Soulèvement du Rif (1958) : Lorsqu’Abdelkrim Khattabi a demandé le soutien de Gamal Abdel Nasser
Le soulèvement du Rif a duré 157 jours, entre le 7 octobre 1958 et le 13 mars 1959. Abdelkrim Khattabi, leader de la résistance rifaine avant son exil en Egypte, avait appelé l’ancien président égyptien Gamal Abdel Nasser à soutenir la population.
Deux ans après l’indépendance du Maroc, la situation dans la région du Rif était tendue et les habitants en colère, surtout face à l’attitude des autorités locales envers eux. Les citoyens avaient décidé de manifester et de mener une grève dans les montagnes. Ils avaient incendié les locaux du parti de l’Istiqlal, pour attirer l’attention du Makhzen sur le ras-le-bol des habitants de la région.
La situation évolua rapidement, puisque les manifestations étaient armées, sous le commandement de Mohamed Sellam Hajj Ameziane. Le 7 octobre 1958, fut alors émise «une charte de révolution», qui contenait des revendications, dont le départ des forces étrangères sans condition puisque leur présence était contradictoire aux principes de l’indépendance et de la liberté, ainsi que le retour de l’émir el-Khattabi et de sa famille au pays. La population demandait aussi la dissolution des partis politiques, le travail à l’unité nationale, la libération des prisonniers politiques ou enlevés, ainsi que le changement du gouvernement actuel pour mettre en place un gouvernement populaire.
Ces revendications représentaient clairement les espoirs de Mohamed Abdelkrim el-Khattabi, exilé en Egypte. Les leaders de ce soulèvement ne cachaient pas l’encouragement et le soutien de ce dernier à leur mouvement.
Le leader du soulèvement rifain, Mohamed Sellam Hajj Ameziane, est né en 1925 à Ait Boukhalef et décédé le 9 septembre 1995 aux Pays-Bas. Zaki Moubarak a écrit un livre intitulé «Mohammed V et le fils d’Abdelkrim el-Khattabi», où il décrit cette période dans la région du Rif et mentionne le leader : «C’était un soulèvement populaire contre l’occupation étrangère et ses alliés dans les partis politiques qui s’est transformé en révolution populaire contre les forces de l’occupation et des partis qui travaillaient pour cette dernière. Le soulèvement et la révolution étaient guidés par des personnes qui croyaient dur comme fer au mesures nationales sur le terrain et non les partis, les pistons, les correspondances et les publications. C’est la façon de travailler de l’occupant avec les partis politiques marocains. Nous refusons d’agir ainsi.»
«La révolution a été initiée par des hommes, des collègues, des frères, des petits-fils et des élèves d’Abdelkrim el-Khattabi à Beni Ouriaghel, chef-lieu de la guerre menée dans les années 1920 : Ce sont eux les responsables de ce mouvement révolutionnaire. J’ai eu l’honneur d’être à sa tête suite, par la volonté des Moujahidines, malgré mon refus et mon insistance à n’être qu’un soldat sur le terrain.»
Abdelkrim el-Khattabi mobilise le soutien
Malgré la distance, l’émir Mohamed Ibn Abdelkrim el-Khattabi suivait de très près les détails de l’évolution des événements dans le Rif. Zaki Moubarak a révélé dans son livre que le 2 avril 1959, el-Khattabi avait reçu une lettre d’un de ses hommes au Maroc, Ghali Toud, où ce dernier écrivait :
«Les Rifains demandent l’indépendance totale et le départ de tous les soldats du pays. Ils souhaitent aider l’Algérie à chasser les Français (…) L’organisation [des Rifains] est exemplaire, mais ils ont besoin d’armes. Celles qui ont été prises de chez l’armée des colons et des partis ne suffisent pas pour gagner. L’ennemi [le pouvoir central au Maroc, ndlr] sait que si les Rifains réussissent à avoir des armes dans les mains, la suite des événements serait catastrophique pour tous les ennemis.»