Bonjour

Je vois pas de contradiction à ce que l'énergie soit « substantiellement » nécessaire, mais que ses formes soient contingentes... Bien sûr la substance et la forme sont toujours unies, mais ce qui est plus fondamental, c'est la substance.
Ceci implique que la substance est séparable de la forme. Ce qui nous fait basculer dans le platonisme et s'éloigne à mille lieues de ce que l'on observe, de l'empirisme qui t'es si cher

Qu'est-ce qu'une balle sans le caoutchouc ou toute autre matière qui la compose ? Qu'est-ce que l'homme sans tous ses organes, son anatomie... ? De même, qu'est-ce que l'énergie sans la matière, les forces, les interactions dont elle dépend ?
"Dont elle dépend". Ceci est important car même si on saute pieds joints dans le platonisme, l'énergie n'est pas"self-existent" comme tu dis, parce qu'elle n'est pas "self-dependant". Ce sera toujours l'énergie de quelque chose. Elle n'est donc pas nécessaire.
Là-dessus, je peux pas trop te répondre, parce que mes connaissances en physique sont limitées. Mais je te dirais que si l'énergie mesure bien l'intensité du travail d'une force, dans ce cas le problème ne serait que déplacé : cette force, ou ces forces fondamentales de la nature, ne peuvent-elles pas l'être nécessaire (self-existent)? Je veux dire, même le philosophe présocratique Empédocle parlait de forces éternelles dans l'univers, nommées métaphoriquement amour et haine.
La perspective "anti-realist" en épistémologie te diras qu'il ne faut pas confondre la carte et le territoire. Ces forces fondamentales ne sont pas indépendantes des phénomènes physiques qu'elles expliquent. Il n'y a pas la matière, l'espace... d'un côté, et de l'autre côté les lois qui leur tombent dessus. Si le "fond physique" qu'expliquent ces lois est contingent, alors ces lois le sont aussi.
La perspective "realist" (platonique) te dira que même si ces lois ont une certaine forme d'existence et que l'on venait à accepter qu'elles sont nécessaires, une loi n'a aucun pouvoir causal, pas plus qu'une modélisation informatique d'une voiture ne te permet de te déplacer avec... Même si on venait à poser la nécessité de ces lois, cette nécessité sera à situer du côté du comportement des choses, non de leur existence.
Mais quel intérêt de raisonner à partir du néant étant donné qu'on sait que, en réalité, quelque chose existe? Je préfère partir de l'existence du monde et me demander si ce monde est nécessaire ou contingent.
L'intérêt est justement de raisonner.
Partir de l'existence du monde sans l'interroger c'est déjà conclure que le monde est nécessaire.
On peut faire des modèles informatiques d'univers alternatifs. Ça veut pas dire que l'univers peut réellement être différent de ce qu'il est.
Si. C'est exactement ce que ça veut dire !
On sait très bien que les paramètres pris en compte pour les modèles sont suffisants, que ces univers modélisés auraient pu être ou bien sont actuellement (dans le cadre de la théorie des multivers).
Et même si des univers alternatifs sont possibles, rien ne permet d'assurer que tous ces univers sont équiprobables. Il peut y avoir des forces en jeu qui inclinent l'univers vers la forme qu'il a en réalité. On ne le sait tout simplement pas.
Équiprobables ou pas là n'est pas la question. Je n'ai pas besoin de savoir lequel entre deux dés est pipé pour dire que les deux ne sont pas nécessaires, qu'ils auraient pu être différents, que les deux contiennent des caractéristiques qui ne s'expliquent pas par l'existence de ces deux dès eux-mêmes.
De quelle force parles-tu ? Quelles-sont les caractéristiques minimales de ces forces ? Pourquoi ces forces sont plusieurs ? il s'agit d'une hypothèse totalement superflue, et ce sera pour le coup simplement catapulter la question plus loin.
On peut certes expliquer un phénomène par une cause, et cette cause par une autre cause, mais à la fin on n'expliquera jamais tout. On peut pas non plus remonter à l'infini. Il y aura toujours un inexpliqué : les croyants ne se demandent pas pourquoi (par quelle cause) Dieu existe. Dieu existe parce qu'il faut qu'il existe en vertu de son essence. Mais si on part de là, on peut en dire de même de l'univers, à moins d'avoir une preuve qu'il est contingent.
L'univers est contingent et c'est ce que j'argumente depuis le début...
Je n'ai pas besoin d'expliquer l'essence de Dieu pour poser son existence. Il me suffit de voir que je ne peux rien expliquer si je ne pose pas son existence.
Rationnellement je n'ai pas besoin de saisir son essence pour cela. Pas plus qu'un mathématicien n'a besoin de saisir l'infini pour l'utiliser dans ses équations.