeux. Cétait une belle époque où lespoir était enfin permis, soupire-t-il. Une période difficile et compliquée où de grands chantiers politiques et économiques ont été lancés, affirme-t-il. Un autre homme a vécu de près cette dernière décennie du règne de Hassan II. Mohamed Elyazghi, ancien premier secrétaire de lUSFP, évoque une période synonyme denthousiasme, despoir et de changement. Pendant près de trois ans, lhomme a mené de longues tractations avec le défunt monarque et ses plus proches conseillers. Hassan II tenait beaucoup à lavènement dun gouvernement dalternance. Et pour cela, il a accepté de négocier avec nous pendant près de trois ans. Et même quand ces négociations se sont soldées par un premier échec, il na pas fermé les portes. Il a fait preuve de beaucoup de flexibilité pour réussir cette expérience, se rappelle Elyazghi. Mais attention, nuance-t-il, ce printemps a été rendu possible grâce aux longues années de lutte démocratique contre un régime féroce et intraitable. En fait, Hassan II navait pas vraiment le choix. Au soir de sa vie, affaibli par la maladie, il découvre que le pays quil sapprête à léguer à son fils est menacé de toutes parts. Il enclenche alors une véritable course contre la montre pour intégrer ses ennemis dhier dans le jeu politique, remettre en marche une économie moribonde et relâcher (progressivement) les vannes de son régime autoritaire. Tout un programme !
http://www.telquel-online.com/En-co...e-Hassan-II-ou-l-autre-printemps-marocain/548
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Hassan II va encore plus loin. Lors de la même rencontre, il propose à ses deux invités, Mhamed Boucetta et Mohamed Elyazghi, de cohabiter pendant trois mois avec son ministre de lIntérieur. Sil ne fait pas laffaire, je vous promets de le changer, leur annonce-t-il. Le coup de bluff royal ne fonctionne pas, mais Hassan II a plus dun tour dans son sac. En juillet 1994, il prononce une amnistie générale dont bénéficient 424 prisonniers politiques. Le geste est unanimement salué et redonne espoir aux supporters de lalternance. Fausse alerte ! Les négociations entre la Koutla et le Palais sont officiellement rompues en janvier 1995. Le cabinet royal se fend alors dun communiqué qui restera dans les annales. On peut notamment y lire ceci : Ahmed Réda Guedira, conseiller de Sa Majesté le roi, a reçu au cabinet royal Messieurs Elyazghi, Boucetta et Ben Saïd Aït Ider. Tous trois ( ) sopposaient fondamentalement à la présence, à leur côté, de M. Driss Basri au sein du gouvernement dalternance. Comprenant les raisons de leur opposition, telles quils les ont formulées, mais jugeant quy accéder serait nuire gravement au bon fonctionnement des institutions sacrées du pays, Sa Majesté le roi a décidé de renoncer, pour le moment, à la constitution du gouvernement dalternance. Le ministère de lIntérieur accédait ainsi au rang dinstitution sacrée du pays. Une page est tournée, dans le calme et sans répression, précise toutefois Elyazghi.