Tout comme l’Égypte est le centre de l’œcumène, l’Amon cosmique occupe le centre de l’univers et
les éléments sont dès lors centrifuges. Qu’en est-il alors de la périphérie ? (CLère, Évergète, pl. 3, 6) :
[Prends donc] le champ, qui est (grand comme) l’orbe
de la terre,
(ô) Seigneur des centaines de milliers,( épithète attestée notamment pour Chou (voir D III 19, 1), dieu présent par ailleurs dans la scène comme arpenteur au service d’Amon-Rê, mais aussi en filigrane sous l’épiclèse Vent-Heh d’Amon (col. 16 =
Urk. VIII 70 h))
donnant (des offrandes) à tout dieu ( Voir aussi CLère, Évergète, pl. 2 B, 10 : , Propylône d’Amon-Rê-Montou, 122–123, § 146 (3) : « ce qui est sur le dos de Geb t’appartient pour
toutes les offrandes divines ». L’énoncése rapporte-t-il au Seigneur des centaines de milliers ou au champ offert à Amon-Rê ? Selon la séquence de Philä II 258, 1–2 par exemple, il se rapporte au champ offert à Osiris, assez vaste pour assurer la subsistance de tous les dieux)
ton champ mesuré est par définition plus vaste que
l’univers
ton territoire atteint l’extrémité des rayons du
[disque],
ta [propriété] méridionale (s’étend) jusqu’aux confins
du vent,
ton terrain du nord, jusqu’aux confins des ténèbres,
et c’est63 ton terrain occidental (qui s’étend) jusqu’au
coucher du disque,( Cf. E V 145, 9 ; VI 337, 7 ; VII 85, 17 – 86, 1) et ton terrain oriental, jusqu’à
son lever ;qu’aille ton directeur des parcelles (Voir D III 19, 6–7 : Chou est appelé Hry-idbw n it=f imy-r# #Ht n nTrw : « supérieur-des-cultures de son père,
directeur-des-parcelles des dieux » ; cf. MeeKs, Texte des donations, 53, n. (3) : « directeur des parcelles », titre de Chou, responsable de l’arpentage et de la délimitation des champs ; du roi dans une scène d’offrande de la
campagne : E II 149, 1 ; VII 86, 2. MeeKs, in: BiOr 56, 1999, 575)
du double pays des dieux jusqu’aux confins d’Ouadj-Our ( Comparer avec D IV 54, 14 ; E II 13 (6)–(7) ; II 95, 6 ; III 331, 4 ; E VI 337, 7. Pour le sens de ouadj our, voir
MaLaise/Winand, in: CdÉ 68, 1993, 24, n. 53, et p. 26 ; yoyotte, in: AEPHE, 98, 1989–90, 181–84 ; sur
le rapport entre Amon et la mer, voir de MeuLenaere, in: RdÉ 11, 1957, 81 n. 8. et quaegebeur, in: van ‘t
daCK et al. (éd.), The Judean-Syrian-Egyptian Conflict, 91 ; Statue Turin 3062, 95, col. 1 et 99 (7). La lecture
et la traduction que propose vandersLeyen, Ouadj our, 263 ne correspondent pas à celles que j’avais remises
à l’auteur. À côté de l’opposition horizontale Double-Pays des dieux / mer suivant l’axe sud-nord, d’autres
polarités sont attestées, e.g. le grand hymne à Amon du temple d’Hibis III pl. 33, 4
« [sa] titulature est depuis les montagnes jusqu’au noun » : KLotz, Adoration of the Ram, 74–77 n. F)
ta corde (d’arpentage) ne quitte aucun
lieu, car tu es leur seigneur à tous.(Comparer avec CLère, Évergète, pl. 4, 8; pl. 20, 8; E VII 86, 4. Par ailleurs, sur divers Amon patrons de la corde d’arpentage, voir säve-söderbergh, Four Eighteenth Dynasty Tombs, pl. XLII, et MeeKs, in: RHR 205–4, 1988, 443, n. 76 )
« ton champ mesuré est par définition plus vaste que l’univers ». Le territoire
d’Amon dépasse ainsi les confins du monde connu par référence aux courses du
soleil et de la lune. (PosteL, in: BIFAO 103, 2003, 419) Il débouche donc implicitement sur l’inconnu, le non-être, l’indéfini,
qu’il grignote et altère en cernant une friche. La partie débordante de ce « champ mesuré »
n’a vraisemblablement d’autre destin que le défrichage et à terme l’inclusion dans le domaine
dont la lisière est ainsi repoussée