A
AncienMembre
Non connecté
une analyse en sens inverse :
PUBLIÉ LE12 JANVIER 2020 PAR JEAN-PIERRE FILIU
L’Iran a déjà gagné sa guerre d’Irak contre les Etats-Unis
Les Etats-Unis ne contrôlent plus en Irak que des bases isolées, dont ils acceptent même le bombardement par l’Iran, à condition qu’il n’y ait pas de victime.
Le conflit ouvert entre les Etats-Unis et l’Iran, le 27 décembre en Irak, se conclut, le 8 janvier, par une incontestable victoire de Téhéran. La République islamique a en effet pu ce jour-là tirer une bordée de missiles contre deux bases américaines en Irak sans s’attirer la moindre riposte de Washington. Que ce bombardement n’ait pas fait de victime importe moins que la défaite ainsi acceptée par l’administration Trump. Piégée en Irak par un rapport de forces écrasant en faveur de l’Iran, la Maison blanche ne pourrait reprendre la main que par une escalade régionale, dont les éventuels gains militaires s’accompagneraient de conséquences politico-économiques dévastatrices. La victoire iranienne étant à ce stade acquise, il importe d’en tirer les principales leçons.
LA GUERRE DE DOUZE JOURS
Cette « guerre d’Irak » n’aura duré que douze jours et n’aura causé qu’une quarantaine de morts. Elle aura pourtant consacré une nouvelle réalité géopolitique: l’interventionnisme américain au Moyen-Orient, de plus en plus privé de relais locaux, part perdant face à une puissance iranienne qui a méthodiquement enraciné ses réseaux d’influence, avant tout en Irak. Ce conflit a été ouvert par l’Iran, avec le tir de mortier sur une base de Kirkouk où un interprète américain a été tué, le 27 décembre, et s’est conclu par une salve de missiles, tirés depuis le territoire iranien, contre deux bases américaines, l’une à l’ouest de Bagdad, l’autre au Kurdistan irakien. Dans l’intervalle, l’Iran et ses partisans ont essuyé les plus lourdes pertes, avec au moins 25 miliciens pro-iraniens tués dans des frappes américaines, le 29 décembre, attaque le surlendemain de l’ambassade des Etats-Unis à Bagdad et raid américain du 3 janvier où périssent à Bagdad le général Soleimani et neuf de ses compagnons d’armes.
Le Pentagone a prétendu « restaurer la dissuasion » avec l’Iran en liquidant le chef des forces spéciales des Gardiens de la Révolution, mais Soleimani s’avère, comme le martèle la propagande iranienne, « plus dangereux mort que vivant ». L’architecte de la politique expansionniste de la République islamique a promptement été remplacé par un successeur déjà aguerri, tandis que sa mort aux mains du « Grand Satan » a permis d’étouffer les voix dissidentes en Iran comme en Irak, malgré les vagues de contestation que la République islamique y avait récemment réprimées.
Ce rétablissement d’une unité, au moins de façade, du camp chiite face aux Etats-Unis représente un acquis considérable pour le régime des ayatollahs, dont la stratégie régionale fléchissait face à la protestation populaire de l’automne dernier. En outre, le Parlement irakien a voté, le 5 janvier, à l’unanimité des 170 députés présents, en faveur de l’expulsion des forces américaines. Quant à la frappe iranienne du 8 janvier, elle a ciblé aussi une base américaine au Kurdistan d’Irak, où le Pentagone envisage de se replier en cas d’aggravation de la situation dans le reste du pays.
PUBLIÉ LE12 JANVIER 2020 PAR JEAN-PIERRE FILIU
L’Iran a déjà gagné sa guerre d’Irak contre les Etats-Unis
Les Etats-Unis ne contrôlent plus en Irak que des bases isolées, dont ils acceptent même le bombardement par l’Iran, à condition qu’il n’y ait pas de victime.
Le conflit ouvert entre les Etats-Unis et l’Iran, le 27 décembre en Irak, se conclut, le 8 janvier, par une incontestable victoire de Téhéran. La République islamique a en effet pu ce jour-là tirer une bordée de missiles contre deux bases américaines en Irak sans s’attirer la moindre riposte de Washington. Que ce bombardement n’ait pas fait de victime importe moins que la défaite ainsi acceptée par l’administration Trump. Piégée en Irak par un rapport de forces écrasant en faveur de l’Iran, la Maison blanche ne pourrait reprendre la main que par une escalade régionale, dont les éventuels gains militaires s’accompagneraient de conséquences politico-économiques dévastatrices. La victoire iranienne étant à ce stade acquise, il importe d’en tirer les principales leçons.
LA GUERRE DE DOUZE JOURS
Cette « guerre d’Irak » n’aura duré que douze jours et n’aura causé qu’une quarantaine de morts. Elle aura pourtant consacré une nouvelle réalité géopolitique: l’interventionnisme américain au Moyen-Orient, de plus en plus privé de relais locaux, part perdant face à une puissance iranienne qui a méthodiquement enraciné ses réseaux d’influence, avant tout en Irak. Ce conflit a été ouvert par l’Iran, avec le tir de mortier sur une base de Kirkouk où un interprète américain a été tué, le 27 décembre, et s’est conclu par une salve de missiles, tirés depuis le territoire iranien, contre deux bases américaines, l’une à l’ouest de Bagdad, l’autre au Kurdistan irakien. Dans l’intervalle, l’Iran et ses partisans ont essuyé les plus lourdes pertes, avec au moins 25 miliciens pro-iraniens tués dans des frappes américaines, le 29 décembre, attaque le surlendemain de l’ambassade des Etats-Unis à Bagdad et raid américain du 3 janvier où périssent à Bagdad le général Soleimani et neuf de ses compagnons d’armes.
Le Pentagone a prétendu « restaurer la dissuasion » avec l’Iran en liquidant le chef des forces spéciales des Gardiens de la Révolution, mais Soleimani s’avère, comme le martèle la propagande iranienne, « plus dangereux mort que vivant ». L’architecte de la politique expansionniste de la République islamique a promptement été remplacé par un successeur déjà aguerri, tandis que sa mort aux mains du « Grand Satan » a permis d’étouffer les voix dissidentes en Iran comme en Irak, malgré les vagues de contestation que la République islamique y avait récemment réprimées.
Ce rétablissement d’une unité, au moins de façade, du camp chiite face aux Etats-Unis représente un acquis considérable pour le régime des ayatollahs, dont la stratégie régionale fléchissait face à la protestation populaire de l’automne dernier. En outre, le Parlement irakien a voté, le 5 janvier, à l’unanimité des 170 députés présents, en faveur de l’expulsion des forces américaines. Quant à la frappe iranienne du 8 janvier, elle a ciblé aussi une base américaine au Kurdistan d’Irak, où le Pentagone envisage de se replier en cas d’aggravation de la situation dans le reste du pays.